Grâce à la technique d’optogénétique, qui permet d’activer ou d’inhiber l’activité des cellules à partir d’un simple faisceau lumineux, des chercheurs sont parvenus à atténuer les Toc chez des souris. Une première étape vers un nouveau traitement de ces troubles obsessionnels chez l’Homme.

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    L'optogénétique, née dans les années 2000, combine la génétique à l'optique. En modifiant le génome de certains neurones de manière à les rendre sensibles à la lumière, on peut contrôler l'activité de ces cellules. Et donc affecter le comportement, puisqu'on pourrait atténuer les Toc. © Inserm

    L'optogénétique, née dans les années 2000, combine la génétique à l'optique. En modifiant le génome de certains neurones de manière à les rendre sensibles à la lumière, on peut contrôler l'activité de ces cellules. Et donc affecter le comportement, puisqu'on pourrait atténuer les Toc. © Inserm

    Les comportements répétitifs sont caractéristiques d'un certain nombre de maladies neuropsychiatriques, notamment dans le Toc où ils peuvent se développer de manière compulsive au point de devenir un véritable handicap pour la vie quotidienne (se laver les mains jusqu'à 30 fois par jour, vérifier à l'excès qu'une porteporte est bien verrouillée, etc.). Le Toc (trouble obsessionnel compulsif) touche entre 2 % et 3 % de la population mondiale, et en France on estime que plus d'un million de personnes sont atteintes de ce trouble.

    Le traitement habituel de cette pathologie consiste à utiliser des traitements pharmacologiques (antidépresseurs, neuroleptiques) conjuguée ou non à des psychothérapies comportementales. Toutefois, malgré ces combinaisons thérapeutiques, des symptômes sévères persistent chez environ un tiers des patients. Il est donc nécessaire de mieux comprendre les mécanismes cérébraux qui sont à l'origine de ces comportements répétitifs, pour mieux pouvoir les traiter.


    Eric Burguière revient dans cette vidéo sur la façon dont lui et ses collègues ont procédé pour démontrer l'intérêt de l'optogénétique chez des souris mutantes ne pouvant réprimer le comportement de toilettage. © Inserm

    De précédentes études en neuro-imagerie ont permis d'identifier, chez les personnes atteintes de Toc, des dysfonctionnements dans des circuits de neuronesneurones situés entre l'avant du cerveau (cortexcortex orbitofrontal) et des structures cérébrales plus profondes (les ganglions de la baseganglions de la base).

    Des souris atteintes de Toc en guise de modèle

    Dans cette nouvelle étude publiée dans Science, Eric Burguière et ses collaborateurs (au laboratoire d'Ann Graybiel au MIT) ont concentré leurs recherches sur ce circuit de neurones pour examiner sa fonction en détail, et développer une approche pour traiter les comportements compulsifs chez un modèle mutant de souris. Chez ces souris, les comportements compulsifs se traduisent par des toilettages répétés tout au long de la journée, pouvant déclencher des lésions cutanées.

    D'un point de vue physiologique, ces animaux n'expriment pas une protéineprotéine (du fait de l'absence du gène Sapap3) normalement présente dans les synapses des neurones du striatum, une structure faisant partie des ganglions de la base et associée à des fonctions telles que l'apprentissage de séquences, l'émergenceémergence d'habitudes, ou encore la prise de décision.

    Un traitement grâce à l’optogénétique

    Grâce à ce modèle de souris, des premières observations ont permis aux chercheurs de montrer que l'émergence des compulsions chez les souris mutantes était due à un déficit d'inhibitioninhibition comportementale. Les souris ne peuvent pas réprimer l'action de toilettage même lorsque cela n'est pas nécessaire. Ils ont ensuite mis en évidence, grâce à des enregistrements de l'activité des neurones, que la défaillance de communication dans le cerveau, entre le néocortexnéocortex et le striatum, conduit à une hyperactivité des neurones du striatum chez ces souris.

    Pour vérifier cette hypothèse, ils ont eu recours à l'optogénétique. Cette méthode consiste à modifier les neurones précédemment identifiés pour leur faire exprimer des protéines sensibles à la lumière, appelées opsines. Grâce à cette sensibilité accrue des cellules neuronales à la lumièrelumière, il devient possible de contrôler leur activité en les excitant ou au contraire en les inhibant via un simple faisceau lumineux.

    Lorsque les chercheurs ont excité par stimulationsstimulations lumineuses les neurones du cortex qui envoient des messages vers le striatum, les comportements compulsifs des souris ont été largement atténuésatténués. En revanche, en dehors de ces périodes de stimulation, les comportements compulsifs réapparaissaient.

    Faire la lumière sur les Toc

    « Nos découvertes montrent que la stimulation sélective du circuit neuronal peut rétablir un comportement normal chez des souris présentant à l'origine des comportements répétitifs pathologiquespathologiques, et qui ressemblent à des comportements observés chez certains patients atteints de Toc », précise Eric Burguière.

    Cette étude est prometteuse d'un point de vue méthodologique car elle montre que l'approche avec la technique d'optogénétiqueoptogénétique pourra permettre d'identifier le rôle des circuits neuronaux du cerveaucerveau qui, s'ils sont dysfonctionnels, peuvent provoquer des comportements pathologiques.

    Pour le chercheur, cette étude est également intéressante du point de vue des perspectives cliniques : « J'ai effectivement choisi d'effectuer mon retour en France dans une équipe de l'Inserm pour étudier en parallèle les effets physiologiques et comportementaux de stimulation cérébrale profonde chez des patients souffrant de Toc, et chez des souris avec la technique d'optogénétique, et ce afin de mieux comprendre l'effet de ces stimulations ».