Le premier « pan-génome » humain vient d'être dévoilé. Il devient la nouvelle référence compilant plus de diversité et d'informations génétiques. C'est donc la gamme la plus complète, et la plus inclusive, des gènes de l'espèce humaine, rassemblant les génomes de 47 individus puis, à l'horizon 2024, celui de 350 en tout. Les chercheurs se disent confiants de pouvoir ainsi mieux expliquer certaines maladies génétiques.
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Des scientifiques ont dévoilé mercredi le premier « pan-génome » humain, qui recense la gamme la plus complète à ce jour des gènes de l'espèceespèce humaine, avec l'espoir qu'il aide à expliquer toute une série de maladies. L'annonce a été saluée comme « inaugurant une nouvelle ère pour le diagnostic génétique », par le généticiengénéticien David Adelson, de l'Université australienne d'Adélaïde.
Un premier génome humain, qui rassemble l'ensemble du matériel génétiquematériel génétique propre à un homme, a été séquencé en 2003. Il a servi de point de référence pour d'autres génomes humains publiés depuis. Il a permis surtout d'identifier des gènes responsables de maladies spécifiques, d'engager la recherche vers une médecine plus personnalisée et d'éclairer le mécanisme de l'évolution humaine. Mais 70 % des séquences de ce premier génome provenaient d'un seul individu -- qui avait répondu à une petite annonce dans un journal de la ville américaine de Buffalo, en 1997 --, le reste provenant de vingt autres personnes. Ce qui a limité son utilisation pour des populations d'autres origines ethniques.
Le premier pan-génome a été présenté dans une série d'articles scientifiques de la revue Nature par un groupe de scientifiques rassemblés dans le consortium du pan-génome humain de référence (HPRC). Il compile les génomes de 47 individus d'origines diverses, et devrait rassembler celui de 350 individus d'ici la mi-2024.
Sur ces 47 personnes, qui sont anonymes, plus de la moitié vient d'Afrique, un tiers des Amériques, l'Asie comptant six individus et l'Europe un seul, un juif ashkénaze. L'Océanie n'est pas représentée. Le génome est le plan génétique de tout organisme. Il contient tous les éléments d'ADN incorporant les instructions pour lui permettre de vivre et se développer.
Moins de 2 % de différences entre deux individus
Le génome de deux individus est identique à plus de 99 %, mais les différences restantes peuvent faciliter l'apparition de certaines maladies chez un individu plutôt que chez un autre. Le pan-génome de référence pourrait ainsi aider à éclairer ces différences dans des échantillons génétiques, a expliqué Benedict Paten, chercheur à l'Université de Californie et coauteur de l'étude.
« Cela va améliorer les tests génétiques et fournir en même temps une meilleure compréhension de la contribution de tous les genres de variations génétiques sur la santé et les maladies », a-tt-il dit lors d'une conférence de presse. Un autre coauteur de l'étude, Erich Jarvis, de l'Université Rockefeller aux États-Unis, a fourni en exemple les groupes de gènes, connus sous le nom de complexe majeur d'histocompatibilitécomplexe majeur d'histocompatibilité (CMH), qui sont impliqués dans le fonctionnement du système immunitaire.
« Il était jusqu'ici impossible d'étudier la diversité des MHC », tant elle est grande entre individus, a indiqué le chercheur. Des progrès dans ce domaine auraient des conséquences bénéfiques en matièrematière de transplantationtransplantation d'organes, afin d'éviter des rejets. Pour David Adelson, le généticien australien, cette première édition du pan-génome a déjà accru la précision de détection de changements génétiques d'environ 34 %. Le projet « bénéficiera aux gens de toutes origines, à la différence de l'actuel génome de référence qui ne reflète pas la diversité de l'humanité », a-t-il expliqué à l'AFP.
Le pan-génome représente un « jalon dans la génétique humaine », mais aussi un défi, ont rappelé deux experts américains cités dans Nature, Arya Massarat et Melissa Gymrek. Au-delà de l'inclusion de séquences provenant de personnes appartenant à des groupes sous-représentés, l'adoption de ce nouveau référentiel demandera un entraînement des scientifiques. Quoi qu'il en soit, « cela permettra de faciliter la découverte de variantes génétiques qui influent sur les traits physiquesphysiques et physiologiques et -- peut-on espérer -- de mener ensuite à des avancées sanitaires pour de nombreuses personnes », ont-ils estimé.
Il y a 20 ans, l'Homme séquençait son génome pour la première fois
Il y a 20 ans, l'être humain découvrait pour la première fois la richesse et la complexité de son patrimoine génétique. Une entreprise longue qui a monopolisé des centaines de chercheurs pendant 15 ans, mais qui a changé la biologie et la médecine.
Article de Julie KernJulie Kern, publié le 23 février 2021
Le 15 février 2001, les toutes premières bribes du génome humain sont dévoilées dans le célèbre journal Nature. Cette publication changera à jamais l'histoire de la biologie et de la médecine. Pour la première fois, l'humanité peut poser un regard sur sa substantifique moelle, son ADN et ses gènes. Bien qu'imparfait, ce premier séquençageséquençage du génome humain a nécessité le travail de plusieurs centaines de chercheurs à travers le monde entier, tous réunis dans le même consortium : The Human Genome Project.
