En Allemagne, les archéologues retrouvaient il y a cinq ans un objet rarissime : une sorte d’amulette contenant un parchemin avec des inscriptions presque indéchiffrables. Après de longues analyses, il s’avère que cet objet est le plus ancien artefact chrétien découvert au nord du Rhin à ce jour. 


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    Toutes les découvertes archéologiques sont importantes, mais celle-ci se hisse au rand des plus intrigantes de ces dernières années. Lors de fouilles menées en 2018 dans un cimetière ancien de la ville de Francfort, en Allemagne, les chercheurs découvraient un objet singulier dans une tombe. À la base du cou d'un individu enterré il y a bien des siècles, les archéologues prélevaient une sorte de pendentif en argent, sans savoir ce sur quoi ils venaient de mettre la main. Le 11 décembre, la municipalité de Francfort publiait un communiqué retraçant les cinq ans d'études autour du mystérieux artefact. Il serait l'un des plus anciens objets chrétiens retrouvés à ce jour au nord de l'Europe.

    Des inscriptions cryptiques en latin

    L'artefact est identifié comme étant une amulette d'argent d'environ 3,5 centimètres, enveloppée dans une feuille argentée. En examinant ce pendentif en apparence relativement anodin, les scientifiques découvrent un parchemin marqué de dix-huit lignes rédigées en latin, partiellement illisibles et difficilement déchiffrables à l'œilœil nu. Des analyses tomographiques permettaient d'obtenir un rendu plus précis de ces gravures. Elles sont écrites en latin, et les archéologues réalisent rapidement que l’amulette renvoie à la foi et aux croyances de l'individu retrouvé en 2018.

    « Au nom de Saint Titus [...]

    Au nom de Jésus-Christ, fils de Dieu !

    Le Seigneur de notre monde

    résiste à toutes les forces,

    Tous les revers.

    Dieu accorde le bien-être. »

    Dix-huit lignes cryptiques ornementent l’amulette retrouvée dans la tombe antique de Francfort. © LEIZA
    Dix-huit lignes cryptiques ornementent l’amulette retrouvée dans la tombe antique de Francfort. © LEIZA

    Ces quelques lignes établissent que le personnage de la tombe de Francfort était chrétien. Mais les interrogations sont actuellement de mise chez les historienshistoriens. La sépulturesépulture date du IIIe siècle, période à laquelle le christianisme commence à se diffuser autour du bassin méditerranéen. Mais retrouver un tel artefact datant de cette époque en Allemagne est une première dans l'histoire. Les spécialistes estimaient initialement l'enracinement de la religion chrétienne plus tardif au nord du continent.

    Redéfinir l’extension de l’espace chrétien durant l’Empire romain

    À partir de 313 et la promulgation de l’Édit de Milan, le christianisme devient un culte libre dans les provinces de l'Empire. Le IVe siècle et le règne de Constantin marquent un jalon historique majeur, tandis que la religion s'implante au fil des décennies. L'empereur lui-même se fait baptiser sur son lit de mort, en 337.

    La tombe chrétienne de Francfort surprend, puisqu'elle daterait de 230 à 270. Les chercheurs estiment que le christianisme commence réellement à se diffuser à partir du Ve siècle en Allemagne. Le paganisme y est alors particulièrement ancré. Découvrir une tombe aussi ancienne arborant des attributs chrétiens redéfinit la perception et la compréhension des changements religieux dans l’Europe antique. L'amulette aurait pu servir à son porteur pour le protéger de mésaventures ou lui conférer bonne fortune, ce type d'objets étant communément utilisé à ces fins dans l'Antiquité. Le Musée archéologique de Francfort est actuellement en charge de la conservation de l'artefact, après un long processus de restauration.