Est-ce que c’est vraiment nos gènes qui déterminent si on aime la coriandre ? En tout cas, ce qui est sûr, c’est que son goût divise pas mal. Certains trouvent ça dégoûtant, ils décrivent même un goût de savon, alors que pour d’autres personnes, la coriandre est un incontournable dans les plats !
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Retrouvez le podcast à l'origine de cette retranscription dans Science ou Fiction. © Futura
La coriandrecoriandre, ou Coriandrum sativum, est une plante aromatiquearomatique mais aussi médicinale, originaire des régions méditerranéennes.
L'histoire de la coriandre
Depuis l'Antiquité, elle est prisée non seulement pour ses vertus médicinales, mais aussi pour ses propriétés gustatives. Les populations égyptiennes, grecques et romaines utilisaient déjà la coriandre dans leur pharmacopée. Si vous ne savez pas ce qu'est une pharmacopée, ça désigne une sorte d'encyclopédie qui recense les plantes à usage thérapeutique. La coriandre jouait également déjà un rôle essentiel dans la préparation de nombreux mets.
Aujourd'hui, cette plante est largement cultivée et utilisée dans le monde entier, notamment en Asie, en Amérique du Sud et au Moyen-Orient. La coriandre peut être consommée sous diverses formes. Ses feuilles non séchées apportent une touche de fraîcheur et de parfum à de nombreux plats. Que ce soit dans des salades, des potages, des currys, ou même des tacos, elles sont un ingrédient clé dans de nombreuses traditions culinaires. Par exemple, en Thaïlande, elles parfument les célèbres soupes Tom Yam, tandis qu'au Mexique, elles sont souvent incorporées dans la sauce salsa.
Mais il n'y a pas que ses feuilles que nous pouvons consommer ! Les fruits de la coriandre, souvent appelés à tort « graines », ont également une place de choix en cuisine.
Oui ça y ressemble, mais non, ce ne sont pas des graines. Botaniquement parlant, ce que l'on récolte et utilise en cuisine, ce n'est pas une graine, mais un fruit sec. La coriandre produit des fruits de type akènesakènes, c'est-à-dire une variété de fruits secs qui ne s'ouvrent pas pour libérer des graines à maturité. On retrouve la même chose à la surface des fraisesfraises. Quoi qu'il en soit, ils sont utilisés sous forme entière ou moulue pour aromatiser le pain, les sauces, les ragoûts, ou encore les conserves de légumes.
Ces petits fruits séchés dégagent un parfum légèrement épicé et citronné qui rehausse de nombreux plats. Leur utilisation est répandue dans les mélanges d'épices comme le garam masala indien ou le ras el-hanout nord-africain. Elle se marie très bien avec des épices et des herbes comme le cumincumin, l'ailail, l'origanorigan, le persilpersil, le poivre, le romarinromarin ou encore la cibouletteciboulette. Et elle accompagne également des ingrédients comme le gingembregingembre, la noix de coconoix de coco, le thym, l'oignonoignon ou le célericéleri.
Une herbe polyvalente en cuisine, mais qui divise beaucoup
C'est clair ! Mais effectivement, malgré sa popularité, la coriandre est aussi une herbe qui divise. En effet, comme je le disais tout à l'heure, une partie de la population décrit son goût comme parfumé, frais et même citronné, tandis que d'autres y perçoivent une saveur beaucoup moins sympa, évoquant le savon ou même la saleté. Alors personnellement, je n'arrive pas vraiment à comprendre comment on peut trouver que ça a un goût de saleté, mais c'est parce que je fais partie des personnes qui apprécient la coriandre.
C'est une question sur laquelle la communauté scientifique se penche depuis plusieurs années, et il existe nombre d'études publiées sur ce sujet. D'après les scientifiques, la coriandre contient une moléculemolécule bien spécifique qui lui donne son goût si particulier. Et cette molécule... on la retrouve aussi dans le savon. Il s'agit d'un type d'aldéhydealdéhyde, une famille de composés chimiques qui se libère quand on mâchemâche ou qu'on écrase les feuilles de coriandre. C'est cette molécule-là qui fait ressentir à une partie de la population un arôme savonneux ou parfois piquant.
Le neuroscientifique Jay Gottfried explique, dans une étude citée par The Guardian, que notre cerveau classe les odeurs et les goûts en fonction de nos expériences passées. Il peut ainsi déterminer ce qui est comestible et ce qui ne l'est pas. Et c'est comme ça que beaucoup de personnes peuvent associer le goût de la coriandre au savon, et donc à quelque chose de non-comestible et désagréable.
Cela fait sens, mais... la plupart des gens ont déjà utilisé du savon, alors pourquoi certaines personnes ne sont pas affectées par ça et apprécient quand même la coriandre ?
Pour répondre à cette question, en 2012, une équipe de chercheurs de l'Université de Toronto a analysé les ressentis face à la coriandre, parmi des individus issus de différents groupes ethnoculturels. Leur étude a révélé que l'aversion pour la coriandre varie significativement selon les origines géographiques. Apparemment, selon leurs résultats, environ 21 % des individus originaires d'Asie de l'Est, 17 % des Caucasiens et 14 % des personnes d'origine africaine n'aiment pas la coriandre. À l'inverse, ce taux chute à seulement 7 % chez les populations originaires d'Asie du Sud, 4 % chez les Hispaniques, et à 3 % chez ceux du Moyen-Orient. Ça montre en effet que certains groupes sont plus enclins à ne pas apprécier cette herbe aromatique.
Un lien avec notre génétique
J'y venais justement. En gros, pour aller plus loin, une autre équipe de chercheurs de l'Université de Mountain View, en Californie, a découvert que cette perception du goût de la coriandre est effectivement fortement liée à des facteurs génétiques. Dans leurs recherches, ils ont identifié le rôle d'un groupe de gènes, en particulier le récepteur olfactif OR6A2, dans la perception de l'odeur savonneuse de la coriandre. Et ce, notamment au sein des populations d'origine européenne. Le gène OR6A2 est responsable de la sensibilité aux aldéhydes, encore eux, justement ! Ce gène contrôle les récepteurs olfactifs qui envoient des signaux à notre cerveau, qui transforme ces informations en des perceptions d'arômes et de saveurs.
Certaines personnes possèdent une surexpression de ce gène, ce qui les rend extrêmement réceptives au goût savonneux de la coriandre. D'autres, au contraire, expriment faiblement ce gène, ce qui les rend moins sensibles à cette saveur et leur permet d'apprécier la plante. C'est marrant la génétique quand même ! Genre, il y a marqué quelque part dans ton ADN que tu n'aimeras pas la coriandre, et bim, c'est plié, tu ne peux rien y faire.
C'est dingue hein ? Du coup, je vais quand même vous donner un petit conseil pour la coriandre dans les plats, si vous n'aimez pas ça, mais que vous voulez quand même rajouter une petite saveur. Pour remplacer les feuilles fraîches de coriandre, vous pouvez utiliser du persil plat. Cette herbe, plus commune dans nos assiettes, apportera quand même la fraîcheur souhaitée. Et pour les graines... euh enfin, les fruits de coriandre, vous pouvez les remplacer par du poivre cinq baies. Avec ça, vous rajoutez la petite note épicée que vous recherchez !