Si les débats autour de la plus ancienne carte du monde animent la communauté des historiens depuis des décennies, de récentes découvertes rebattent les cartes. Non loin de Paris, des universitaires ont découvert une œuvre préhistorique vieille de 20 000 ans, ressemblant à une représentation topographique.
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Une petite grotte située à Noisy-sur-École, dans les rochers de la forêt de Fontainebleau, fait depuis quelques semaines le bonheur des archéologues. La formation naturelle, dite de Ségognole 3, abrite de nombreux éléments préhistoriques, dont ce qui semble être une sorte de carte particulièrement ancienne. Dans une étude publiée le 22 décembre dans l'Oxford Journal of Archaeology, deux chercheurs décrivent qu'un ensemble de sillons gravés qui se superposent à des morphologiesmorphologies naturelles de grèsgrès évoque une représentation miniature du paysage environnant. Elle deviendrait, de facto, l'une des plus anciennes cartes retrouvées à ce jour...
Une reproduction des cours d’eau environnants… vieille de presque 20 000 ans !
En 2020, la reprise de l’étude de cette grotte par Médard Thiry, de Mines-Paris, et Anthony Milnes, de l'université d'Adelaïde, démontrait que le plancherplancher de cet abri comportait de nombreux sillons. Ils se rejoignent et s'intriquent à des fentes naturelles. « Les sillons ont été creusés, ils contournent et traversent des bourrelets de grès, se rejoignent et aboutissent à une dépression dans la roche. Quand de l'eau de pluie s'infiltre dans l'abri, elle coule le long de ces sillons et remplit progressivement la dépression », observe Médard Thiry.
Ces altérités correspondraient à des particularités topographiques du secteur. Les sillons creusés ressemblent ainsi à un tracé de rivières qui confluent et se jettent dans un étang, ou dans un lac. L'abri de Ségognole 3 est connu depuis les années 1980 pour refermer la gravure d'une représentation sexuelle féminine encadrée par deux chevaux gravés. Le stylestyle des gravures avait permis de rapprocher ces chevaux à ceux de Lascaux et ainsi dater l'ensemble du Paléolithique supérieur. La période d'occupation du site s'avère très ancienne et permet aux experts de dresser des hypothèses concernant les recherches récentes.
La plus ancienne carte du monde ?
« Le relevé de tous ces éléments, apposés sur un plan, a permis de les rapprocher de la carte de la vallée de l'École, qui coule à quelque 500 mètres du site. On était là en présence d'une carte, ou plutôt d'une miniature ou d’un modèle 3D de la vallée et des paysages gréseux qui la dominent. Un modèle tridimensionnel et animé de l'hydrologiehydrologie et des paysages environnants. C'est l'une des "merveilles" de ce petit abri paléolithique », détaille Médard Thiry.
Les universitaires restent cependant prudents concernant l’interprétation de cette carte. Pour Médard Thiry, « il est sûr qu'elle n'a pas été tracée pour se repérer ». Selon le scientifique, il suffisait de gravir la colline pour pouvoir contempler le paysage environnant. Des questions émergentémergent, dont les réponses pourraient bien rester inconnues. La carte pourrait avoir servi à établir des plans de chasse, bien que cette thèse soit vue comme « simpliste ». Aurait-elle été un outil pédagogique visant à expliquer les phénomènes de l'eau ? Ou acquiert-elle une fonction bien plus symbolique voire mythique, toujours en relation avec la présence d'eau dans le secteur ? Le mystère demeure, mais les chercheurs sont bien déterminés à comprendre l'intérêt de la plus vieille et énigmatique carte du monde.