Les médecins généralistes sont-ils insuffisamment formés sur la perte de poids dans le cadre d’une obésité ? Une analyse qualitative de consultations révèle que les conseils donnés aux patients pour maigrir sont le plus souvent vagues, superficiels, et non étayés par des preuves scientifiques.
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L'obésité est une maladie chronique et récidivante, définie par un indice de masse corporelle supérieur ou égal à 30 kgkg/m². Les personnes obèses trouvent bien souvent des difficultés à perdre du poids et tout conseil de la part du corps médical se doit d'être pertinent pour atteindre cet objectif.
Au niveau international, la politique de santé publique incite les médecins généralistes à saisir toutes les occasions pour parler de poids aux personnes obèses. Bien que des preuves montrent que même des conseils très brefs sont associés à une perte de poids, on sait peu de choses sur le contenu des consultations de médecins généralistes, secret médical oblige.
159 consultations analysées et cartographiées
Avec l'accord préalable des médecins et des patients, 159 enregistrements audio de consultations de l'essai BWeL (Brief Interventions for Weight Loss) ont été réalisés afin d'analyser les conseils donnés à des personnes souffrant d’obésité. Les chercheurs de l'étude, publiée dans la revue Family Practice, ont analysé le type des conseils donnés par les médecins généralistes lors d'« interventions brèves », et les contenus similaires ont été regroupés en quatre groupes descriptifs :
- les conseils en matièrematière de régime alimentaire et d'activité physiquephysique ;
- les « conseils de mise en œuvre » donnés pour soutenir les changements, par exemple l'utilisation d'assiettes plus petites ;
- l'aide à l'orientation, soit vers un soutien clinique supplémentaire, soit vers d'autres ressources ;
- le stylestyle de délivrance des conseils, montrant que les généralistes donnaient rarement des conseils personnalisés, ou les raisons de leurs conseils.
Des conseils souvent abstraits et peu personnalisés
L'enquête montre que les conseils de perte de poids donnés par les médecins aux patients constituaient rarement des méthodes efficaces et se résumaient le plus souvent à une approche générique du type « manger moins » et « bouger plus », alors qu'ils devraient être adaptés à l'expérience de chaque patient (par exemple, les stratégies déjà essayées pour perdre du poids).
De fait, les conseils étaient généraux ou abstraits (sans donner de raison, de justification ou de preuve scientifique) dans 97 % des consultations analysées. Par exemple, un médecin suggère à son patient de suivre un régime riche en fibres, mais n'explique pas comment cela peut favoriser la perte de poids : « C'est plus facile quand le temps s'améliore, mais regardez bien ce que vous mangez, assurez-vous d'avoir un régime pauvre en graisses, en sucre et riche en fibres. Un peu de tout, beaucoup d'exercice et voyez comment vous allez. » En outre, lorsque les médecins proposaient des informations spécifiques, celles-ci n'étaient souvent pas étayées scientifiquement. Par exemple, un mythe courant estime qu'un « bon état d’esprit » est suffisant pour perdre du poids.
« Les médecins généralistes manquent de connaissances et de confiance en matière de conseils pour la perte de poids », résument les auteurs de l'étude. Les médecins ont besoin de directives claires sur la manière la plus efficace d'aborder la perte de poids avec leurs patients souffrant d'obésité.
L'un des points forts de l'étude est l'analyse des contenus, qui a permis de catégoriser et de regrouper clairement les types de conseils. Toutefois, les données ont été collectées dans le cadre d'un essai au cours duquel les cliniciens ont été formés à la mise en œuvre d'interventions brèves pour la perte de poids, leurs conseils pouvant donc différer d'une population non formée. De manière plus générale, les médecins généralistes souffrent souvent du manque de temps à accorder à leurs patients, ce qui peut se ressentir dans les conseils donnés.