Deux archéologues ont fabriqué un parfum à partir de résidus trouvés dans les amphores d’une ancienne parfumerie. Une fragrance forte, épicée et musquée, à la texture beaucoup plus épaisse et persistante que celle de nos parfums actuels.


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    Cléopâtre, dernière reine de la dynastie macédonienne d'Égypte, était connue pour son amour des parfums enivrants. La légende raconte que pour séduire l’empereur Marc Antoine en l'an 41 avant J.-C, elle aurait enduit les voiles violettes de son bateau avec un parfum si puissant qu'on pouvait le sentir depuis la côte.

    Thmuis, la capitale du parfum de l’Égypte antique

    Des chercheurs affirment aujourd'hui avoir reconstitué ce fameux parfum. « C'était le Chanel n°5 de l'Égypte ancienne », assure au site Atlas Obscura Robert Littman, un des deux archéologues qui a participé au projet. L'idée est née lors de fouilles dans la cité antique de Tell El-Timai, située près du deltadelta du Nil au nord du Caire. Fondée il y a environ 6.500 ans, cette cité s'appelait à l'époque Thmuis. Elle était connue pour sa production de parfums, notamment le Mendesian et Metopian, des fragrances de luxe à base de myrrhemyrrhe, une résine extraite d'un arbrearbre originaire de la péninsulepéninsule arabique et de la Corne de l'Afrique. Ces deux parfums étaient très appréciés des Égyptiens de la classe aisée.

    Un parfum reconstitué à partir de résidus trouvés dans des amphores

    En 2012, Robert Littman et ses collègues mettent au jour une ancienne fabrique de parfums datant du IIIe siècle avant J.-C. où sont stockées des amphores et des bouteilles de verre contenant des résidus secs. Résidus complètement inodores mais qui permettent aux chercheurs d'établir une liste d'ingrédients ayant servi à la fabrication des parfums. Ils confient alors leur liste à deux spécialistes allemands de l'Égypte ancienne, Dora Goldsmith et Sean Coughlin, afin qu'ils recréent les senteurs selon les méthodes traditionnelles décrites dans des textes grecs anciens. Comme le Mendesian et le Metopian, ce parfum contient de la myrrhe, mais aussi de la cardamome, de la cannellecannelle et de l'huile d'olive. Sa consistance huileuse et collante, est beaucoup plus épaisse que celle de nos parfums actuels. S'évaporant moins vite, son odeur épicée et musquée persiste bien plus longtemps sur la peau.

    Selon la légende, Cléopâtre aurait utilisé un puissant parfum pour envoûter l’empereur Marc-Antoine en l'an 41 avant J.-C. © Lawrence Alma-Tadema, Wikipédia
    Selon la légende, Cléopâtre aurait utilisé un puissant parfum pour envoûter l’empereur Marc-Antoine en l'an 41 avant J.-C. © Lawrence Alma-Tadema, Wikipédia

    Si l'on peut supposer que ce parfum a effectivement circulé à l'époque de Cléopâtre, rien ne permet de dire que la reine l'a elle-même porté, tempère Mandy Aftel, une parfumeuse de Berkeley (Californie) qui a également contribué à reconstituer un ancien parfum à partir de la momie d'une fillette en 2005. « Cléopâtre n'achetait pas ses parfums mais faisait fabriquer ses propres fragrances », fait-elle remarquer. Un avis partagé par Maud Kochanski-Lullien, auteur du blogblog Le Labo de Cléopatre et qui recrée des senteurs antiques. « Cléopâtre se devait de porter un parfum digne de son rang et représentant sa dynastie, affirme la blogueuse qui a étudié un grand nombre de textes anciens. Celui-ci devait être bien plus complexe à l'instar de celui des rois Parthes qui contenait pas moins de 30 ingrédients. »