Dans le débat scientifique, le faisceau de preuves considérant les masques efficaces est robuste. Cela n'est plus à discuter. Pour autant, il faut rappeler qu'ils ne sont pas infaillibles et qu'ils ne se substituent pas aux autres mesures barrières. 


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    Le goût de la certitude. La tranquillité de l'esprit. C'est probablement ce que ressentent les personnes qui adhèrent aux discours anti-masques. Posséder des réponses claires, précises, sans une onceonce d'incertitude, c'est rassurant. En tout cas, c'est plus apaisant que la complexité. Pas de chance, la réalité est complexe. L'efficacité des masques fait désormais consensus dans la communauté scientifique. Ce qu'il faut comprendre, c'est que le discours scientifique n'est pas un discours manichéen qui affirmerait l'antagonisme total du discours anti-masque. Bien au contraire, le discours scientifique est nuancé et se base sur un faisceau de preuves interdisciplinaires. Ce faisceau de preuves étant convaincant, il aboutit naturellement à la prescription de mesures sanitaires adéquates. Un récent article paru dans Nature nous aide à faire le point sur la question épineuse des masques.

    Au départ, c'est l'incertitude, même pour les scientifiques : on ne sait pas grand-chose sur l'efficacité du port du masque. © nuiiko, Adobe Stock
    Au départ, c'est l'incertitude, même pour les scientifiques : on ne sait pas grand-chose sur l'efficacité du port du masque. © nuiiko, Adobe Stock

    Avant la connaissance, le doute

    Au départ, c'est l'incertitude qui plane. Contrairement à ce que se représente l'imaginaire collectif, les scientifiques ne sont pas un puits de connaissance immédiat. Les chercheurs et les chercheuses, ce sont simplement des hommes et des femmes qui appliquent une méthode. Une méthode créée par l'être humain afin de sonder le réel au mieux. Avant d'appliquer cette méthode, ils n'en savent pas plus que vous et moi. 

    Dès lors, c'est le flou. Que faut-il faire ? Le masque a-t-il une utilité ? Lorsqu'il faut prendre une décision politique, tout est toujours une question de compromis, d'économies de ressources et de balance bénéfices-risques. Produire des masques, cela coûte de l'argentargent. S'ils s'avèrent inutiles, du temps et des moyens humains auront été dépensés pour rien. À l'inverse, s'ils sont utiles, ils pourront sauver des vies. 

    Très vite, des tentatives de réponses sont esquissées grâce aux connaissances antérieures concernant d'autres virus respiratoires. On considère alors des éléments a priori de l'hypothèse à tester - les masques sont efficaces pour limiter la propagation de la Covid-19 - pour juger de la probabilité que celle-ci soit vraisemblable. Malheureusement, les scientifiques ont beau connaître le virus de la grippe depuis longtemps, pour ne prendre que celui-ci comme exemple, ils ne sont toujours pas entièrement d'accord sur des questions d'apparence simple comme « Quelle est sa principale forme de transmission ? » ou « Sur quels critères définit-on un aérosolaérosol infectieux ? ».

    Après le doute, la méthode 

    Quoi qu'il arrive, il fallait donc mener de nouvelles expériences, nouveau virus oblige. Les études conduites jusqu'à présent démontrent que le port du masque est utile pour sauver des vies. Par exemple, il réduit les chances de transmettre le SARS-CoV-2 en évitant la propagation de gouttelettes et la formation d'aérosols infectieux. De même, certains scientifiques suggèrent qu'il pourrait réduire la gravité de l'infection pour le porteur du masque

    Mais le doute n'a pas été levé tout de suite. En effet, l'utilité du port du masque apporte son lot de questions et d'hypothèses à tester. De quels types de masques parle-t-on ? Dans quel environnement ? Son port va-t-il être suffisamment respecté et va-t-il être porté correctement en toutes circonstances ? C'est toutes ces questions qui ont heurté de plein fouet le conseil scientifique au début de cette pandémie.

    Grâce à des études épidémiologiques, des expériences chez l'animal, d'autres faisant appel aux technologies balistiques et à des connaissances en physiquephysique de la dynamique des particules, nous savons que le port du masque chirurgical ou en tissu est utile en lieu clos. Plus son adhérence à la peau est optimale, plus son utilité est maximisée. 

    L'utilité du port du masque est optimisée lorsque l'aération d'une pièce est adéquate, que la distanciation sociale est respectée et que le lavage des mains est systématique. © Sketchplatanor
    L'utilité du port du masque est optimisée lorsque l'aération d'une pièce est adéquate, que la distanciation sociale est respectée et que le lavage des mains est systématique. © Sketchplatanor

    Le port du masque pour lutter contre la pandémie

    Le port du masque ne protège pas à 100 % d'une infection à la Covid-19. Son utilité est d'autant plus optimisée lorsque l'aération d'une pièce close est adéquate, que la distanciation sociale continue d'être respectée et que le lavage de mains est systématique. Bien sûr, il est plus rassurant de croire que le SARS-CoV-2 est un mythe. Cela réduit la probabilité de contracter la Covid-19 à 0. Mais le réel n'a que faire de nos désirs à son sujet. Le meilleur moyen de nous prémunir contre son adversité impitoyable, c'est de l'étudier minutieusement. 

    De fait, il fallait également étudier le comportement humain. Sur ce point, des preuves suggèrent que le port d'un masque facial pourrait conduire le porteur et son entourage à mieux adhérer à d'autres mesures, telles que la distance sociale. Peut-être en leur rappelant qu'ils partagent une responsabilité commune ? Mais cela exige qu'un nombre suffisant de personnes les portent lorsque cela est nécessaire. Nous le voyons, la question du port du masque ne se cantonne pas à des réponses biologiques ou physiques. Elle comporte aussi son lot de questions d'ordre psychologique étant donné que ce sont des êtres humains qui l'utilisent. 

    Finalement, une chose est à retenir : la réalité est complexe mais si ce n'est que cela, ce n'est pas vraiment grave. Ensemble, nous pouvons, non pas la dompter, mais la cerner. En revanche, cela suppose un travail beaucoup plus ardu. Définir une réalité commune tous ensemble. C'est ce clivageclivage de réalité, sur ce qu'est le réel et au final sur la définition d'une vérité scientifique qui semble à l'origine des controverses infécondes de ces derniers mois. C'est l'objectif qu'il faut poursuivre, au sein de la communauté scientifique et de la société civile, si nous voulons lutter contre la pandémie et à plus long terme, contre le changement climatique