Le microbiote intestinal est un écosystème qui ne cesse d'étonner et dont le rôle s'avère déterminant pour notre santé. Complexe, abritant des milliers d'espèces et de souches microbiennes, il fait l'objet de recherches poussées depuis plusieurs années. De nombreux travaux scientifiques ont souligné qu’il existe un lien entre la diversité des souches de bactéries qui y sont présentes et certains paramètres de santé, notamment cardiovasculaire et métabolique.
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Le bon fonctionnement de notre microbiote intestinal a un impact sur notre santé générale, physique et psychologique. Comprendre comment l'architecture du microbiote et la fonction des bactéries qui l'habitent influent sur l'organisme est devenu un axe de recherche essentiel ces dernières années. Dans ce contexte, des chercheurs et chercheuses de l'Inserm et d'Université de Paris, en collaboration avec des équipes d'Inrae, de l'Imperial College à Londres et de l'université de Copenhague au Danemark ont montré qu'un métabolite issu des bactéries intestinales, l'hippurate, est associé à la diversité du microbiote. Il jouerait un rôle important pour notre santé cardiovasculaire et métabolique, notamment en participant à la régulation de la glycémie. Ces travaux sont parus dans la revue Gut.
L'équipe dirigée par le chercheur Inserm Dominique Gauguier s'est intéressée à l'hippurate, un métabolite produit par les bactéries intestinales que l'on retrouve dans les urines. Les scientifiques ont combiné deux méthodes, le séquençage ADNADN (analyse du profil génétiqueprofil génétique) des bactéries du microbiote intestinal et le profilage métabolomique urinaire (analyse de petits métabolites présents dans les urines), chez 271 personnes d'une cohortecohorte danoise -- l'étude MetaHIT.
Le saviez-vous ?
Une flore d'une richesse inédite
L'étude MétaHIT, lancée en 2008 et coordonnée par l'Inra, a eu pour objectif d'identifier l’ensemble des génomes microbiens intestinaux (métagénome) par séquençage haut débit. Elle a aussi permis de dessiner une ébauche des interactions reliant métagénome et santé. Cette étude, première du genre, s'est fondée sur l'analyse d'échantillons de selles recueillis auprès de 124 personnes. Elle a identifié ainsi un total de 3,3 millions de gènes différents, appartenant à plus de 1.000 espèces différentes, dont une large majorité est d'origine bactérienne.
Au plan individuel, elle a aussi montré que chaque individu portait en moyenne 540.000 gènes microbiens, soit environ 160 espèces, réparties en sept phyla (groupes de familles) différents. Enfin, MetaHIT a été la première étude à démontrer l'extrême richesse de la flore intestinale, en identifiant des centaines d'espèces bactériennes inconnues jusque-là.
À partir des données obtenues, les scientifiques montrent que des niveaux élevés d'hippurate dans les urines sont associés à une plus grande diversité de la flore intestinaleflore intestinale et une augmentation de la richesse en gènesgènes du microbiote, qui sont deux paramètres protecteurs du risque cardiométabolique (risque de développer des maladies cardiovasculairesmaladies cardiovasculaires ou du diabètediabète).
Le rôle potentiel de l'hippurate
Les chercheurs disposaient par ailleurs d'informations relatives aux habitudes alimentaires des participants, ainsi qu'à leur indice de masse corporelleindice de masse corporelle (IMC). Ils ont constaté que chez les personnes obèses ayant une alimentation riche en graisses saturées, et un risque de développer des problèmes cardiovasculaires et métaboliques, des niveaux élevés d'hippurate avaient des effets bénéfiques sur le poids et sur la santé métabolique.
Ces résultats ont été complétés par une étude de validation chez des souris obèses, nourries avec un régime gras. Dans ces modèles animaux, l'administration d'hippurate améliorait l'équilibre glycémique et stimulait la sécrétionsécrétion d'insulineinsuline. « Ces travaux confirment l'importance de l'architecture et de la fonction de la flore intestinale en santé humaine, en démontrant le rôle bénéfique d'un métabolite produit par des bactéries intestinales, comme nous l'avions déjà démontré précédemment avec un autre métabolite, le cresol », souligne Dominique Gauguier. L'intérêt de ces résultats est à la fois diagnostique, l'hippurate pouvant être considéré comme un biomarqueur de la diversité du microbiote, mais aussi thérapeutique.
En effet, on pourrait par exemple envisager de modifier le microbiote avec des systèmes probiotiquesprobiotiques produisant en plus grande quantité les bactéries intestinales qui synthétisent les précurseurs de l'hippurate. Cela permettrait ensuite d'augmenter les niveaux d'hippurate avec des effets protecteurs sur le risque cardiométabolique. Pour les chercheurs, la prochaine étape serait de poursuivre ces travaux en étudiant les mécanismes cellulaires permettant d'expliquer comment l'hippurate favorise la sécrétion de l'insuline et la régulation de la glycémie.