Le surdiagnostic des cancers du sein, lié au dépistage organisé, soulève des questions quant à l'utilité de traiter des tumeurs qui n'auraient peut-être jamais évolué vers des formes dangereuses. Cependant, des études européennes montrent que ce risque reste limité et n'annule pas les bénéfices du dépistage. Les recherches continuent pour affiner les méthodes de diagnostic et mieux distinguer les tumeurs.


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    Depuis la mise en place du dépistage organisé du cancer du sein pour les femmes âgées de 50 à 74 ans, un débat s'est intensifié autour du surdiagnostic. Ce phénomène concerne la détection et le traitement de cancers qui n'auraient pas causé de problèmes de santé si on les avait laissés évoluer naturellement. Qu'entend-on exactement par surdiagnostic, et quels sont les enjeux associés à ce phénomène ?

    Comprendre le surdiagnostic du cancer du sein

    Le surdiagnostic se définit comme la détection, par le dépistage, d'un cancer qui n'aurait pas été diagnostiqué durant la vie de la patiente en l'absence de dépistage. Dans le cas du cancer du sein, il s'agit de tumeurs localisées et bien délimitées, qui n'auraient pas forcément progressé vers des formes plus agressives sans intervention médicale.

    Évaluer précisément le surdiagnostic est complexe, car il nécessite d'estimer le nombre de cancers qui ne seraient jamais apparus cliniquement sans dépistage. Les études comparent souvent le nombre de cas diagnostiqués avant et après l'introduction du dépistage organisé. Une partie de l'augmentation observée est due à la détection plus précoce de cancers existants, tandis qu'une autre partie est attribuable au surdiagnostic.

    Selon le groupe EUROSCREEN, le surdiagnostic représente en moyenne 6,5 % des cancers diagnostiqués, soit environ 4 cas pour 1 000 femmes dépistées. En France, l'Institut de veille sanitaireInstitut de veille sanitaire (InVS) a estimé que le dépistage organisé a permis une réduction de 21 % de la mortalité par cancer du sein. Ces chiffres suggèrent que, bien que le surdiagnostic existe, il ne remet pas en question les avantages du dépistage pour la santé publique.

    Les bénéfices du dépistage organisé demeurent largement supérieurs à leurs inconvénients pour les femmes. © Rawpixel.com, Adobe Stock
    Les bénéfices du dépistage organisé demeurent largement supérieurs à leurs inconvénients pour les femmes. © Rawpixel.com, Adobe Stock

    Vers une amélioration des méthodes de diagnostic

    Actuellement, les médecins ne disposent pas de moyens fiables pour prédire l'évolution d'une tumeur mammaire détectée. Par précaution, toute lésion cancéreuse est traitée, ce qui peut entraîner des interventions chirurgicales et des traitements potentiellement évitables pour certaines patientes.

    Des efforts de recherche sont en cours pour affiner les techniques d'imagerie médicale. Il est important de développer des méthodes permettant de mieux classer les tumeurs, afin de réduire les biopsiesbiopsies et traitements potentiellement inutiles pour certaines. Des technologies comme l'imagerie par résonance magnétiqueimagerie par résonance magnétique (IRM) et l'angio-mammographiemammographie sont explorées pour améliorer la visualisation et la caractérisation des tumeurs.

    Par ailleurs, il est essentiel de distinguer les cancers susceptibles d'évoluer vers des formes agressives de ceux qui resteraient indolents. Des études biologiques visent à identifier des marqueurs permettant de prévoir le comportement des tumeurs. Une étude en cours à l'Institut Gustave Roussy cherche à déterminer les facteurs d'évolution des lésions pré-cancéreuses, afin de proposer un suivi personnalisé et éviter des traitements inutiles. Ces initiatives s'inscrivent dans une démarche plus large de médecine personnalisée, où le traitement est adapté aux caractéristiques spécifiques de la tumeur et de la patiente.