Hier soir, la France a annoncé suspendre temporairement l'inoculation du vaccin d'AstraZeneca sur son territoire en attendant un avis des autorités sanitaires. Un avis qui ne s'est pas fait attendre puisque, dans la foulée, l'Agence européenne des médicaments déclarait que les bénéfices du vaccin AstraZeneca l'emportaient encore sur les risques.
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Avant de juger la décision en cascade que prennent à la chaîne une grande partie des pays européens depuis plusieurs jours, dont la France hier soir, concernant le vaccin d'AstraZeneca, il faut comprendre. Lorsqu'on inocule un vaccin en population générale, sur un nombre extrêmement grand d'individus, il se peut que des effets indésirables non détectés lors des essais cliniques surviennent.
Pourquoi donc ? Tout simplement car si la fréquence de survenue de l'évènement est très faible, il faut un échantillon gigantesque de patients pour le détecter. Ensuite, lorsque de tels évènements sont détectés, il faut se poser une question essentielle : est-ce que la fréquence de survenue de ce type d'évènement est plus élevée qu'en temps normal, autrement dit, sans campagne vaccinale ? Si ce n'est pas le cas, il n'y a pas vraiment de raison de s'inquiéter, tout au plus rester vigilant. Si c'est le cas, la suspension momentanée peut être justifiée. Enfin presque. Il y a une dernière chose à faire avant : soumettre sa décision à l'épreuve des probabilités et des intervalles de confiance. Car ne l'oublions pas, l'excès de confiance tue.
Fréquence des évènements et faire le bon choix
Trente cas de thromboses ont été détectés en Europe, sur plus de cinq millions de vaccinations. Autrement dit, un évènement qu'aucun essai clinique n'aurait pu détecter, s'il s'avère qu'un tel évènement est dû au vaccin - ce qui n'est absolument pas démontré pour l'instant. En effet, la fréquence de l'évènement en question chez la population vaccinée n'est pas supérieure à la fréquence de base, autrement dit au nombre observé habituellement dans la population non exposée au vaccin. Un tel événement ne justifie donc pas une suspension. C'est d'ailleurs ce que soutenait l'Agence nationale de sécurité du médicament dans son avis du 13 mars. En revanche, en Allemagne, ce sont sept cas d'événements plus rares, des thromboses veineuses cérébrales, pour 1,7 million de personnes vaccinées, qui ont été rapportés par le ministre de la Santé allemand. En général, la même fréquence pour ce type d'évènement est observée en une année entière. Trois hypothèses s'offrent alors à nous : la fréquence de l'évènement en question est sous-évaluée en population générale, le vaccin est la cause de ces évènements ou d'autres facteurs non identifiés sont coupables.
Pour autant, si les autorités de pharmacovigilance doivent ici faire preuve d'une prudence accrue, cela ne semble pas justifier une suspension dans le contexte actuel. Depuis hier, l'ensemble des autorités sanitaires continue d'affirmer les bénéfices en faveur du vaccin en matièrematière de santé publique. En effet, hier, la Covid-19 a fait 333 morts en France. C'est là qu'entrent en scène les probabilités. Compte tenu des données disponibles, quel est le choix qui assure la probabilité d'engendrer le moins de morts possible : suspendre le vaccin ou ne pas le suspendre ?
Si l'on en croit les données, les avis d'experts et celui des autorités sanitaires, il semble que suspendre la vaccination à un moment aussi crucial de la lutte contre la pandémiepandémie c'est, ni plus ni moins, faire plus de morts au final. Que l'infection par le virusvirus soit un évènement naturel et contingent, à l'inverse du vaccin qui est fabriqué et inoculé par l'Homme, ne changera rien en matière de responsabilité. Devant ce capharnaüm, des experts de l'Organisation mondiale de la SantéOrganisation mondiale de la Santé vont se réunir pour discuter de la sécurité du vaccin d'AstraZenecaAstraZeneca, tout en affirmant que les pays devraient continuer à l'utiliser pour l'instant.