Le temple pré-inca de Pumapunku se résume à un entassement de mystérieux blocs de pierre géants semblant s’encastrer les uns dans les autres. Pour comprendre son architecture et retrouver sa forme originale, des chercheurs ont imprimé en 3D chacune des pierres formant ainsi un puzzle miniature.


au sommaire


    Pumapunku, situé à l'ouest de la Bolivie sur les rives du lac Titicacalac Titicaca, est un des sites archéologiques les plus mystérieux. Ses mégalithes de pierre, dont les plus grosses atteignent 20 tonnes, possèdent des encoches qui semblent montrer que les blocs s'encastraient ensemble comme des briques de Lego géantes. Une technique montrant une degré de technicité très avancé, au point que les thèses les plus folles circulent à son sujet : la cité aurait été construite par des extraterrestres ou serait la preuve d'une théorie « contre-évolutionniste », des civilisations plus avancées ayant découpé les blocs au laser. Construit par la civilisation Tiwanaku il y a plus de 1.500 ans, Pumapunku (« La porteporte du pumapuma ») a inspiré toute l'architecture des Incas qui ont succédé aux Tiwanaku en Bolivie vers 1300 après J.-C., comme la mythique cité du Machu Picchu.

    Les ruines de Pumapunku se situent dans la vallée de Tiwanaku, sur les rives du lac Titicaca à plus de 3.000 mètres d’altitude. © Alexei Vranich, Heritage Science
    Les ruines de Pumapunku se situent dans la vallée de Tiwanaku, sur les rives du lac Titicaca à plus de 3.000 mètres d’altitude. © Alexei Vranich, Heritage Science

    Malgré tout, on ignore encore beaucoup de choses à son sujet. Le site se résume aujourd'hui à un amoncellement de blocs dispersés sur des centaines de mètres. Certains ont été retournés ou déplacés au fil des siècles, d'autres sont endommagés, à tel point que plus aucune pièce ne figure aujourd'hui à son emplacement initial. Un vrai casse-tête pour les archéologues qui peinent à reconstituer la forme exacte de l'édifice originel.

    Les blocs d’andésite ressemblent à des pièces de Lego géantes s’encastrant les unes dans les autres. © Alexei Vranich, Heritage Science
    Les blocs d’andésite ressemblent à des pièces de Lego géantes s’encastrant les unes dans les autres. © Alexei Vranich, Heritage Science

    Un puzzle 3D de quelque 150 morceaux

    Alexei Vranich, chercheur à l'université de Californie à Berkeley, a décidé d'utiliser les techniques numériquesnumériques modernes pour s'atteler à la tâche. Il a d'abord modélisé numériquement chacun des 140 fragments d'andésiteandésite et des 17 dalles de grèsgrès recensés par les différentes études scientifiques ou par ses propres observations sur le site. Les plus abîmés ont été reconstitués par extrapolation ou par analyse comparative. Des blocs miniatures, d'une taille de 4 % de celle des originaux, ont ensuite été fabriqués un par un à l'aide d'une imprimante 3D. Armé de ces pièces de Lego, Alexei Vranich et ses collègues ont pu s'atteler à reconstruire le temple. « Il est bien plus facile et intuitif de manipuler des pièces physiques que de les déplacer et les retourner virtuellement sur un ordinateurordinateur », atteste le chercheur dans une interview au site Gizmodo.

    Pour faciliter le travail de reconstruction, les chercheurs ont regroupé les pièces par forme et par taille. © Alexei Vranich, Heritage Science
    Pour faciliter le travail de reconstruction, les chercheurs ont regroupé les pièces par forme et par taille. © Alexei Vranich, Heritage Science

    Après de heures passées à assembler leur puzzle géant, les chercheurs ont établi une maquette assez fidèle de ce à quoi aurait pu ressembler le temple détruit. « Il est particulièrement intéressant de constater que les portes de différentes tailles étaient alignées de manière à créer un effet "miroir" : une grande porte, puis une moyenne, puis une plus petite », détaille Alexei Vranich. « Cela donne un effet d'infini comme si vous vous trouviez dans une seule pièce. Cela peut être lié à la croyance des Incas selon laquelle c'est l'endroit où le monde a été créé. »

    La reconstitution virtuelle du temple de Pumapunku en 3D. © Alexei Vranich, Heritage Science
    La reconstitution virtuelle du temple de Pumapunku en 3D. © Alexei Vranich, Heritage Science

    Reconstruire Palmyre

    Le chercheur compte mettre librement à disposition ses modèles 3D afin que n'importe qui puisse imprimer et construire son propre temple Pumapunku chez soi. « On découvrira peut-être ainsi de nouveaux indices permettant de reconstituer d'autres temples de la région », espère-t-il. Sa technique pourrait également servir à reconstruire des vestiges détruits durant le conflit en Syrie, comme la cité de Palmyre, ou encore pour mieux comprendre les accidentsaccidents d'avions, en modélisant les différents morceaux de la carcasse. Au passage, Alexei Vranich espère enfin avoir tordu le cou aux théories extraterrestres.