Après des années de guerre opposant les autorités irakiennes aux groupuscules terroristes, les archéologues retrouvent enfin le chemin des chantiers archéologiques en Irak. L'une des plus grandes villes de Mésopotamie, Ninive, est de nouveau sous la lumière des projecteurs, avec pour but de dévoiler les secrets de la cité antique. 


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    Au nord de Mossoul, en Irak, s'étendait autrefois une cité ayant fait rêver les archéologues et les historienshistoriens. Ninive, capitale de l'Empire néo-assyrien, fut la plus grande ville de Mésopotamie (et du monde) durant plusieurs siècles, redécouverte il y a environ deux-cents ans. Un filonfilon presque inépuisable pour les chercheurs, et particulièrement précieux pour en apprendre plus sur les civilisations ayant occupé le Proche-Orient durant l'Antiquité.

    Mais Ninive se situe dans un territoire ayant essuyé divers conflits au cours des trente dernières années. Un long article publié dans la revue de juillet et août 2024 d'Archaeology Magazine revient sur le retour récent des archéologues à Ninive, les découvertes réalisées ces dernières années et le futur des fouilles sur le site.

    Ninive par temps de guerre

    La guerre en Irak aura été dévastatrice pour les sites archéologiques à travers le pays. Plus particulièrement, l'implantation de l'État islamique (Daech) à Mossoul à partir de 2014 a permis à la faction terroriste de se livrer à des actes de destruction de grande ampleur. Sous les explosifs des djihadistes disparaissaient notamment une grande partie de la cité antique de Palmyre (en Syrie), et divers artefacts et monuments inestimables en Irak. Durant cette occupation de presque trois ans de la région de Mossoul, quelques vestiges ont pu être sauvés, à l'image du lamassu de Khorsabad, au nord de la métropole.

    En octobre 2023, les archéologues dégageaient une statue, dite « <em>lamassu</em> », sur le site archéologique de Khorsabad. © Pierre Butterlin, Mission archéologique française à Khorsabad
    En octobre 2023, les archéologues dégageaient une statue, dite « lamassu », sur le site archéologique de Khorsabad. © Pierre Butterlin, Mission archéologique française à Khorsabad

    En 2023, cette impressionnante statue chimériquechimérique resurgissait des sablessables sous lesquels les locaux l'avaient enfouie, soucieux de préserver un héritage millénaire face aux terroristes. Malgré les horreurs de la guerre et du djihadisme, l'archéologie est bien vivante en Irak. Plusieurs universités à travers le monde fomentent ainsi des projets et des chantiers sur place, mobilisant des archéologues irakiens, européens, américains ou asiatiques, pour excaver de nouveaux éléments. Et l'une des priorités est évidemment Ninive, les chercheurs semblent loin d'avoir exposé tous les secrets de la ville antique.

    Explorer et fouiller la plus grande ville de Mésopotamie

    Les autorités irakiennes avaient déjà « ressuscité » Ninive en reconstruisant la massive PortePorte de Mashki au cours des années 1970, détruite durant une bataille en 612 avant J.-C. L'ouvrage n'aura pas résisté aux coups de boutoir de l'État islamique, employant parfois des bulldozers pour raser des monuments anciens. L'Alliance internationale pour la protection du patrimoine dans les zones de conflit (Aliph), en partenariat avec l'université de Pennsylvanie et l'université de Mossoul, initiait en 2020 un projet visant à rebâtir la Porte, pour un coût estimé à plus d'un million de dollars.

    Dans les années 1970, le gouvernement irakien actait la reconstruction de la Porte de Mashki, muraille massive gardant l'entrée de Ninive. © Aliph
    Dans les années 1970, le gouvernement irakien actait la reconstruction de la Porte de Mashki, muraille massive gardant l'entrée de Ninive. © Aliph

    Une aubaine pour les archéologues sur place, qui en ont profité pour se lancer dans des fouilles extensives. Toujours à Ninive, la Porte d'Adad est, elle aussi, sujette à une restauration, agrémentée de fouilles approfondies. Les universitaires ont ainsi découvert de nouvelles pièces cachées, des statues, des restes humains ou encore des tablettes cunéiformescunéiformes. Autant d'éléments capitaux pour comprendre l'histoire de la ville, qui a bien failli disparaître au cours des années 2010, comme le rappelle le Global Heritage Fund. Les recherches vont continuer aux environs de Mossoul, afin de préserver le plus d'artefacts possible dans une région encore instable.