Une équipe internationale composée de chercheurs du CNRS, du CEA, de l'Université Paris Sud et de l'Indiana University a réalisé une étude sur le rôle du transport aérien sur l'évolution et la propagation de potentielles épidémies. Cette étude montre qu'il est possible de mieux comprendre cette propagation au niveau mondial par l'application de modèles mathématiques incluant la grande complexité du réseau de transport. En particulier, cette étude permet pour la première fois de caractériser quantitativement la fiabilité des prédictions de scénarios épidémiques.

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    Quelques liens du réseau des lignes aériennes reliant les aéroports nord-américains, le poids des connexions mesurant le nombre de sièges disponibles (millions/an). © LPT, CNRS - CEA.

    Quelques liens du réseau des lignes aériennes reliant les aéroports nord-américains, le poids des connexions mesurant le nombre de sièges disponibles (millions/an). © LPT, CNRS - CEA.

    À partir d'une banque de données fournie par la IATA (International Air Transport AssociationInternational Air Transport Association) composée des flux de passagers entre les différents aéroports de la planète et de données de population des zones desservies, les chercheurs de l'équipe ont développé un modèle stochastiquestochastique de propagation d'épidémiesépidémies autour du globe. Grâce à ce modèle, ils ont pu étudier le rôle des propriétés du réseau de transport aérien sur l'hétérogénéité et la prévisibilité de la propagation d'une épidémie au niveau mondial, en proposant des outils mathématiques adéquats pour les quantifier.

    En comparant le processus de propagation sur le réseau de transport aérien avec une propagation sur d'autres types de réseaux, ils ont démontré que la complexité et l'hétérogénéité du réseau de transport aérien sont responsables de la forte hétérogénéité de la propagation d'une épidémie au niveau mondial. Ils ont aussi pu démontrer que deux types d'hétérogénéités présentes dans le réseau de transport aérien ont des effets opposés : d'une part, l'hétérogénéité de taille et de nombre de connexions des aéroports conduit à l'existence de noeudsnoeuds ayant un grand nombre de connexions le long desquelles l'épidémie peut se propager, ce qui diminue la prévisibilité ; d'autre part, la forte hétérogénéité des flux de passagers implique l'existence de canaux de transmissions préférentiels, ce qui au contraire renforce la prévisibilité.

    Ceci implique d'une part qu'il est possible de caractériser les canaux préférentiels par lesquels se propage une épidémie, et d'autre part qu'on peut quantifier et comprendre l'exactitude et la précision des prédictions des modèles stochastiques communément utilisés en épidémiologie.

    Ce dernier point est en effet très important car on ne dispose évidemment jamais de toute l'information concernant les mouvements des individus et leurs interactions. Il est donc nécessaire de recourir à des méthodes probabilistes et caractériser la fiabilité des prédictions est crucial.

    Ces travaux montrent qu'il est possible de mieux comprendre la propagation d'épidémies au niveau mondial par l'application de modèles mathématiques incluant la grande complexité du réseau de transport sous-jacent. Bien sûr, afin d'obtenir des prédictions réalistes, de nombreux détails doivent être ajoutés au modèle stochastique de propagation d'épidémies, comme par exemple des effets de variation saisonnière ou de conditions différentes d'hygiène dans les différents pays. Cette étude ouvre donc la voie en montrant la possibilité d'obtenir des mesures quantitatives de la prévisibilité des processus épidémiques, afin par exemple d'obtenir des intervalles de confiance dans la prédiction d'épidémies et l'analyse de risques ou de stratégies de réaction.