Déjà responsable de plusieurs dizaines de morts, une nouvelle maladie déclarée en Chine serait due à l’émergence d’un nouveau virus. Avec l’arrivée du printemps, l’épidémie commencée il y a quelques années devrait repartir de plus belle.
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Entre mars et juillet 2009, une nouvelle maladie infectieuse s'était déclarée dans les zones rurales des provinces de Chine centrale, causant la mort de 30 % des personnes infectées. Resté depuis sans cause connue, on sait aujourd'hui, grâce aux travaux des chercheurs de l'Université du Texas et du Centre chinois de contrôle et de préventionprévention des maladies, que le « syndrome de fièvre sévère avec thrombocytopéniethrombocytopénie » (SFTS) est en fait dû à un virus de la famille des Bunyaviridae.
Fièvre supérieure à 38°C, thrombocytopénie (diminution du taux de plaquettes sanguinesplaquettes sanguines), souvent associée à des symptômes gastrogastro-intestinaux et une leucocytopénieleucocytopénie (diminution du taux de globules blancs)... les symptômes ressemblaient étrangement à ceux causés par l'anaplasmose, une infection de la bactérie Anaplasma phagocytophilum, transmise par les tiques. Pourtant, en cherchant dans le sang des malades la présence d''ADNADN bactérien ou d'anticorpsanticorps dirigés contre la bactériebactérie, les médecins n'en avaient trouvé aucune trace !
Des cellules infectées par un virus
Ils ont donc cherché à identifier la cause de cette nouvelle maladie, grâce à un échantillon de sang prélevé sur un malade âgé de 42 ans, provenant de la ville de Xinyang City dans la province du Henan. Travaillant à l'aveugle, les scientifiques ont inoculé plusieurs lignées cellulaires différentes (animales et humaines habituellement utilisées dans les laboratoires de recherche) avec les globules blancs du patient et les ont laissé incuber à 37°C pendant plusieurs semaines, dans l'espoir d'observer au moins une infection dans l'une des conditions et de multiplier l'agent vecteur de la maladie.
Par chance, un mois après l'inoculation, les cellules de la lignée cellulaire DH82 (des macrophagesmacrophages dérivés d'une tumeurtumeur de chienchien) montraient clairement une réponse à l'inoculation. L'effet cytopathique, caractérisé par l'adoption par les cellules d'une forme allongée bien différente de leur forme ronde habituelle, et par l'accumulation de granules dans le cytoplasmecytoplasme, était facilement observable au microscope optiquemicroscope optique.
Le nouveau Phlebovirus, SFTSV, provoque une accumulation de granules dans le cytoplasme des cellules infectées (A et B). Les particules virales sont plus denses aux électrons (plus foncées au microscope électronique) et s'accumulent dans l'appareil de Golgi (C et D). © NEJM
Une nouvelle espèce de Phlebovirus
En observant ces mêmes cellules avec une meilleure résolutionrésolution (au microscope électroniquemicroscope électronique), des particules sphériques plus foncées de 80 à 100 nanomètresnanomètres ont été repérées dans des vacuolesvacuoles du cytoplasme qui correspondent probablement à l'appareil de Golgiappareil de Golgi. Cette opacité aux électronsélectrons, typique des virusvirus, indiquait que le syndrome était sans doute d'origine virale.
Au total, onze sérumssérums de patients ont permis d'obtenir autant de souches virales correspondantes. En séquençant leurs génomesgénomes, les chercheurs ont constaté une très grande homologiehomologie de séquence nucléotidique entre toutes les souches (96 %). De plus, les caractéristiques de l'ARNARN génomiquegénomique du virus sont très similaires à celles des Phlebovirus, un genre incluant notamment le virus de la vallée du Rift. Divisé en trois segments (L, M et S pour large, moyen et petit), il ne peut pas être directement traduit en protéineprotéine (ARN de polarité négatif) et doit d'abord être transcrit.
Transmission par les tiques
Sur 241 personnes présentant des symptômes du syndrome, le virus a été retrouvé chez 171 d'entre elles, tous des fermiers vivant dans des régions forestières et vallonnées. Parmi ceux-ci, 21 sont décédés (12 % de mortalité), d'après l'article paru dans la revue The New England Journal of Medicine.
La transmission de la maladie semble, elle aussi, avoir livré ses secrets, grâce à l'analyse minutieuse d'un grand nombre de moustiques (5.900) et de tiques (186) prélevés dans la région. Aucune trace du génome viral n'a été retrouvée chez les insectesinsectes volants (pourtant vecteurs du virus de la vallée du RiftRift), alors que 5,4 % des tiques se sont révélées positives. La transmission est donc certainement permise par cet arachnidearachnide, ce qui fait craindre une nouvelle épidémieépidémie avec l'arrivée des jours printaniers propices à son développement.