Le vingtième anniversaire de la parution de l'article dans Nature est l'occasion de revenir sur cette incroyable aventure scientifique, qui a commencé à la fin des années 1970. Plusieurs chercheurs mettent à l'épreuve leur technique de séquençage sur des organismes plus simples, avant d'oser s'attaquer aux 23 paires de chromosomeschromosomes du génome humain.
The Human Genome Project
Tout commence au milieu des années 1980, trois scientifiques ont la même intuition. Sans se concerter, Renato Dulbecco, prix Nobel en 1975 pour la découverte des oncogènesoncogènes, Robert Sinsheimer, de l'Université de Californie à Santa Cruz et Charles DeLisi plaident pour combler un manque important : le génome humain reste un abîme insondable. À l'époque, le séquençage génétique n'en est qu'à ses débuts. Les scientifiques se sont frottés au génome du phagephage X174 et ses 5.375 nucléotidesnucléotides en 1977, à celui du SV40 en 1978 qui possède 5.224 nucléotides. Au début des années 1980, les scientifiques voient plus grand en séquençant des génomes plus longs, notamment celui du phage λ en 1982 et ses 48.502 nucléotides. Du côté de l'être humain, l'ADN mitochondrialADN mitochondrial, et ses 16.569 nucléotides, est le premier à passer à la moulinette du séquençage. À l'issue de ce dernier 16 gènes sont identifiés.
Ces premiers travaux sont le terreau fertile pour un projet bien plus ambitieux qui prend forme en 1985. Créer une carte génétique exhaustive du génome humain. Le Human Genome Project naît en 1988 et, avec lui, la Human Genome Organisation (Hugo), chargé de coordonner les efforts des scientifiques répartis aux quatre coins du monde. Le projet se donne 15 ans pour étudier le génome humain, mais aussi celui d'autres organismes modèlesorganismes modèles importants en biologie et en médecine. C'est le National Institute of Health, et son premier directeur, Francis CrickFrancis Crick, co-découvreur de la structure en double hélice de l'ADN, qui pilotera le projet.
En 1995, les scientifiques du Human Genome Project se réunissent aux Bermudes et prennent alors une décision qui va tout changer. Lorsque le séquençage sera achevé, il devrait être accessible à tous et gratuitement. Chaque séquence décryptée devra être partagée dans une base de donnéesbase de données InternetInternet, formant ainsi un trésor immatériel, le patrimoine génétique de l'humanité. C'est ainsi que trois ans avant l'échéance fixée, les premières séquences brutes paraissent dans la revue Nature en 2001. Que racontent-elles sur l'abîme insondable qu'était le génome humain à cette époque ?
Le brouillon du génome humain
La première cartographie grossière du génome humain est en réalité composée du patrimoine génétique de plusieurs donneurs anonymes. Chaque donneur a donné son consentement avant que les scientifiques ne prélèvent entre cinq et dix échantillons d'ADN.
Pour mettre en forme cette carte génétique, il a d'abord fallu couper l'ADN en mille morceaux. Les fragments d'ADN, qui faisaient entre 100 et 200 kilopaires de bases en moyenne, ont été insérés dans des chromosomes bactériens artificiels (BAC), constituant ainsi une vaste librairie. Un peu comme si on séparait et stockait chaque feuille d'un livre séparément. Pour reconstituer l'ouvrage, les BAC ont été séquencés individuellement, comme si on lisait chaque page du livre, avant de les assembler à nouveau pour reconstituer l'histoire entière. La carte génétique ainsi obtenue comprend 4,26 gigabases, soit 4,26.109 lettres A,T,C ou G qui se suivent, on n'avait jamais décrypté un génome si long !
Bien que ce ne soit là qu'un brouillon du génome humain, il a permis d'identifier des points clés de notre patrimoine génétique :
- il contient entre 30.000 et 40.000 gènes, un chiffre toujours sujet à débat aujourd'hui mais qui semble plus proche des 20.000 ;
- à peu près la moitié du génome humain est composé de gènes dérivés d'éléments transposables ;
- certains de nos gènes sont hérités d'un transfert horizontal de gène avec des bactériesbactéries.
Deux ans de travail ont été nécessaires pour peaufiner le génome humain, les séquences finales ont été finalement publiées dans Nature en octobre 2004. Depuis, les connaissances sur nos gènes, leurs implications dans des maladies et leur fonctionnement ne cessent de s'étoffer. Actuellement, c'est la cartographie réalisée par le Genome Reference Consoritum en 2019, basée sur le travail du Human Genome Project, qui est considérée comme la référence.
Aujourd'hui, l'intelligence artificielleintelligence artificielle repousse notre utilisation de la génétique humaine puisque des ordinateursordinateurs sont capables de créer de toutes pièces des génomes humains qui ne correspondent au patrimoine génétique d'aucun être humain vivant.