Des chercheurs viennent de mettre la main sur des fossiles exceptionnellement bien conservés de serpents préhistoriques. Leur analyse montre, entre autres, que les ancêtres des serpents modernes ont eu des pattes pendant une très longue période de temps.
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Le Najash rionegrina est une espèce de serpents préhistoriques aujourd'hui disparue. Un serpent terrestre pourvu de deux pattes arrière. Et la découverte de nouveaux fossiles au nord de la Patagonie (Argentine) permet aujourd'hui à des chercheurs de l'université Flinders (Australie) d'affirmer que le Najash a possédé des membres postérieurs, petits mais parfaitement bien formés, pendant les 70 premiers millions d'années de son évolution. Mais pas seulement...
« Les serpents sont réputés être sans pattes. Mais ce qui distingue vraiment les serpents, c'est leur crânecrâne très mobilemobile qui leur permet d'avaler de grandes proies », explique Alessandro Palci, chercheur à l'université Flinders. Or, parmi les fossiles retrouvés par les chercheurs, un crâne particulièrement bien conservé donne quelques indications à ce sujet.
Une évolution lente
Loin de ressembler aux ancêtres supposés des serpents, les scolécophidiens, Najash avait une grande gueule aux dents acérées et un crâne déjà pourvu de certaines des articulationsarticulations mobiles des serpents d'aujourd'hui. Cependant, il présentait aussi des caractéristiques typiques des lézards comme des pommettes.
Toutes ces nouvelles observations mènent les chercheurs à imaginer que les serpents ont évolué progressivement. Les serpents primitifs de type Najash ne correspondent pas seulement à des espèces transitoires en évolution vers une forme plus avancée. Ils présentaient déjà un schéma corporel efficace qui a persisté pendant des millions d’années. Jusqu'à se diversifier finalement pour s'adapter au mieux à différents territoires.
Un serpent à deux pattes qui relance le débat sur l'évolution
Les paléontologuespaléontologues pensent que les serpents descendent de lézards à quatre pattes qui, au cours de l'évolution, en seraient venus à pratiquer la reptation. Mais cette transformation s'est-elle opérée en milieu marin, ou sur la terre ferme ? Ces pattes servaient-elles à marcher ou à se mouvoir dans l'eau ? La découverte d'un fossile en Argentine relance le débat...
Article de Christophe OlryChristophe Olry paru le 21/04/2006
(Courtesy of AP)
Un serpent à deux pattes
Les restes fossilisés de la créature - 122 vertèbres - ont été découverts en Patagonie, au milieu de dépôts géologiques datant de 90 millions d'années. Les paléontologues indiquent dans l'édition du 20 Avril de la revue Nature qu'il s'agit d'un serpent primitif, qui présente un sacrumsacrum - un appendice osseux soutenant le bassin - et deux petites pattes arrières.
Deux petites pattes ? Il n'en fallait pas plus pour relancer le débat quant au lieu de l'évolution des lézards en serpents. Si ce lien est à présent avéré, les indices manquent encore aux paléontologues pour déterminer si cette transformation des lézards en reptiles s'est effectuée sur la terre ferme ou dans l'eau. Les premiers serpents nageaient-ils ou marchaient-ils ?
Deux versions de l'histoire évolutive
La créature mise au jour par Sebastian Apesteguia, du Musée des sciences naturelles Bernardino Rivadavia à Buenos Aires, et Hussam Zaher, du Musée de zoologie de l'université de Sao Paulo, apporte de nouveaux éléments de réponse. En effet, « Najash rionegrina » (en référence au nom hébreu Najash, désignant le serpent du jardin d'Eden privé de pattes) a été découvert dans des dépôts géologiques de nature terrestre, et ses pattes robustes indiquent qu'il était vraisemblablement un animal fouisseur, vivant dans un terrier à l'instar des taupes et des marmottes. Autant d'éléments qui plaident en faveur d'une évolution sur terre, et contredisent l'hypothèse selon laquelle les ancêtres des serpents seraient sortis de l'eau pour ensuite devenir adeptes de la reptation. Cependant, l'évolution des premiers serpents ayant pu connaître plusieurs lignées, il convient de rester prudent.
Selon les chercheurs, le Najash rionegrina disposait de deux pattes mais préférait déjà la reptation. Il se nourrissait probablement de petits mammifères.
L'évolution réserve souvent des surprises aux paléontologues. Dans les années 90, au Liban, des chercheurs avaient mis au jour les vestiges d'un autre serpent nanti de pattes minuscules. Celui-ci se trouvait dans un environnement géologique marin. On en avait alors déduit que nos reptiles descendaient de lézards marins appartenant au groupe des MosasauresMosasaures. Mais la découverte de Najash rionegrina, bien plus primitif, affirme aujourd'hui le contraire...