Après une année spatiale 2024 très riche, la Chine vise des ambitions plus grandes pour cette année. Floraison de nouveaux lanceurs, déploiements de mégaconstellations, mission vers un astéroïde, défense spatiale... À quoi faut-il s’attendre ?


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    La Chine va-t-elle de nouveau battre son record de lancements cette année ? En 2024, on comptait un record de 68 lancements, soit un de plus qu'en 2023. Pourtant, la Chine avait prévu d'en réaliser une centaine. Cet écart s'explique notamment par une baisse de cadence dans le New Space, mais aussi dans les vols de fuséesfusées Long March, qui ont du mal à se moderniser. Ainsi, cette année 2025 verra aussi un changement de direction de l'agence spatiale chinoise.

    Pléthore de nouveaux lanceurs

    Il faut s'attendre à pas moins d'une demi-douzaine de vols inauguraux cette année ! On devrait assister par conséquent à une multiplication des lanceurs moyens-lourds dans le parc chinois, ce qui est une aubaine au vu de la demande des nombreux opérateurs privés qui ont hâte de déployer leur constellation satellites.

    Du côté de la CASC (China Aerospace Science and Technology Corporation, dépendant du gouvernement et opérateur des Long March), on attend une nouvelle version de la fusée Long March 8, qui a volé trois fois depuis 2020. La variante disposera d'un second étage plus puissant, son vol inaugural est prévu courant janvier.

    Il faut aussi s'attendre à une nouvelle version de la LM-12, qui a effectué son vol inaugural en novembre dernier. La LM-12A devrait être réutilisable. Pour cela, des tests de décollage et d'atterrissage vertical (VT-VL) sont attendus au cours de l'année avant le vol inaugural. Initialement, la LM-8 était censée être la première fusée réutilisable de Chine, mais il n'est plus trop question de cela pour ce modèle.

    Le parc des fusées Long March doit s'agrandir en 2025 avec deux nouveaux modèles. © Spacekiwi, Daniel Chrétien
    Le parc des fusées Long March doit s'agrandir en 2025 avec deux nouveaux modèles. © Spacekiwi, Daniel Chrétien

    Premières réutilisations ?

    Outre la Long March 12A, c'est du côté du New Space qu'il faut aller voir, notamment auprès de l'entreprise Landspace, qui a déjà fait voler la toute première fusée chinoise privée avec des ergols (carburants) liquides. En 2024, Landspace a réalisé de fantastiques tests de VT-VL pour préparer la réutilisation. Les éléments du modèle de vol inaugural sont déjà en cours de production. Ce sera probablement un des vols les plus importants de Chine cette année.

    Outre Landspace, qui d'autre postule pour devenir le SpaceXSpaceX chinois ? Il faut regarder du côté de Space Pioneer, start-upstart-up qui espérait faire voler un équivalent de la Falcon 9Falcon 9 l'année dernière. Mais, c'était sans compter sur un essai à feufeu statique, à la sécurité tellement relative, que le démonstrateurdémonstrateur qui devait rester au sol s'est soudainement envolé, menaçant de se crasher dans la ville voisine du site de test... Le désastre étant évité, Space Pioneer annonce un premier vol de sa Tianlong-3 réutilisable cette année.

    Cinq à six autres nouveaux lanceurs du New Space chinois sont attendus. La start-up iSpace devrait dévoiler son lanceur potentiellement réutilisable Hyperbola-3, et la start-up Galactic Energy sa fusée PallasPallas-1. CAS Space compte aussi faire voler sa fusée Kinetica-2. Toutes ces fusées sont des premières pour ces start-up, car elles utilisent des carburants liquides, dont la maîtrise est beaucoup plus complexe que pour un moteur à poudremoteur à poudre.

