Au nord de l’Espagne, à quelques dizaines de kilomètres de la frontière française, des chercheurs australiens fouillent un site préhistorique majeur. Les universitaires espèrent bien comprendre le mode de vie de Néandertal et peut être expliquer sa disparition il y a 40 000 ans.


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    Au pied des montagnes pyrénéennes, des scientifiques s'affairent au cœur d'un site archéologique particulièrement prometteur. Dans la région montagneuse de Lleida, en Catalogne, le site d'Abric Pizarro est minutieusement fouillé puis plusieurs semaines. Abric Pizarro est une découverte significative, offrant des indices sur le mode de vie de NéandertalNéandertal, à une période méconnue nommée MIS 4. Une étude à paraître dans le Journal of Archaeological Science en septembre 2024 s'attarde sur le résultat actuel des fouilles, et ce que nous révèle le site sur la vie des Néandertaliens, il y a plusieurs millénaires.

    Des indices sur l’âpre vie de Néandertal dans les Pyrénées

    La chaîne de montagne séparant la France de l'Espagne est particulièrement riche en sites archéologiques préhistoriques. Pour excaver les artefacts d'Abric Pizarro, une équipe de chercheurs de l'Université nationale australienne (ANU, Australian National University) a été dépêchée sur place. Une étude des isotopes d’oxygène permet d'établir une temporalité du site, appelée chronologie isotopique. Cette ère s'étend de 65 000 à 100 000 avant J.-C. : peu de sites néandertaliens datant de cette période ont été retrouvés dans le monde.

    Des ossements, et notamment des dents, ont permis aux archéologues de dater les objets retrouvés dans les Pyrénées ces dernières semaines. © ANU
    Des ossements, et notamment des dents, ont permis aux archéologues de dater les objets retrouvés dans les Pyrénées ces dernières semaines. © ANU

    Sur le chantier pyrénéen, ce sont des milliers d'artefacts que les archéologues recouvraient ces dernières semaines. Du pollen enfoui dans les stratesstrates inférieures des roches et de la terre sont autant d'éléments pour dater le site. Mais ce sont des fragments d'os qui mettent les universitaires sur la piste pour comprendre les habitudes de vie de Néandertal dans les montagnes. Les individus avaient une connaissance étendue du secteur, s'adaptant à la géographie complexe de la région pour chasser des animaux de petite taille. Une affirmation prouvée par la présence de marques artificielles sur des ossements enterrés à Abric Pizarro. Des fragments d'outils, dont certains ayant pu servir à chasser, ont été retrouvés sur place et viennent appuyer l'hypothèse d'une présence plus étendue dans l'actuelle province de Lleida.

    Dans les Pyrénées, les archéologues et anthropologues de l’ANU ont retrouvé de nombreux artefacts néandertaliens. © Sofia Samper Carro
    Dans les Pyrénées, les archéologues et anthropologues de l’ANU ont retrouvé de nombreux artefacts néandertaliens. © Sofia Samper Carro

    Comprendre la disparition de Néandertal

    L'étude du JAS le précise : les quelques sites de nature MIS 4 fouillés jusqu'alors pourraient permettre d'expliquer la « disparition » de Néandertal, il y a 40 000 ans. Concernant le facteur climatique, les conditions étaient plus clémentes dans cette région des Pyrénées, avant de changer au cours des millénaires suivant MIS 4. Expliquer le remplacement de Néandertal par Homo sapiensHomo sapiens s'avère être une tâche délicate à laquelle travaillent les chercheurs de l'ANU depuis plus de vingt ans.

    Abric Pizarro s’est avéré particulièrement riche pour les chercheurs, qui ont collecté de nombreux artefacts dans les différentes strates du site. © ANU
    Abric Pizarro s’est avéré particulièrement riche pour les chercheurs, qui ont collecté de nombreux artefacts dans les différentes strates du site. © ANU

    En Espagne, d'autres sites néandertaliens ont été arpentés par les archéologues et les anthropologues. L'analyse de restes lithiques châtelperroniens ouvrait la voie à une compréhension plus vaste du destin de Néandertal dans la péninsulepéninsule ibérique. La culture châtelperronienne, identifiable selon certains types d'outils fabriqués et utilisés entre 40 000 et 47 000 avant J.-C., prend racine en France et dans le nord de l'Espagne. Toutefois, il n'est pas certain que le Châtelperronien soit exclusif à Néandertal, à une époque de changements sur le continent. Les évolutions climatiques provoquaient des mouvements démographiques à travers l'Europe.

    D'autres facteurs viennent expliquer la disparition de Neandertal, dont des maladies et des problèmes génétiquesgénétiques dus à la consanguinitéconsanguinité. Malgré les fouilles extensives d'Abric Pizarro permettant d'en apprendre plus sur les habitudes de vie de ces peuples primitifs il y a 50 000 ans, de nombreuses incertitudes demeurent.