Situés au sud-est de la Turquie, les vestiges archéologiques de Göbekli Tepe font de nouveau parler d’eux. Une équipe de chercheurs spécialisés en archéoastronomie a tenté de décrypter les symboles observés sur plusieurs monolithes. Les significations varient, mais la structure pourrait bien cacher l’un des plus vieux calendriers astronomiques au monde.


au sommaire


    Les sociétés les plus anciennes levaient déjà les yeuxyeux au ciel pour scruter les phénomènes de la voie céleste. Bon nombre de pays recèlent des artefacts marquant les observations astronomiques, datant parfois de la Préhistoire. En Turquie, le site archéologique de Göbekli Tepe cachait pendant des millénaires un sens qui nous échappait. Une étude publiée le 24 juillet dans la revue Time and Mind tente de décrypter le symbolisme de ce lieu impressionnant composé de structures mégalithiques. Des gravures et des fresques retrouvées sur des piliers permettent aux historienshistoriens d'affirmer que les habitants de la région ont assisté, il y a plusieurs millénaires, à des événements majeurs leur ayant permis de constituer un calendrier... Peut-être le plus ancien retrouvé à ce jour.

    Quand un météore embrasait la nuit

    Vers 10 950 avant J.-C., un météoremétéore ou une petite comète aurait fondu vers la Terre, avant de s'écraser sur notre Planète. Suffisamment massif, son impact aurait provoqué de nombreux changements sur Terre, avec une masse de poussière projetée dans l'atmosphèreatmosphère qui aurait obscurci le ciel durant des siècles. Cet événement rare aurait occasionné une forte réduction des températures, entraînant de fait la mise en danger de nombreuses espècesespèces, voire l’extinction de la mégafaune préhistorique. Une thèse plausible mais controversée qui trouverait toutefois un écho dans les gravures étudiées à Göbekli Tepe.

    À gauche, le schéma représente les chambres dans lesquelles des monolithes gravés ont été retrouvés. À droite, le pilier 43 affiche des symboles ayant attiré l’œil des spécialistes. © Alistair Coombs, <em>Sweatman and al.</em>
    À gauche, le schéma représente les chambres dans lesquelles des monolithes gravés ont été retrouvés. À droite, le pilier 43 affiche des symboles ayant attiré l’œil des spécialistes. © Alistair Coombs, Sweatman and al.

    À la suite de ce court âge glaciaire, ayant duré environ 1 200 ans, l’agriculture aurait connu un essor considérable dans la région du Croissant fertileCroissant fertile. Située entre le sud de l'Anatolie et le nord de l'Égypte, cette vaste zone englobe plusieurs pays actuels et voit émerger de puissants empires et royaumes durant l'Antiquité. L'impact d'un objet massif sur Terre est un phénomène cataclysmique du DryasDryas récent (10 900 à 9 700 avant J.-C.)), et les œuvres anciennes retrouvées en Turquie pourraient donc former une sorte de calendrier astronomique.

    Le mémorial de Göbekli Tepe

    Les chercheurs se sont concentrés sur le « Pilier 43 ». Ce monolithe est gravé de sigles zodiacaux. Des études supplémentaires laissent entendre que les symboles du Pilier 43 sont alignés avec la position dans le ciel d'au moins quatre constellations, mais aussi de la position du Soleil lors des équinoxes et solstices. Les auteurs ont utilisé le logiciellogiciel Stellaris pour déterminer l'exactitude des sigles rapportés sur le Pilier 43.

    Une autre représentation interpelle : celle d'un homme sans tête, situé en bas du pilier. Cette figure cryptique pourrait correspondre à un symbole de mort. Dans l'hypothèse où Göbekli Tepe aurait été établi durant le Paléolithique, les archéologues estiment pertinent d'interpréter le Pilier 43 comme un hommage, une sorte de mémorial, dédié aux changements du Dryas récent. L'âge glaciaire aurait possiblement suscité l'extinction de la mégafaunemégafaune, mais aurait aussi participé à la disparition de plusieurs sociétés primitives affectées par les conditions rigoureuses. Concernant les constellations marquées sur les monolithesmonolithes, elles correspondent aux observations faites ultérieurement par les Grecs et les Mésopotamiens. Avec cette formidable percée, les archéologues semblent bel et bien tenir entre leurs mains l'un des premiers calendriers astronomiques conçus.