Des patients infectés par le VIH-1 parviennent à contrôler le virus à long terme après l'arrêt du traitement antirétroviral, suscitant l'étonnement des chercheurs. Une récente étude met en évidence le rôle crucial des anticorps neutralisants, notamment à large spectre, dans ce mécanisme énigmatique. Un essai clinique avec ces anticorps est prévu en France d'ici fin 2023, offrant de nouvelles perspectives dans la lutte contre le VIH-1.
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C'est stupéfiant ! Certains patients infectés par le VIH-1 et ayant reçu un traitement antirétroviral de manière précoce pendant de nombreuses années parviennent à contrôler le virus sur le long terme après l'arrêt du traitement. À ce jour, les mécanismes sous-jacents de ce contrôle post-traitement ne sont pas entièrement compris.
Pour la première fois, une équipe de chercheurs de l'Institut Pasteur, de l'Inserm et de l'AP-HPHP, soutenue par l'ANRS-Maladies infectieuses émergentes, a étudié et mis en évidence le rôle des anticorps neutralisants, y compris ceux à large spectrespectre, dans ce mécanisme fascinant. Les résultats clés de cette étude ont été publiés le 10 juillet 2023 dans la revue Cell Host & Microbe. À la suite de ces découvertes, un essai clinique incluant l'utilisation d'anticorps neutralisants à large spectre devrait être lancé en France d'ici fin 2023.
Quels sont les apports de cette nouvelle étude ?
Ces individus, connus sous le nom de « contrôleurs post-traitement », sont des cas rares. Il s'agit de personnes porteuses du VIH-1, ayant bénéficié d'un traitement précoce prolongé et ayant acquis la capacité de contrôler le virus sur le long terme après l'arrêt du traitement. Ces personnes ont été identifiées il y a un certain temps grâce à l'étude Visconti, la plus grande cohorte de contrôleurs post-traitement à long terme. Il a été identifié il y a quelques années que certains de ces contrôleurs post-traitement développent une réponse immunitaireréponse immunitaire efficace et robuste contre le virus, ce qui pourrait contribuer à leur contrôle du VIH-1. Aujourd'hui, cette nouvelle étude a permis d'identifier pour la première fois une famille d'anticorps neutralisants à large spectre, en particulier l'anticorps EPTC112, qui cible la protéineprotéine d'enveloppe du VIH-1, et est particulièrement actif.
Quelles sont les caractéristiques de l’anticorps EPTC112 ?
L'anticorps EPTC112 est capable de neutraliser environ un tiers des 200 variants viraux du VIH-1 testés in vitroin vitro. Plus fort encore, il est capable de provoquer l'élimination des cellules infectées en présence de cellules Natural Killer. Les Natural Killer sont des cellules immunitaires chargées d'éliminer les cellules anormales dans l'organisme. Cette étude apporte donc des informations importantes sur la manière dont les anticorps neutralisants influencent le cours de l'infection par le VIH-1 chez les patients contrôleurs post-traitement. D'autres observations suggèrent également une forme de coopération entre différentes populations d'anticorps neutralisants.
Bientôt un essai clinique ?
Ces découvertes sont enthousiasmantes ! Elles ouvrent la voie à de nouvelles pistes de traitement contre le VIH-1 et suscitent l'espoir de développer des approches thérapeutiques permettant une rémissionrémission sans traitement antirétroviral, grâce à l'action clé des anticorps neutralisants à large spectre.
C'est dans cette optique qu'un essai clinique, prévu en France avant fin 2023, intégrera l'utilisation d'anticorps neutralisants à large spectre dans le traitement. Il s'agira d'un essai clinique de phase II, mené par le consortium ANRS Rhiviera en collaboration avec l'Institut Pasteur, l'AP-HP, l'Inserm et l'Université Rockefeller de New York. Il étudiera l'effet de l'association d'un traitement antirétroviral en phase de primo-infection avec deux anticorps neutralisants du VIH-1 par rapport à un placeboplacebo.
Soixante-neuf patients seront inclus dans cet essai. Après une période de traitement antirétroviral initial, les patients recevront ensuite le traitement à base d'anticorps neutralisants ciblant deux domaines différents de la protéine d'enveloppe du virus. Après un suivi rapproché d'un an et en se basant sur des critères spécifiques, le traitement pourra être interrompu. Ce processus permettra de déterminer si cette approche thérapeutique est capable de susciter une réponse immunitaire suffisante pour contrôler l'infection après l'arrêt du traitement antirétroviral.