Exploiter une photo vieille de plus d’un siècle pour reconstruire en 3D une fresque disparue, il fallait y penser ! C’est pourtant le défi que s'est lancée une équipe de chercheurs basés en Chine et au Japon, étudiant une œuvre façonnée il y a des siècles dans le plus grand temple bouddhiste du monde. 


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    Au centre de l'île de JavaJava, se dresse un immense complexe bouddhiste, le plus grand construit à ce jour et probablement l'un des plus anciens. À plusieurs kilomètres de la ville de Yogyakarta, Borobudur fait partie des sites historiques les plus visités d’Indonésie, accueillant plus d'un million de locaux en 2022. Et si les touristes parcourent l'ancien temple tout au long de l'année, il continue d'être longuement étudié depuis sa redécouverte, il y a plus de deux cents ans. En étudiant une photographiephotographie prise en 1890, des historienshistoriens de l'université de Pékin, en Chine, et de Ritsumeikan, au Japon, réussissaient à reconstituer un bas-relief dégradé par les siècles. Cela grâce à un processus de restructuration initié par un réseau neuronalréseau neuronal, se basant sur les données extraites depuis la photographie.

    Un réseau neuronal au service de la reconstitution historique

    Tout le challenge de la tâche se résume en un point : réussir à obtenir un rendu 3D à partir d'une photographie elle-même en 2D et en noir et blanc. L'étude pointe la difficulté de tels rendus, principalement à cause de la qualité inférieure des boîtiers utilisés au XIXe siècle, n'offrant pas toujours des vues parfaitement nettes des objets étudiés. Une première reconstruction avait été réalisée en se basant sur une estimation de la profondeur du relief, selon des paramètres monoculaires. La précision était alors estimée à 95 %, mais un manque de détails des contours et des visages était alors pointé.

    L'étude, relayée par l'Arts Center de Melbourne (ACM) le 1er novembre, souligne l'intérêt porté par les chercheurs aux « soft edgesedges », soit les contours de certaines formes saillantes. En disséquant les caractéristiques des contours de la fresque photographiée en 1890, le réseau neuronal utilisé par les scientifiques établissait un processus de reconstruction, avec un taux de précision plus élevé encore que les 95 % précédemment établis.

    Ressusciter les œuvres anciennes effacées par le temps

    Borobudur est un véritable joyau de l'Indonésie, avec ses multiples sculptures de pierre grise. Le temple est orné de 2 672 reliefs recensés, mais le temps en a altéré un bon nombre. Le site aurait été construit vers l'an 800 de notre ère et abandonné entre 1100 et 1300. Borobudur disparaît progressivement de la conscience collective, tandis que la population de Java se convertit majoritairement à l'islam après le XVe siècle. Il faut ainsi attendre 1814 pour que le gouverneur de Java, Thomas Stamford Raffles, entende des rumeurs concernant l'existence du temple et lance une expédition pour le retrouver.

    La récente reconstitution du bas-relief témoigne de la nécessité des programmes de restauration et de préservation, ouvrant de nouvelles possibilités pour recouvrer des reliques désormais disparues ou altérées. Les scientifiques indiquent dans l'étude que le processus pourrait être adapté et appliqué à d'autres sites et d'autres œuvres à travers le monde.