« Aujourd’hui, cet écart de capacités est en notre faveur, mais s’il devient négatif pour nous, ce sera une très mauvaise journée », alerte un général de l’US Space Force, mentionnant sans les citer directement les fulgurants progrès des techniques spatiales militaires chinoises. Qu'est-ce qui justifie ces craintes américaines ?


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    C'est un message d'alerte qui se répète de plus en plus ces dernières années. Les généraux américains et le Pentagone craignent une réduction de l'écart des capacités militaires entre les États-Unis et leurs adversaires, dont la Chine en particulier.

    Le taux de revisite : un indicateur clé

    Ces dernières années, les lancements de satellites à usage militaire (ou présumés) se sont multipliés du côté chinois. Le déploiement dans le domaine de la reconnaissance s'intensifie, notamment grâce aux différentes gammes de satellites Yaogan, lancés depuis les années 2010. Au total, l'armée populaire de Chine (PLAPLA) en possède plusieurs dizaines, avec 20 nouveaux satellites mis en orbite rien qu'en 2024.

    À noter l'arrivée notable de la constellation Yaogan-43, composée de satellites de reconnaissance, dont 18 ont été déployés cette année, sur trois orbites basses différentes. Ici, le but est de réduire le temps d'attente entre la photographiephotographie d'un site terrestre, et la prochaine photographie de ce site. On appelle ça le taux de revisite : plus il est élevé, mieux c'est pour suivre, par exemple les mouvements de troupes sur le théâtre des opérations.

    Un bon taux de revisite peut donner l'avantage sur un conflit. Les États-Unis ont préféré se tourner vers des constellations d'imagerie commerciale (BlackSky, Planet, etc.) pour disposer d'un grand stock d'images. Côté chinois, la PLA reste pour l'instant plus souveraine.

    Aux satellites Yaogan s'ajoutent les satellites Gaofen d'observation de la Terreobservation de la Terre à usage civil, mais dont la dualité ne fait pas de doute. Au total, la Chine dispose de tous types de satellites nécessaires à la reconnaissance (imagerie optique, imagerie radar, écoute électromagnétique, préventionprévention de décollage de missile, etc.), et améliore son taux de revisite dans certains cas. Inquiétant pour l'US Space Force.

     

    Réduction d’écart de capacité dans les télécoms et brouillage

    Comme les États-Unis et certains pays alliés dont la France, la Chine dispose de satellites de télécommunications en orbite géostationnaire dédiés à un usage exclusivement militaire, essentiels pour raccorder le théâtre des opérations à l'arrière, le tout de façon sécurisée et cryptée pour éviter tout espionnage.

    Le premier jour de l'invasion russe en Ukraine, plusieurs satellites commerciaux de télécoms en orbite géostationnaire ont été brouillés, démontrant la vulnérabilité de ce dispositif par son manque de résiliencerésilience en cas d'attaque. Aujourd'hui, des satellites espions sont capables de venir « écouter » les communications reçues par un satellite de télécom, à savoir identifier les fréquencesfréquences précises sur lesquelles il reçoit et transmet les informations cryptées pour ensuite interférer ou brouiller.

    Le conflit ukrainien a montré l'intérêt d'utiliser des constellations de satellites de communication en orbite basse comme StarlinkStarlink (utilisé par l'armée en Ukraine depuis le début du conflit), plus nombreux. Le Pentagone a récemment manifesté l'intérêt grandissant des armées dans l'utilisation de ce genre de service. Il est d'ailleurs prévu que le Pentagone dispose de sa propre constellation pour cela avec le projet Pwsa. De son côté, la Chine vient juste de déployer les premiers de 12 992 satellites constituants sa propre mégaconstellation Guowang, à usage civil et militaire.

    Enfin, le nombre de satellites est important, la qualité du flux encore plus, surtout quand il s'agit de transférer sur Terre le plus vite possible des images prises par un satellite de reconnaissance. Communément utilisée par Starlink, la communication laserlaser entre satellite permet un flux au moins 10 fois supérieur à la communication radio. Mais c'est moins simple pour la communication avec la Terre, même si des solutions commerciales commencent à poindre dans le New SpaceNew Space. Encore une fois, la Chine et les États-Unis ont beaucoup progressé dans ce domaine.

    Prêts pour une guerre spatiale ?

    Les capacités de la Chine et des États-Unis à recourir à leurs infrastructures satellitaires pour leurs opérations terrestres (communication, reconnaissance) se rapprochent peu à peu. Mais ce n'est pas la seule chose alarmant l'US Space Force qui a surtout la charge des opérations satellites. La crainte réside aussi dans les attaques en orbite.

    Cela fait des années que la Chine réalise des exercices d'intimidation auprès des satellites espions américains avec ses propres satellites espions. Cet étrange ballet en orbite lointaine nous montre que tous deux sont capables de manœuvres de proximité et donc d'attaque antisatellite. Aujourd'hui, la Chine dispose de nombreux moyens pour le faire (missile, brouillage, etc.), si bien que les États-Unis s'entraînent à remplacer un satellite détruit au pied levé.

    Si le gouvernement de Biden s'est plutôt montré intangible face aux nombreux appels du Pentagone, cela devrait être moins le cas avec Donald Trump qui a créé l'US Space Force au cours de son premier mandat. En attendant, la Chine progresse très vite.