Parfois, nous nous mettons à croire à des choses totalement aberrantes. Mais pourquoi ? Plusieurs chercheurs de l’École Normale Supérieure, de l’hôpital Sainte-Anne, de l’Inserm et de l’Institut du Cerveau se sont penchés sur la question. Un récepteur synaptique spécifique serait impliqué. Lorsque celui-ci est bloqué, nous prenons des décisions aberrantes.
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Comment les gens peuvent-ils embrasser les théories complotistes ? En pleine pandémie de coronavirus, comment imaginer que certains ont pu croire que le virus n'existait pas et que nous étions tous manipulés par les médias ? Comment est-il possible que des personnes pensent vraiment que les vaccins à ARNm vont modifier notre génome ?
Lorsque notre environnement habituel devient incertain, nous sommes plus enclins à croire des choses absurdes. Ce type de comportement est observé dans les stades précoces de psychose juste avant l'émergenceémergence de pensées délirantes. Une équipe s'est intéressée au rôle d'un récepteur synaptique spécifique appelé NMDA (N-méthyl-D-aspartateaspartate) dans la survenue des croyances aberrantes. La fonction des récepteurs synaptiques est de réguler la communication entre neuronesneurones, au niveau des synapses. Ce récepteur a été choisi car lorsque des autoanticorps se dirigent contre lui lors de réactions auto-immunes, des symptômessymptômes psychotiques surviennent.
Que se passe-t-il lorsque le récepteur NMDA est bloqué ?
Les résultats ont été publiés dans la prestigieuse revue Nature. La kétamine a la propriété de venir bloquer le récepteur NMDA, de façon temporaire. Les auteurs l'ont utilisée pour observer les effets d'un récepteur NMDA non fonctionnel sur le raisonnement. Un groupe de volontaires sains a reçu une faible dose de kétamine par voie intraveineuse ou bien un placéboplacébo.
Les individus ont ensuite été soumis à des informations visuelles incertaines juste avant de prendre des décisions. Les résultats sont formels. « Un blocage du récepteur NMDA déstabilise la prise de décision, en favorisant les informations qui confirment nos opinions au détriment des informations qui les invalident. C'est ce biais de raisonnement qui produit des décisions prématurées et souvent erronées », explique l'un des auteurs.
Un parallèle avec les réseaux sociaux
C'est exactement comme cela que fonctionnent les réseaux sociaux. Les algorithmes nous proposent du contenu en fonction de nos opinions. C'est-à-dire que les informations qui nous sont proposées vont toujours dans le sens de nos opinions, que la machine a appris à décoder. Jamais l'algorithme ne nous proposera de contenus pouvant invalider nos croyances, qu'elles soient aberrantes ou non.
Ces travaux représentent une source d'espoir dans la prise en charge des psychoses. Les traitements disponibles actuellement ont la capacité de réduire les symptômes psychotiques comme les idées délirantes mais pas leurs causes. Le récepteur NMDA pourrait représenter une cible pharmacologique.