Pour la première fois en septembre 2022, un engin spatial, la mission Dart, a frappé un astéroïde, Dimorphos. Objectif : le dévier de sa trajectoire. Mais la collision n’a pas eu que ce seul effet, nous apprennent aujourd’hui des chercheurs. Elle a carrément remodelé la forme de l’astéroïde.


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    L'humanité peut-elle se préparer face à la fin du monde pour potentiellement s'en protéger ? La réponse avec Astropierre dans cet épisode de Futura dans les Étoiles. © Futura

    En novembre 2021, la Nasa lançait une mission inédite. La mission Double Asteroid Redirection Test, plus connue sous son acronyme DartDart. Son objectif : heurter l'astéroïde Dimorphos pour évaluer la capacité de l'humanité à dévier la trajectoire d'un tel objet qui pourrait présenter des risques de collision avec la Terre. Le choc, à grande vitesse et frontalfrontal, a bien eu lieu à plusieurs millions de kilomètres. C'était en septembre 2022.

    La réussite de la mission n'avait pas tardé à être annoncée par la Nasa.

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    Mission Dart : l’humanité a réussi à dévier un astéroïde pour la première fois de son histoire !

    Pour la première fois, l'humanité était parvenue à dévier un astéroïde. Et pas qu'un peu. Avant la collision avec Dart, il fallait à Dimorphos 11 heures et 55 minutes pour faire le tour de son astéroïde parent - car l'objet visé fait partie d'un système binairesystème binaire. Une modification de cette durée de 73 secondes constituerait un véritable succès, confiaient les scientifiques à ce moment-là. Mais après l'impact, Dimorphos s'était mis à tourner en seulement 11 heures et 23 minutes !

    Dart sur Dimorphos, un impact aux lourdes conséquences

    Aujourd'hui, la publication de nouveaux résultats de la mission Dart dans la revue Nature Astronomy révèle quelques détails surprenants de l'opération. L'impact - pourtant comparable, en masse, à celui d'une fourmifourmi sur deux bus - ne semble pas seulement avoir laissé un cratère sur l'astéroïde. Dimorphos pourrait en réalité avoir complètement changé de forme.

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    « On s’est demandé si on n’avait pas pulvérisé l’astéroïde ! » La mission Dart racontée par Patrick Michel

    Quelques semaines après la collision, l'un des pères de la mission et directeur de recherche au CNRS à l'Observatoire de la Côte d'Azur, Patrick Michel, nous confiait avoir pensé un instant que Dart avait pulvérisé Dimorphos. Il n'était donc peut-être pas si loin de la vérité. Car, sur la base de simulations et de différentes observations, les astronomesastronomes estiment aujourd'hui que l'astéroïde de quelque 5 millions de tonnes a tout de même perdu dans l'opération environ 20 millions de kilos. C'est l'équivalent de six fuséesfusées Saturn V qui ont emmené les astronautesastronautes du programme Apollo sur la LuneLune !

    Des simulations qui révèlent la nature de l’astéroïde

    Ces résultats, les astronomes les ont obtenus grâce à un algorithme qui a déjà fait ses preuves par ailleurs. Il décompose l'impact entre deux corps en millions de particules dont le comportement est déterminé par l'interaction de diverses variables reconfigurables, telles que la gravitégravité, la densité ou la résistancerésistance du matériaumatériau de l'astéroïde. En quelque 250 simulations, les chercheurs ont eu tout le loisir de visualiser les effets de variations sur les paramètres qui leur restent inconnus.

    En comparant les résultats de toutes ces simulations aux données recueillies par quelques satellites, les télescopestélescopes spatiaux James-Webb et HubbleHubble et par des instruments sur le sol terrestre, les chercheurs concluent que « Dimorphos est un astéroïde « tas de décombres » maintenu par une gravité extrêmement faible plutôt que par sa force de cohésion. » De quoi expliquer l'efficacité étonnante de la déviation orbitaleorbitale provoquée par Dart.

    Avant la collision avec la mission Dart, l’astéroïde Dimorphos ressemblait un peu à un M&M’s granuleux. © Johns Hopkins APL, Nasa
    Avant la collision avec la mission Dart, l’astéroïde Dimorphos ressemblait un peu à un M&M’s granuleux. © Johns Hopkins APL, Nasa

    En attendant confirmation, la défense planétaire progresse

    Les astronomes s'attendent donc désormais à ce que la mission Hera, menée par l'ESA, l'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne, et qui devrait atteindre Dimorphos fin 2026, trouve un astéroïde de forme très différente. Comme si quelqu'un avait mordu dans le M&M's qu'il était avant sa rencontre avec Dart.

    Si cela devait se confirmer, les astronomes notent que Dimorphos, comme RyuguRyugu et Bennu semblent finalement présenter un manque de cohésion certain. Alors même que le premier astéroïde est riche en silicatessilicates et les deux autres, en carbonecarbone. « Il est intrigant d'imaginer que tous les petits astéroïdes manquent de cohésion. Mais ce serait une bonne nouvelle pour la défense planétaire, car si nous connaissons à l'avance la réaction d'un corps, cela facilitera la conception des outils nécessaires à notre protection », conclut Patrick Michel dans un communiqué de l’ESA.