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Un Airbus A340-300 équipé d'ailes expérimentales, à profil laminairelaminaire et très fines, censé permettre des économies de carburant, a effectué avec succès mardi un premier vol, entre Tarbes et Toulouse, suscitant de nombreux espoirs chez l'avionneur européen. L'appareil a décollé vers 11 h de Tarbes et s'est posé à Toulouse-Blagnac après plus de trois heures et demie de vol.
Les extrémités des ailes de l'avion avaient été remplacées à Tarbes par deux tronçons d'une dizaine de mètres assurant un écoulement d’air laminaire. Cette longueur représente environ les deux tiers de celle d'une aile d'un moyen-courrier, le type d'avion auquel cette technologie est destinée. Ces fines ailes à profil laminaire, en effet, réduisent la traînée, permettant des économies de carburant, pour peu que la vitesse ne soit pas trop élevée.
L'A340 expérimental était bardé de capteurscapteurs et de caméras pour réaliser plus de 2.000 mesures, afin d'analyser les caractéristiques de l'écoulement de l'air et le comportement de l'avion. « C'était une première mondiale », s'est-on félicité chez Airbus. De fait, l'équipage pilotait un avion au comportement qui n'avait pas pu être intégralement simulé.
Le saviez-vous ?
En soi, le profil laminaire n’est pas révolutionnaire. Il est bombé sur l'intrados (la face inférieure) et engendre moins de traînée (la résistance de l’air produite en même temps que la portance).
Sur les avions de ligne classiques, on préfère le profil « supercritique », à l’intrados plat, qui convient mieux aux vitesses subsoniques. Plus épais, il permet aussi d’installer de gros réservoirs, appréciables sur un long-courrier.
L’hypothèse testée ici est que le profil laminaire serait mieux adapté à des avions un peu moins rapides et au rayon d’action plus faible.
L'extrémité d'aile (avec, ici, un aileron abaissé) au profil laminaire, fin mais autant bombé sur le dessous (l'intrados) que sur le dessus (l'extrados). Ce montage est expérimental. Seules les extrémités des ailes ont été changées, le reste de la voilure est celle de l'A340-300 originel. © Airbus
Le profil laminaire doit être testé en conditions réelles
Selon Airbus, le projet vise à obtenir une réduction de 50 % du frottement de l'air au niveau de la voilure. « On peut ainsi gagner jusqu'à 4 % de consommation de carburant sur un avion conçu d'entrée avec une aile laminaire », a expliqué Charles Champion, directeur du bureau d'études d'Airbus, peu après l'atterrissage sur le tarmac de Blagnac.
Ce premier vol est « une démonstration [pour] voir si la technologie fonctionne en conditions réelles, sur un avion en vol en vitesse de croisière, et dans le temps par rapport aux impuretés » ainsi qu'au vieillissement des matériaux. « Pour être sûr qu'on aura cette économie d'énergie pendant toute la duréedurée de vie de l'avion », a ajouté Charles Champion.
En effet, l'écoulement laminaire naturel est connu pour être très perturbé par toutes les salissures se collant sur la surface et par les petites déformations dues aux chocs. Il est efficace... si l'aile reste toujours propre. Quelque 150 heures de test sont prévues pour cet appareil A340 expérimental jusqu'en 2018.
Les moignons d'ailes, aux extrémités, font un angle avec le fuselage (la flèche) de 20°, contre 30° pour la partie centrale, celui d'une aile classique d'Airbus. © Airbus
Blade, un projet européen pour réduire la consommation des avions
Pour Airbus, l'enjeu est de taille « parce qu'il faut rester devant ». L'idée, si les essais sont concluants, « est effectivement d'avoir un nouveau modèle d'avion qui intégrerait la voilure laminaire d'entrée pour pouvoir avoir cette économie de carburant dès la conception de l'avion », a déclaré Charles Champion. « Quatre pour cent de carburant en moins, cela paraît peu mais, pour nous, c'est énorme », a ajouté le directeur du bureau d'études selon qui « on part sur un développement » de cette nouvelle voilure pour les dix prochaines années.
Ce programme d'ailes laminaires fédère sous la dénomination Blade (Breakthrough Laminar Aircraft Demonstrator in Europe) des industriels européens (Airbus, Aerospace, Saab...) et des instituts de recherche européens. Soutenu par la Commission européenne, son budget est de 190 millions d'euros, dont 90 millions à la charge d'Airbus.
Avec AFP
Ce qu’il faut
retenir
- Les ailes des avions de ligne ont un profil dit « supercritique », adapté aux vitesses élevées.
- Un profil laminaire pourrait convenir à des avions moins rapides.
- Mais le comportement en vol reste à tester sur ce genre d'appareils, d'autant que l'efficacité de ce profil est dégradée par les salissures.