Le navire ayant servi à l’une des plus grandes expéditions arctiques du XIXe siècle a été visité par un engin téléguidé qui a révélé des images exceptionnelles. Quasiment intactes, les cabines pourraient contenir des documents papier en bon état permettant de comprendre les circonstances de la disparition du navire.


au sommaire


    En 1845, l'explorateur anglais John Franklin part depuis la Grande-Bretagne en 1845 à la recherche du passage du Nord-Ouest, qui relie les océans Atlantique et Pacifique par l'ArctiqueArctique. Équipés de coques recouvertes de fer pour affronter la glace, de machines à vapeur empruntées à des locomotives et de provisions pour trois ans, le HMS Terror et le HMS Erebus ne reviendront jamais à bon port. Selon un message retrouvé en 1859 sur l'île King William, Franklin et 23 membres d'équipage seraient morts dans des circonstances inconnues le 11 juin 1847.

    Les 105 survivants auraient alors tenté de rallier la civilisation par la terre ferme et seraient morts de froid et de faim en 1848 au milieu des terres arctiques du Canada. Des indices de cannibalisme et du matériel abandonné retrouvés au fil du temps montrent l'ampleur du désespoir qui a dû saisir les pauvres marins. Quelque 170 ans plus tard, on ignore toujours les causes d'une des plus grandes tragédies de l’exploration maritime, malgré la découverte des deux épaves au large de l'île King William, dans le passage du Nord-Ouest au Nunavut, en 2014 et 2016.

    Visite guidée du HMS Terror, disparu mystérieusement en 1848 au large de l’île King William, dans le territoire du Nunavut. © Parcs Canada

    « Un coffre au trésor de renseignements inédits »

    Le mystère va peut-être enfin se lever grâce aux images inédites du Terror qui viennent d'être dévoilées par l'équipe d'archéologie subaquatique de Parcs Canada. Les scientifiques ont pu explorer l’épave engloutie à 24 mètres de profondeur à l'aide d'un véhicule téléguidé (VTG) début août grâce des conditions météorologiques exceptionnelles, selon l'agence gouvernementale. « Nous avions l'impression qu'il s'agissait d'un navire récemment abandonné par son équipage, semblant avoir échappé au passage du temps », témoigne Ryan Harris, le directeur du projet et pilote du VTG.

    « L'état dans lequel nous avons trouvé la cabine du capitaine Crozier a de loin surpassé nos attentes, se réjouit également Marc-André Bernier, archéologue de Parcs Canada. Les meubles et les armoires sont non seulement en place, mais les tiroirs sont fermés et bon nombre d'entre eux sont ensevelis dans la vase, refermant des objets et des documents qui devraient fournir un coffre au trésor de renseignements inédits sur le sort de l'expédition de Franklin. » Les eaux froides et profondes, l'absence de lumière et les couches protectrices de sédimentssédiments ont en effet créé un environnement très propice à la préservation des matières organiques comme le papier.

    Les navires HMS Terror et le le HMS Erebus ont quitté l’Angleterre en 1845 à la recherche du passage Nord-Ouest dans l’Arctique. © capture YouTube, Parcs Canada
    Les navires HMS Terror et le le HMS Erebus ont quitté l’Angleterre en 1845 à la recherche du passage Nord-Ouest dans l’Arctique. © capture YouTube, Parcs Canada

    De la vaisselle intacte dans les étagères

    Durant 7 jours, 90 % du pont intérieur du navire et les 20 cabines ont été minutieusement explorés par le VTG, qui a découvert des lits et des bureaux quasiment intacts. Des rangées d'étagères remplies d'assiettes, de bols et de verresverres, ont été retrouvées dans la partie avant du navire où étaient situés les quartiers des matelots. La cabine du capitaine est la mieux préservée de toutes : par chance, une énorme quantité de sédiments s'est écoulée par la poupe, recouvrant une bonne partie des artéfacts. « Seuls les quartiers personnels n'ont pas pu être explorés car il y avait une porteporte close », rapporte Parcs Canada.

    À la suite d'un récent accord, tous les objets récupérés dans le cadre des recherches ultérieures appartiendront à la fois au gouvernement du Canada et aux Inuits, précise l'agence. Les plongées s'annoncent toutefois très délicates, la saisonsaison de dégel étant courte et l'eau dépassant à peine les 0 °C.