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Beaucoup de biologistes sont d'accord pour ranger les organismes en trois grandes familles très anciennes, qu'on appelle les trois domaines du vivant : les eucaryoteseucaryotes, les bactériesbactéries et les archéesarchées. Toutes les cellules du monde connues pour le moment appartiennent alors à l'une de ces grandes catégories.
Les eucaryotes, porteurs d'un vrai (eu) noyau (karyon), dont nous sommes de dignes représentants, peuvent être multicellulaires (c'est le cas des animaux, des plantes, de nombreux champignonschampignons, etc.) ou unicellulaires (c'est le cas de certains microbes, comme les amibesamibes, les ciliés, de nombreuses alguesalgues et d'autres champignons comme la levure de boulangerlevure de boulanger, etc.). Nous sommes familiers avec beaucoup de ces êtres visibles à l'œilœil nu, mais les eucaryotes ne représentent qu'une portion relativement limitée de la diversité biologique.
Les deux autres grandes boîtes de classification du vivant contiennent les organismes les plus nombreux sur terre : les bactéries et les archées. Ces unicellulaires sont généralement beaucoup plus petits que les eucaryotes, à tel point qu'on pourrait faire entrer sans effort plus de bactéries ou d'archées dans une canette de soda qu'il n'y a d'habitants aux États-Unis. En dépit de leur petite taille, ce sont probablement les organismes les plus importants pour l'évolution et le devenir du monde vivant.
Bactéries et archées : des micro-organismes aussi nombreux qu'indispensables
Leur nombre total - estimé à 5 x 1030 (5 suivi de 30 zéros !) - est sans commune mesure avec la taille des populations eucaryotes. D'ailleurs, chaque être humain abrite dix fois plus de cellules bactériennes que de cellules humaines. Collectivement, ces micro-organismesmicro-organismes pèsent aussi lourd que l'ensemble des plantes terrestres. Ils jouent un rôle majeur dans les cycles géochimiques qui affectent le climatclimat et dans les équilibres environnementaux. Leur capacité à coloniser toutes sortes de milieux de vie est impressionnante. C'est bien simple, les bactéries et les archées sont partout : sur votre peau, dans votre intestin, sous la surface de la terre, dans le pétrole, au fond des océans, dans des environnements acides ou hyperacides et dans les sources chaudessources chaudes (certaines sont en pleine forme à près de 110 °C !).
Les évolutionnistes supposent que la lignée des bactéries et celle des archées ont divergé il y a plus de deux, voire trois milliards d'années. Pendant très longtemps, elles auraient été les seules formes de vie à peupler la planète. L'idée de leur antériorité se trouve d'ailleurs dans le nom général que l'on donne à ces deux lignées anciennes de micro-organismes : on les appelle « procaryotes », ce qui, étymologiquement, signifie « êtres vivants d'avant le noyau » (de pro, « avant », et karyon, « noyau »), car on les soupçonne d'avoir évolué avant l'apparition des eucaryotes.
Or, ces êtres unicellulaires, que l'on pensait clonaux, sont en réalité traversés par un flot de gènesgènes venus de l'extérieur de leur cellule. Les bactéries et les archées pratiquent un sexe étrange, avec peu de frontières, impliquant une diversité considérable de partenaires. Deux partenaires, ce n'est vraiment pas beaucoup pour la majorité du vivant ! La réciprocité n'est pas non plus nécessaire... Ce n'est pas seulement œil pour œil ou dent pour dent, autrement dit des variants des mêmes gènes qui sont échangés ; ce n'est pas « prête-moi ta main et prends la mienne » qui régit la combinatoire génétiquegénétique. Entre les êtres unicellulaires procaryotesprocaryotes, des organes et des éléments nouveaux sont aussi transmis entre donneurs et récepteurs d'ADN voyageur, sans nécessité pour les premiers d'obtenir leur pendant. Il n'est pas toujours besoin de donner pour recevoir. Très souvent, les bactéries, les archées, et d'ailleurs également les virus, héritent unilatéralement de gènes mobilesmobiles avec des instructions générales inédites que leur lignée incorpore. Même les eucaryotes unicellulaires, les plantes et les animaux sont affectés par les balades des gènes de façon plus limitée, mais avec des conséquences évolutives souvent spectaculaires.
En un mot, l'ADNADN se déplace dans le vaste monde microbien et au-delà, et son parcours ne se limite pas à un voyage au sein des seules cellules. À suivre ces mouvements d'ADN, il y a de quoi avoir le tournis. Dans bien des cas, les partenaires donneurs et hôtes d'ADN en mouvement n'ont même pas à être semblables, car l'ADN transgresse les frontières et l'isolement génétique que devrait produire la divergence des groupes et des espècesespèces !