Le sujet de la domestication des animaux au fil de l'histoire s'avère être sensible, et celle du loup et du chien encore plus ! En effet, les questions de chronologie ou de géographie sont nombreuses, et ce qui est établi un temps peut être remis en cause au moment d'une nouvelle découverte. Mais quand a-t-on commencé à domestiquer des canidés ? Une nouvelle étude concernant un site situé en Espagne, au Pays basque, avance de nouveaux éléments sur la chronologie des chiens en Europe.
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L'étude publiée dans le Journal of archaeology science de décembre 2022 explicite la méthodologie de l'analyse d'un humérushumérus de canidécanidé trouvé dans une grotte espagnole. Le chienchien est une espèceespèce qui, suite à sa domesticationdomestication, s'est révélée très proche de l'Homme. L'article souligne d'ailleurs la présence de chiens en contextes funéraires au cours de diverses cultures du Paléolithique supérieur. Et pourtant, c'est encore un sujet sensible avec de nombreuses zones d'ombre.
Différencier les races de canidés
La grande difficulté se situe du côté de la génétiquegénétique des animaux qui ont été retrouvés. On parle de loups, de chiens, mais aussi de lignées d'animaux. À l'heure actuelle, tous les paléogénéticiens ne sont pas d'accord entre eux tant à propos de l'évolution des espècesévolution des espèces en question que sur les dates de leur domestication.
Certains sites préhistoriques ont permis d'identifier ce que l'étude nomme des « proto-chiens » ressemblant à des chiens-loups. Des chiens-loups dont les os ont été retrouvés sur plusieurs sites d'Europe. Dans certains cas, une difficulté supplémentaire existe : il n'y a pas forcément d'os sur le site, comme pour l'empreinte de canidé au sol de la grotte Chauvet. Une découverte qui a relancé des publications sur le rapport humain/canidés il y a quelques années en des temps préhistoriques.
Un os trouvé dans une grotte en Espagne en 1985
L'ossement de l'étude a été découvert dans une grotte, et plus précisément dans une stratestrate correspondant à la période du Magdalénien inférieur. Cette strate n'a pas été polluée par les autres niveaux d'occupation. Dans cette couche, beaucoup d'éléments attestant d'une industrie lithique locale du Magdalénien ont été découverts ainsi que des restes alimentaires. L'os trouvé en 1985 a été attribué à l'espèce du loup à l'époque de sa découverte. Grâce aux analyses morphologiques puis ADN, cette classification s'est en définitive davantage rapprochée du chien en matière d'espèce. À ce jour, seuls trois autres chiens du Paléolithique supérieur ont été analysés en Europe avec ce double critère.
Le chien faisait partie des groupes de chasseurs-cueilleurs du Magdalénien
La conclusion de cet article est que l'animal de la grotte d'Erralla datant de 17 410 à 17 096 environ avant notre ère, est un des plus anciens de la famille de Canis lupusCanis lupus familiaris. Ce chien partage l'haplogroupe mitochondrial C des autres chiens magdaléniens déjà analysés en Europe. Les chercheurs avancent alors l'hypothèse que la domestication du loup serait éventuellement plus ancienne en Europe que les datations proposées actuellement.
Ce qui est certain, c'est que depuis des milliers d'années, les chiens ne nous déçoivent jamais, que ce soit dans la vie et en recherche !
Nos chiens domestiques ont bien une origine européenne
Article de Quentin MauguitQuentin Mauguit, publié le 20 novembre 2013
Nouveau rebondissement dans l'histoire évolutive de nos chiens. Selon de nouvelles analyses génétiques réalisées avec de l'ADN fossileADN fossile, nos compagnons à quatre pattes auraient tous un ancêtre européen qui a été domestiqué par des chasseurs-cueilleurs voici 32.100 à 18.800 ans.
Tout le monde s'accorde à ce sujet : nos chiens descendraient de loups qui ont été domestiqués. En revanche, les débats s'animent à la question de savoir où et quand cet événement a eu lieu. Pour certains, c'est en Europe ou en Sibérie. Pour l'affirmer, des paléontologistes s'appuient sur des fossiles de canidés de plus de 30.000 ans qui ont été découverts en Belgique (grotte de Goyet) et dans l'Altaï (grotte de Razboinichya).
Dans le camp opposé se trouvent les généticiensgénéticiens qui s'appuient sur les résultats de leurs sacro-saints séquençagesséquençages. Selon une étude parue en 2010, la domestication des canidés ne remonterait qu'à 15.000 ans, et elle aurait eu lieu au Moyen-Orient. Lors de sa parution, l'étude a donc invalidé l'origine européenne, sibérienne ou chinoise. Eh oui, il y a de nombreux prétendants au titre ! Il faut cependant préciser un détail : seul de l'ADN de chiens et de loups gris modernes a été utilisé pour parvenir à ce résultat.
Ce détail fait toute la différence par rapport à l'article qui vient de paraître dans la revue Science, dont Olaf Thalmann de l'université de Turku (Finlande) est le principal auteur. Son équipe a collaboré avec celle de Robert Wayne de l'université de Californie à Los Angeles (UCLA, États-Unis) pour séquencer l'ADN mitochondrialADN mitochondrial de 18 chiens et loups eurasiens et américains qui ont vécu voici 36.000 à 1.000 ans. La conclusion ne laisse aucun doute : l'une des origines précédemment évoquées est la bonne.
Plusieurs tentatives de domestication des canidés ont eu lieu
Les données génétiques récoltées ont été comparées à celles obtenues à partir de canidés sauvages ou domestiques modernes. Grâce à la reconstruction qui a été faite, il s'est avéré que tous les chiens modernes de la planète ont un ancêtre... européen. Selon la datation moléculaire, il aurait été domestiqué voici 32.100 à 18.800 ans, donc par des chasseurs-cueilleurs.
Les résultats confirment un autre point : l'Homme a domestiqué des loups à plusieurs reprises, avec plus ou moins de succès. En effet, les plus vieux chiens trouvés (en Belgique et en Sibérie) n'ont que peu d'affinités avec l'ancêtre de nos fidèles animaux de compagnie modernes. Cela suggère qu'ils ont fait l'objet d'une tentative de domestication qui a avorté. En réalité, ce résultat n'est pas nouveau, mais il vient une nouvelle fois d'être confirmé.
L'étude a déjà été critiquée pour un détail : les chercheurs n'ont pas séquencé l'ADN mitochondrial de restes fossiles découverts en Chine ou au Moyen-Orient. D'après le site Nature News, Olaf Thalmann aimerait combler cette lacune, mais il pense que cela n'altérera pas la conclusion qu'il vient de nous présenter.