Dans le Système solaire, et dans le cas de systèmes d'exoplanètes qui étaient connus jusqu'à présent, les planètes principales sont sur des orbites différentes, contrairement à l'anti-Terre du dernier opus des Gardiens de la Galaxie. Mais l'Univers semble une fois de plus rejoindre la fiction après la découverte des exoplanètes du type de la Tatooine de Star Wars il y a plus d'une décennie.
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« Il y a plus de choses au Ciel et sur la Terre, Horatio, que n'en rêve votre philosophie ». Non, ce n'est pas un commentaire de ChatGPT en réponse à la demande d'un certain Horatio qui lui aurait demandé ce qu'il fallait penser de la découverte probable annoncée par un communiqué de l'ESO ce 19 juillet 2023. Il s'agit d'une déclaration d'Hamlet, ou plutôt celle que Shakespeare met dans la bouche de son célèbre personnage.
Reste qu'elle illustre bien l'annonce faite par l'ESO que, selon les observations dans la domaine des ondes millimétriques rendues possibles par le réseau de radiotélescopes Large Millimeter/submillimeter Array (Alma) dans le désertdésert de l'Atacama au Chili, les astronomesastronomes disposeraient pour la première fois d'une preuve que deux exoplanètes peuvent partager la même orbite comme ils l'expliquent dans un article publié dans Astronomy & Astrophysics. Ce n'est le cas d'aucune des planètes principales du Système solaire et ça n'avait jamais été vraiment observé dans le monde des exoplanètes... jusqu'à maintenant.
Une anti-Terre sur un point de Lagrange
On peut donc faire maintenant un rapprochement avec la contre-Terre, appelé aussi l'anti-Terre en référence à une croyance des astronomes grecques pythagoriciens de l'Antiquité, de l'UniversUnivers Marvel et dont on a vu une version dans le dernier opus des Gardiens de la GalaxieGalaxie. Elle y est présentée comme une sorte de copie de la Terre et donc sur la même orbite qu'elle mais que l'on ne peut pas voir de la Terre car toujours en opposition avec elle de l'autre côté du SoleilSoleil.
Ce n'est pas une surprise pour tout le monde, comme l'explique Olga Balsalobre-Ruza dans le communiqué de l'ESO, étudiante au Centre d'astrobiologieastrobiologie de Madrid (Espagne) et qui a dirigé l'article publié aujourd'hui : « Il y a vingt ans, la théorie prévoyait que des paires de planètes de massemasse similaire pourraient partager la même orbite autour de leur étoileétoile, ce que l'on appelle les planètes troyennes ou co-orbitalesorbitales. Pour la première fois, nous avons trouvé des preuves en faveur de cette idée ».
Rappelons que, dans le cas du Système solaire, comme l'explique la vidéo ci-dessous, des astéroïdesastéroïdes dits troyenstroyens se trouvent sur les points de Lagrange L4 et L5 de l'orbite d'une planète en orbite autour du Soleil. Les troyens les plus célèbres sont ceux de JupiterJupiter. L4 et L5 sont des points dans le référentielréférentiel en rotation dans le plan d'une planète qu'ils accompagnent autour d'un astreastre principal plus massif comme l'est le Soleil pour Jupiter mais aussi la Terre. La somme des attractions gravitationnelles des deux astres tend à y piéger des petits corps et c'est ainsi que l'on en compte environ 12 000 dans le cas de Jupiter.
Vous connaissez peut-être les L5 sur Terre, mais connaissez-vous les cinq points L dans l'espace ? Ce sont les points de Lagrange et ils sont bien utiles pour positionner certains satellites… ou des télescopes spatiaux comme Webb. The space to be en fait ! On vous explique tout cela grâce à cette vidéo. © Cnes
Une exotroyenne en formation ou détruite ?
Le concept de points de Lagrangepoints de Lagrange peut être transposé aux planètes extrasolaires, ce qui a donc été fait mais « les exotroyennes [Ndlr : planètes troyennes situées en dehors du Système solaire] ont jusqu'à présent été comme des licornes : leur existence était autorisée par la théorie, mais personne ne les avait jamais détectées », explique toujours dans le communiqué de l'ESO Jorge Lillo-Box, coauteur de l'étude et chercheur au Centre d'astrobiologie de Madrid.
Si les chercheurs ne font pas erreur, ils auraient donc trouvé une première candidate au titre d'exotroyenne en examinant une fois de plus le système exoplanètaire de PDS 70, une jeune étoile connue pour abriter deux planètes géantesplanètes géantes semblables à Jupiter, PDS 70b et PDS 70c, et dont Futura avait déjà parlé dans plusieurs articles.
Les astronomes ont en effet détecté avec Alma la signature probable au point L5 de PDS 70b d'un nuagenuage de débris rocheux et poussiéreux d'une masse pouvant atteindre environ deux fois celle de notre LuneLune. Il pourrait s'agir soit des restes d'une collision destructrice entre deux exoplanètes soit des restes de la formation justement d'une exotroyenne.
Grâce à Alma (Atacama Large Millimeter/submillimeter Array), des astronomes ont découvert la possible « sœur » d'une planète en orbite autour d'une étoile lointaine. Cette vidéo résume la découverte. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © ESO
S'il existe de vraies exo-Terres quelque part dans l'Univers et si des exotroyennes existent bien aussi, on se prend donc à rêver que la réalité rejoigne la fiction avec deux exo-Terres partageant la même orbite et deux formes de vie intelligente qui pourraient s'être développées sur ces deux monde, c'est d'ailleurs ce qui fait dire à Olga Balsalobre-Ruza : « Qui pourrait imaginer deux mondes partageant la même duréedurée d'année et les mêmes conditions d'habitabilité ? Notre travail est la première preuve que ce type de monde pourrait exister. On peut imaginer qu'une planète partage son orbite avec des milliers d'astéroïdes, comme c'est le cas pour Jupiter, mais je suis stupéfaite de voir que des planètes peuvent partager la même orbite ».
Il reste à confirmer pleinement cette détection possible d'une exotroyenne comme l'indique le communiqué de l'ESO qui explique que les astronomes devront encore patienter jusqu'en date à laquelle ils utiliseront à nouveau Alma pour voir si PDS 70b et le nuage de débris qui lui est associé se déplacent de manière significative sur leur orbite commune autour de l'étoile.
En attendant comme l'explique respectivement Nuria Huélamo, chercheuse au Centre d'astrobiologie, coauteure de l'étude et Itziar De Gregorio-Monsalvo, chef du bureau de la science de l'ESO au Chili, qui a également contribué à cette recherche : « Notre recherche constitue une première étape dans la recherche de planètes co-orbitales à un stade très précoce de leur formation [et] elle soulève de nouvelles questions sur la formation des troyennes, leur évolution et leur fréquencefréquence dans différents systèmes planétaires. L'avenir de ce domaine est très prometteur et nous attendons avec impatience l'extension des capacités d'Alma, prévue pour 2030, qui améliorera considérablement la capacité du réseau pour caractériser les troyens autour de nombreuses autres étoiles ».