    De nombreuses fusées privées sont attendues en Chine en 2025, dont les premières censées être réutilisables, une transformation radicale dans le spatial chinois ! © Spacekiwi, Daniel Chrétien
    De nombreuses fusées privées sont attendues en Chine en 2025, dont les premières censées être réutilisables, une transformation radicale dans le spatial chinois ! © Spacekiwi, Daniel Chrétien

    Mégaconstellations satellites, et doutes sur leur usage militaire

    La Chine a beaucoup, beaucoup, vraiment beaucoup de satellites à déployer dans les prochaines années. En concurrence de StarlinkStarlink de SpaceX et de Kuiper d'AmazonAmazon, deux mégaconstellations satellites de connectivité 5G5G depuis l'orbiteorbite basse sont déjà en cours de déploiement depuis 2024 : Guowang (13 000 satellites visés, 10 déployés) du gouvernement, et G60 de la SSST soutenue par Shanghai (12 000 satellites, 54 déployés). Une autre constellation proposée par Landspace (10 000 satellites) devrait voir le jour en 2025 (des prototypes ont déjà été mis en orbite l'an dernier).

    Bien d'autres constellations sont en projet en Chine, mais déjà certains s’inquiètent sur la possible dualité secrète des satellites Guowang. En effet, il a fallu la Long March 5B - l'un des lanceurs chinois les plus puissants, plus puissant qu'Ariane 5Ariane 5 - pour lancer les 10 premiers satellites Guowang. Qu'y a-t-il à bord de ces satellites pour justifier une telle massemasse ?

    Les activités spatiales militaires chinoises continuent d'inquiéter l’US Space Force. En 2024, la Chine a opéré un déploiement record de satellites militaires, et cela devrait se poursuivre cette année. Le potentiel de guerre spatiale de la Chine montre qu'elle est prête à l'action si besoin, par exemple dans le cadre d'une hypothétique invasion de Taïwan - conflit qui pourrait rapidement être exporté en orbite.

    Plus que jamais, la Chine sera scrutée sur sa gestion de la sécurité, mais aussi dans ses nouvelles directions en innovation avec l'accent sur le développement d'un Starship chinois. © Weibo, Cosmoleap
    Plus que jamais, la Chine sera scrutée sur sa gestion de la sécurité, mais aussi dans ses nouvelles directions en innovation avec l'accent sur le développement d'un Starship chinois. © Weibo, Cosmoleap

    Un astéroïde et un œil sur l’Univers

    La station spatiale chinoise va continuer d'accueillir des astronautesastronautes chinois à bord de ses trois modules. Une extension de la station par l'ajout de modules supplémentaires est prévue, mais probablement pas au cours de cette année. Pas de mission robotiquerobotique sur la LuneLune cette année, après la formidable performance de Chang'e 6 qui a rapporté près de deux kilos de roches depuis la face cachée de la Lune l'année dernière. La prochaine mission est prévue en 2026 avec Chang'e 7, au pôle Sud. Les travaux de préparation à l'arrivée d'un astronaute chinois sur la Lune vont se poursuivre.

    La Chine vise aussi un astéroïdeastéroïde en 2025 avec la mission Tianwen-2, qui sera la première mission chinoise à rapporter des échantillons sur Terre. L'astéroïde s'appelle Kamo'oalewa et il a un diamètre entre 40 et 100 mètres de large. Il s'agit d'un ancien morceau de notre Lune.

    Enfin, la Chine prévoit le lancement de son grand télescope spatial Xuntian, l'équivalent de HubbleHubble.

    Xuntian aura un avantage sur Hubble : pour le réparer, il suffira de l'amarrer à la station spatiale chinoise plutôt que d'envoyer une navette spatiale ! © Chinese Manned space Agency
    Xuntian aura un avantage sur Hubble : pour le réparer, il suffira de l'amarrer à la station spatiale chinoise plutôt que d'envoyer une navette spatiale ! © Chinese Manned space Agency

    Avec ces missions, la Chine continuer de progresser dans son savoir-faire en sciences spatiales et en astronomie, un volet important pour le pays qui veut devenir la première puissance scientifique du monde en 2049.