Grâce à la micro-tomographie aux rayons X, des chercheurs sont parvenus à reconstituer en 3D un trio d'animaux momifiés vieux de 2.000 ans.
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Un chat, un serpent et un oiseauoiseau momifiés entrent dans un scanner... Ce qui pourrait sonner comme le début d'une blague pour le moins étonnante est en réalité le produit d'une collaboration entre archéologues, biologistes, égyptologues et ingénieurs. Grâce à l'imagerie 3D à rayons X, les chercheurs sont pour la première fois parvenus à révéler en détail les secrets cachés sous les bandelettes de ces trois animaux, morts il y a plus de deux millénaires.
Momification animale : un important rituel égyptien
La momification est l'une des pratiques les plus significatives de l'Égypte ancienne. Destinée à assurer le passage du défunt dans l'au-delà, elle est pratiquée sur l'ensemble de la période pharaonique. Les morts étaient accompagnés de divers objets (amulettes, récipients, peignes, perles, etc.) mais également d'animaux momifiés. Alors que certains serviront de victuailles dans l'après-vie, d'autres seront aux côtés du défunt en temps qu'animal de compagnie, ou bien ils peuvent encore servir d'offrande à un dieu particulier, en tant qu'incarnation d'une divinité spécifique (une chatte pour la déesse Bastet, un ibis pour honorer le dieu Thot). Toutes sortes d'animaux momifiés ont été découverts par les égyptologues : des plus communs - chats, chienschiens, oiseaux - aux plus redoutables - serpents, crocodilescrocodiles.
Les offrandes votives étaient achetées par les visiteurs des temples comme on paye aujourd'hui pour un cierge dans une église. Certains égyptologues suggèrent que les animaux momifiés pouvaient également servir de messagers entre les Égyptiens anciens et les dieux. La production monumentale de ces « produits » aurait requis la mobilisation de structures et de ressources importantes, avec des fermes chargées de l'élevage, de la momification et de la vente des créatures.
Momie 3D : le dessous des bandelettes
Originaire de la collection du Centre de l'Égypte, à l'université de Swansea, le trio de créatures avait déjà été identifié lors de précédentes études. Néanmoins, le manque de résolutionrésolution des techniques d'imagerie à disposition n'avait pas permis d'en apprendre bien plus sur ce qui se trouvait à l'intérieur de leur écrin de linlin. « Depuis au moins les années 1800, les momies animales ont été étudiées à l'aide de techniques intrusives ou non intrusives », écrivent les chercheurs dans leur étude, parue dans la revue Nature. Ainsi que leur nom l'indique, les techniques intrusives ont ce désavantage de perturber l'objet, voire de causer des dommages plus ou moins importants. C'est pourquoi la radiographieradiographie a progressivement pris la place de ces méthodes au cours des années. Mais là encore, le bât blesse.
« Bien que l'image (en deux dimensions) et l'analyse radiographique conventionnelle requièrent moins de temps et de puissance de calcul, l'image est une projection à travers l'ensemble de la momie. Par conséquent, il peut être difficile de déterminer l'exacte position et orientation du contenu de la momie dans un plan en 3 dimensions. » C'est là que l'imagerie 3D à rayons X entre en scène. Grâce à une résolution 100 fois supérieure à celle d'un scanner traditionnel et à la possibilité de modéliser l'intérieur de la momie en volume 3D (tomogramme) à l'aide de multiples scans, les chercheurs ont pu mettre en images les animaux dans leurs plus infimes détails.
Ils ont ainsi pu apprendre que le chat avait moins de cinq mois grâce aux dents encore incluses dans l'os de la mâchoire, et que celui-ci avait potentiellement été tué par strangulation. L'oiseau quant à lui semble être un faucon crécerellefaucon crécerelle et le serpent un cobra égyptien soumis à un rituel de mise à mort et de momification complexe. « Nos résultats ont mis au jour de nouveaux éléments de compréhension de la momification animale, de la religion et des relations Homme-animal dans l'Égypte ancienne », conclut Carolyn Graves-Brown, de l'université de Swansea.