Le nouveau rapport de l'Agence nationale de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) rédigé en partenariat avec l'Institut national de la recherche agronomique (Inra) s'est concentré sur l'évolution de l'utilisation des additifs alimentaires dans les produits transformés en France. Que nous dit ce rapport ? Détails.
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Les débats sur les additifs alimentaires font rage en ces temps de suspicion nutritionnelle où une partie non négligeable de la population pense que la méchante industrie agroalimentaire veut nous empoisonner - de concert avec l'industrie pharmaceutique, pour les plus complotistes. En réalité, le sujet est bien plus complexe qu'on ne le croit. Si certains additifs alimentaires sont suspectés d'aggraver tel ou tel problème de santé, ou encore d'impacter négativement notre microbiote, une grande majorité semble digne de confiance. Dans le cadre du projet Oqali (Observatoire de la qualité de l'alimentation), l'Anses et l'Inra travaillent main dans la main et nous éclairent sur l'évolution de l'utilisation des additifs alimentaires en France sur la période 2008-2012 (premier suivi), 2012-2018 (second suivi), avec un nouveau rapport.
Une baisse relative mais significative
Les experts ont analysé plus de 20.000 produits sur une duréedurée de 10 ans. Ils concluent qu'on est passé de 13,7 % à 18,7 % de produits sans additifs et que parmi ceux présentant des additifs dits « d'intérêts » (entendez par là controversés) dans leur liste d'ingrédients au premier suivi, ils sont 4.088 à ne plus en contenir. Pour Thibault Fiolet, ancien expert en évaluation des risques à l'autorité européenne de sécurité des alimentsautorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) pour les novel foodnovel food, « cette diminution de l'utilisation des additifs est en lien avec la demande du consommateur ». En France, la majorité (53 %) des produits transformés contiennent moins de trois additifs (dont 22 % sans additifs).
Les additifs les plus utilisés ne sont pas controversés
Si cette baisse semble réjouir le consommateur, nous avons demandé à Thibault Fiolet si les additifs les plus utilisés que sont l'acide citriqueacide citrique, les amidons modifiés, les lécithines et les mono et diglycérides d'acide gras pouvaient poser des problèmes. Ce à quoi il nous répond que « l'acide citrique ou la lécithine sont retrouvés naturellement dans certains aliments tels que le citron ou le pamplemoussepamplemousse pour l'acide citrique et dans le jaune d'œuf ou l'huile de sojasoja pour les lécithines. Ces derniers ne possèdent pas de dose journalière admissible. L'EFSA dans ses derniers avis scientifiques considère qu'il n'y a pas de risque pour la population en général ».
4 % des produits alimentaires contiennent au moins 10 additifs
Ce sont les viennoiseries et desserts surgelés (16 %), produits traiteurs frais (15 %) ainsi que les glaces et sorbets (12 %) qui obtiennent la palme d'or des produits avec le plus d'additifs. Et comme on entend assez souvent parler d'effet cocktail à tout-va, on a posé la question à Thibault. Il nous rappelle ce qu'est l'effet cocktaileffet cocktail, c'est-à-dire « au cours d'un repas ou d'une journée, être exposé à plusieurs substances". Concernant les additifs, sa réponse est on ne peut plus claire : « Actuellement l'évaluation des risques alimentaire se base sur des évaluations individuelles. Seules les substances activessubstances actives ayant le même mécanisme d'action toxique et issues d'une même classe chimique, font l'objet d'une évaluation du risque cumulé. L'exposition aux mélanges de différentes substances est d'un enjeu croissant. Cela peut être dû en partie au fait que différents produits chimiques ont le même effet ou un effet antagoniste, ce qui renforce ou atténue l'effet de l'autre substance, et en partie au fait qu'un produit chimique peut influer sur la manière dont un autre produit est absorbé, répandu ou éliminé dans le corps. Il peut en résulter des effets négatifs ajoutés pour que 1 + 1 = 2, mais il peut également être amplifié encore plus pour que 1 + 1 = 3 ou plus. Les effets cocktails de certains contaminants (dioxinesdioxines, phtalatesphtalates, triazoles...) ont été étudiés mais peu de recherche ont été entreprises sur les additifs."
Cessons d'avoir (très) peur
Voilà ce que je vous propose pour conclure cet article. Il ne faut pas y voir un éloge de la crédulité ou encore une invitation à ne plus se poser de questions. Bien au contraire. Il s'agit de remettre de la raison et des faits dans notre perception des risques. Dans une petite étude qu'il a conduit et publié sur son blogblog, Thibault Fiolet montre à quel point la perception du risque concernant les additifs est disproportionnée par rapport au risque réel. Continuons de nous interroger de façon méthodique mais arrêtons d'instaurer la panique générale sur des sujets dont nous ne savons rien. Par ailleurs, le traitement de ces sujets par les médias est l'un des facteurs qui contribuent à cette cacophonie. Certaines entreprises privées commercialisant des produits biologiques ne sont également pas innocentes. Enfin, rappelons qu'indépendamment de la présence d'additifs, la consommation de produits transformés et ultra-transformés doit être l'exception et non la règle si l'on souhaite prendre soin de sa santé.
Ce qu’il faut
retenir
- Un nouveau rapport de l'Anses nous éclaire sur l'évolution de l'utilisation des additifs alimentaires en France dans les produits transformés.
- Le rapport note un passage de 13,7 % à 18,7 % de produits sans additifs.
- Même si consommer des aliments transformés (contenant donc potentiellement des additifs) trop régulièrement peut impacter négativement notre santé, en consommer avec parcimonie semble peu, voire non risqué.