L’invasion militaire russe, qui a débuté le 24 février 2022, révèle à quel point l’Occident est dépendant de l’Ukraine pour ses activités spatiales. Plusieurs fusées américaines et européennes sont menacées et de nombreux vols Soyouz sont annulés.


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    Pendant l'ère soviétique, l'Ukraine était l'un des berceaux du programme spatial, surtout dans le domaine des moteurs-fuséesfusées. En 2011, le pays était toujours l'une des cinq plus grandes puissances spatiales au monde. L'Ukraine avait produit plus de 130 fusées et permis la mise en orbite de près de 250 satellites pour une vingtaine de pays.

    Parmi les fusées symboliques en Ukraine, il y avait la fusée DneprDnepr et la fusée Zenit, dont une version était même capable de décoller depuis une plateforme maritime. Après l'annexion de la Crimée en 2014, l'activité des lanceurs a décliné mais l'Ukraine continue d'exporter en Occident. Le constructeur historique Ioujnoïe est d'ailleurs en train de développer un nouveau lanceur nommé CycloneCyclone, destiné à être propulsé depuis le Canada. L'invasion russe risque de stopper toutes ces activités. De plus, cette expérience intéresse beaucoup la Russie de Vladimir Poutine.

    La fusée Cyclone 4M du constructeur Ioujnoïe, destinée à être lancée initialement depuis la Nouvelle-Écosse au Canada à partir de 2023. © NKAU
    La fusée Cyclone 4M du constructeur Ioujnoïe, destinée à être lancée initialement depuis la Nouvelle-Écosse au Canada à partir de 2023. © NKAU

    La dépendance de fusées européennes et américaines

    Pour la fusée Vega et sa version plus performante VegaVega-C, l'agence spatiale européenneagence spatiale européenne et son constructeur historique ukrainien Ioujnoïe développent l'étage supérieur Avum, en charge de finaliser la mise en orbite des satellites. L'invasion russe réduira l'approvisionnement alors qu'une version 100 % européenne de la fusée Vega (Vega-E) n'est attendue qu'en 2026.

    Côté américain, la fusée Antares est équipée de moteurs russes pour son étage principal qui est sous maîtrise d'œuvre ukrainienne. Or, ce lanceur est entièrement dédié à l'envoi de cargos Cygnus pour la station spatiale internationale (ISS). Pour l'instant, les États-Unis disposent de réserves pour réaliser encore deux vols. Après, il faudra peut-être transférer le cargo sur un autre lanceur.

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    Les fusées américaines Atlas-V de la United Launch Alliance (ULA) utilisent aussi des moteurs russes. La Russie n'approvisionnera plus ces moteurs et ne fournira plus son expertise, mais l'ULA a précisé qu'ils disposaient de suffisamment de moteurs jusqu'au dernier vol avant de passer à la fusée 100 % américaine Vulcan dans les prochaines années.

    On dénombre plusieurs start-upstart-up du New Space eu Europe et aux États-Unis qui sont en partenariat avec des contractuels ukrainiens pour concevoir les moteurs de leurs futures fusées. Certaines ont même des employés en Ukraine qui ont quitté le pays ou pris les armes.

    Fin du règne de la Soyouz

    Fait rare, un vol SoyouzSoyouz a été pendant quelques jours l'objet d'un conflit géopolitique. La fusée devait décoller début mars depuis BaïkonourBaïkonour avec à bord 36 satellites télécom de OneWebOneWeb. La fusée était déjà sur son pas de tir mais c'était sans compter sur les menaces de Dimitri Rogozin, directeur de Roscosmos.

    Celui-ci a menacé d'annuler le vol si OneWeb ne garantissait pas la non-utilisation militaire de son réseau satellite, mais également d'exclure le gouvernement du Royaume-Uni de ses actionnaires (en réponse aux sanctions britannique). OneWeb a finalement décidé d’annuler tous ses vols prévus sur Soyouz pour déployer les 240 satellites restants afin de compléter sa constellationconstellation. La compagnie cherche des solutions avec d'autres lanceurs. Quant aux 36 satellites à Baïkonour, ils resteront dans une salle sous scellés.

    L’étage supérieur Avum de la fusée européenne Vega en cours de test. Il est fourni par le constructeur ukrainien Ioujnoïe. © G. Porter, ESA
    L’étage supérieur Avum de la fusée européenne Vega en cours de test. Il est fourni par le constructeur ukrainien Ioujnoïe. © G. Porter, ESA

    On note que la fusée russe Soyouz décolle aussi de Kourou, en partenariat avec ArianespaceArianespace. Il n'en n'est désormais plus rien. Les équipes russes ont été rappelées au pays et plus aucun vol Soyouz-ST n’est prévu désormais. Le spatial européen va beaucoup en souffrir alors que la fusée Ariane 6Ariane 6 tarde à venir. La Soyouz, elle, ne volera plus que pour des clients russes.

    Dimitri Rogozin avait donné un ultimatum de 48 heures pour que Roscosmos obtienne les garanties de OneWeb, faute de quoi le vol serait annulé. C’est finalement ce qu’il s’est passé. Pendant ce temps, la Soyouz patientait sur son pas de tir dans le brouillard kazakh. © Roscosmos
    Dimitri Rogozin avait donné un ultimatum de 48 heures pour que Roscosmos obtienne les garanties de OneWeb, faute de quoi le vol serait annulé. C’est finalement ce qu’il s’est passé. Pendant ce temps, la Soyouz patientait sur son pas de tir dans le brouillard kazakh. © Roscosmos