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Alors que les crédits pour l'exploration spatiale se réduisent, on assiste à une montée en puissance des initiatives privées pour prendre la relève de la Nasa. Il y a bien sûr des compagnies privées comme SpaceXSpaceX, la fondation B612 (qui se propose de repérer avec l'aide de donateurs publics les géocroiseurs dangereux) ou encore Planetary Resources, qui vise, elle, l'exploitation minière des astéroïdes. Mais voilà qu'un groupe de personnes rassemblées au sein de l'ISEE-3 Reboot Project se prépare à prendre le contrôle d'une ancienne sonde dont la Nasa ne s'occupait plus depuis 1997 : ISEE-3, ou International Sun-Earth Explorer-3.
Ce nom ne parlera sans doute pas à beaucoup et pourtant, les concepteurs d'ISEE-3 peuvent se targuer de plusieurs records avec cette sonde solaire. Lancée en 1978, elle a été la première à étudier le vent solaire en continu depuis le point de Lagrange L1 du système Terre-Soleil, aidant à comprendre l'impact de l'activité du Soleil sur la Terre et sa couverture satellitaire. Enfin, elle a été le premier engin fabriqué par l'humanité à pénétrer dans la queue d'une comète en 1984. Il s'agissait de Giacobini-Zinner. Après avoir collecté des données à son sujet en s'approchant à seulement 7.800 kilomètres de son noyau, ISEE-3 a fait partie de l'armada de sondes qui, telle Giotto, sont parties à la rencontre de la comète de Halleycomète de Halley lorsqu'elle s'est approchée au plus près du Soleil, en 1986.
Une vidéo de présentation de la mission ISEE-3/ICE (The International Sun-Earth Explorer-3/International Cometary Explorer). Lancée en 1978, elle a permis d'étudier les interactions entre le Soleil et la magnétosphère de la Terre puis d'analyser la comète Giacobini-Zinner. En août 2014, elle passera tout près de la Terre. Les membres de l’ISEE-3 Reboot Project vont tenter de communiquer avec elle pour lui donner une seconde vie. © ISEE3Returns, YouTube
La sonde ISEE-3 incarnait le sommet de la technologie spatiale à l'époque de son lancement. On capte encore aujourd'hui sa balise, et elle contient toujours suffisamment de carburant pour réussir des transferts d’orbite. Elle devrait passer au plus près de la LuneLune en août 2014. Au siècle dernier, les échanges avec la sonde utilisait une bande de fréquencesbande de fréquences réservée aux communications gouvernementales. Cette bande S est désormais démodée et l'ISEE-3, en supposant que tous ses instruments soient encore opérationnels, effectue des mesures 10.000 fois moins rapidement que les sondes solaires modernes. Mais, tout comme le télescope spatialtélescope spatial Hubble ou le VLTVLT n'ont pas anéanti l'intérêt de l'astronomie amateur, ISEE-3 pourrait permettre aux étudiants et même au public de se mettre dans la peau des astronauticiens et des physiciensphysiciens solaires du XXe siècle.
Des sondes spatiales dans le domaine public ?
Réalisant cela, les membres de l'ISEE-3 Reboot Project ont obtenu l'aval de la Nasa pour prendre le contrôle de la sonde et lui donner une nouvelle vie avec le but de la ramener au point de Lagrange L1. Utilisant la finance participative (crowdfunding en anglais), ils ont réussi à lever les fonds nécessaires sur InternetInternet à hauteur de 150.000 dollars, soit environ 110.000 euros. Une partie sert par exemple à payer le temps d'utilisation du radiotélescoperadiotélescope d'Arecibo, à Porto Rico. La position de la sonde a été réévaluée, et il apparaît maintenant possible qu'elle entre en collision avec la Lune. La remise en service doit donc commencer par une mission de sauvetage. Si tout va bien, le premier nouvel objectif d'ISEE-3 sera à nouveau de s'approcher d'une comète, 46P/Wirtanen, pour une rencontre prévue en 2018.
L'esprit de l'ISEE-3 Reboot Project fait son chemin. La Nasa a annoncé récemment qu'elle ne comptait plus utiliser le télescope SpitzerSpitzer. Après ISEE-3, l'exploitation d'un autre instrument prestigieux, auréolé de ses découvertes glorieuses en astrophysiqueastrophysique et en cosmologiecosmologie, pourrait donc bien tomber dans le domaine public, si l'on peut dire. Seule ombre au tableau, la Nasa dépense actuellement environ 16 millions de dollars chaque année pour poursuivre des observations avec Spitzer. Le privé fera-t-il aussi bien, et à plus bas prix ? Cela reste à prouver.
En attendant, comme ils viennent de l'annoncer sur leur page le 29 mai 2014, les membres de l'ISEE-3 Reboot Project ont repris contact avec ISEE-3 et lui ont demandé d'effectuer certaines opérations.