Les momies du Tarim ont été, pour certaines, si bien préservées par le désert pendant 4.000 ans que les traits de leurs visages sont encore visibles. Cependant, ces traits morphologiques et les restes archéologiques ne permettaient pas de savoir quelle était l'origine de ces momies aux cercueils étonnants. La génétique dissipe aujourd'hui le mystère autour de cette population.


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    La région autonome ouïghoure du Xinjiang au nord-ouest de la Chine faisait partie de la route de la soie, elle était une zone géographique au carrefour des migrations humaines et du commerce à travers l'Asie mais également entre l'Asie et l'Europe au IIe siècle avant J.-C. La région de Xinjiang (dénommée à la fin du XIXe siècle le Turkestan oriental) est divisée en deux zones, celle du nord comprenant notamment la Dzoungarie et celle du sud, qui inclut le bassin du Tarim.

    Entre 3.000 et 2.600 avant J.-C. (Âge du Bronze)), des éleveurs appartenant à la culture d'Afanasievo peuplaient la Dzoungarie et utilisaient des langues tokhariennes. Les traces archéologiques (notamment des textes bouddhistes) de ces langues dans différentes zones d'Asie et notamment au Tarim avaient ainsi permis aux anthropologues et archéologues de supposer quels avaient été les déplacements et influences des éleveurs de Dzoungarie en Asie.

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    Les centaines de momies du Tarim sont des restes humains dont l'origine intrigue les scientifiques depuis plusieurs décennies. Elles ont été exhumées au niveau du site de Xiaohe et leur datation est comprise entre deux millénaires avant J.-C. et 200 ans après J.-C. Si les corps ont été inhumés, il y a quatre millénaires pour certains, la dessicationdessication due à l'environnement désertique et salé les a maintenus dans un état de conservation exceptionnel, à tel point que les traits des visages sont encore visibles.

    Momie d'une femme dans le bassin du Tarim. © Wenying Li, <em>Xinjiang Institute of Cultural Relics and Archaeology</em>
    Momie d'une femme dans le bassin du Tarim. © Wenying Li, Xinjiang Institute of Cultural Relics and Archaeology

    L'une des caractéristiques intrigantes de ces visages est, par ailleurs, le fait que ces derniers arborent des traits suggérant une ascendance européenne plutôt qu'asiatique. Ces momies intriguent également en raison des cercueils en forme de bateau surmontés de peaux de bétail dans lesquels elles étaient disposées. Les tombes étaient localisées par des poteaux de boisbois ou par des rames. Les objets présents dans les sépulturessépultures indiquent une préférence, dans cette culture, pour les paniers tressés plutôt que pour ces mêmes objets en terre cuite.

    Cercueil en forme de bateau recouvert d'une peau de bête et surmonté d'une rame, à Xiaohe. © Wenying Li, <em>Xinjiang Institute of Cultural Relics and Archaeology</em>
    Cercueil en forme de bateau recouvert d'une peau de bête et surmonté d'une rame, à Xiaohe. © Wenying Li, Xinjiang Institute of Cultural Relics and Archaeology

    Une population isolée génétiquement, mais pas culturellement

    Dans une étude parue dans le journal Nature, des chercheurs ont voulu résoudre l'énigme de l'origine de ces momies : la population du Tarim avait-elle une ascendance européenne, comme le laissaient supposer les traits du visage des momies ou ces personnes étaient-elles apparentées aux éleveurs Afanasiéviens de Dzoungarie, comme le suggèrent les traces de langues tokhariennes au Tarim ?

    Afin de répondre à cette question, les chercheurs ont effectué des analyses génomiquesgénomiques sur cinq momies de Dzoungarie datés d'entre 3.000 et 2.800 avant J.-C. (début de l'Âge du Bronze) et sur 13 momies du bassin du Tarim datées de 2.100 à 1.700 avant J.-C. (début et milieu de l'Âge du Bronze). Ils ont ainsi pu montrer que les individus de Dzoungarie avaient bien une ascendance principalement Afanasiévienne alors que les momies du Tarim présentaient une ascendance différente et très limitée géographiquement.

    La population du Tarim n'a pas été fondée par une population de Dzoungarie mais elle est un sous-ensemble d'une population d'« Anciens Nord Eurasiens » du Pléistocène

    Les auteurs en concluent que la population du Tarim n'a pas été fondée par une population de Dzoungarie mais qu'elle est un sous-ensemble d'une population d'« Anciens Nord Eurasiens » du Pléistocène (-2.6 millions d'années à -11.700 ans). Cette population du Tarim a probablement été isolée génétiquement des autres populations humaines alentour et a subi un effet fondateur, c'est-à-dire lorsqu'une population se forme et ne contient qu'un sous-ensemble génétiquegénétique de la population d'origine.

    Leur isolement génétique n'a cependant pas empêché la population du Tarim d'intégrer les pratiques culturelles d'autres populations puisqu'elle a emprunté la fermentationfermentation du lait et la fabrication du fromage à la culture afanavasienne et qu'elle cultivait le bléblé, l'orgeorge et le milletmillet, des céréalescéréales domestiquées au nord et nord-est de la Chine.