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Le virus du Sida se fixe sur certains récepteurs de certains types de cellules, comme les lymphocytes. © L. Arthur et al., Science, 1992
Dès son annonce par l'hôpital berlinois de la Charité, la nouvelle s'est propagée dans le monde entier. Un homme séropositif aurait été apparemment guéri... Mais après la publication d'un article dans le Wall Street Journal (aux Etats-Unis) et dans Bild (en Allemagne), Eckhard Thiel, hématologue responsable de l'équipe ayant pris en charge le malade, et son collègue Gero Huetter, montaient au créneau pour tempérer les enthousiasmes. Leur réussite n'a d'ailleurs pas fait l'objet d'une publication scientifique et ne constitue qu'une observation isolée.
Le patient, un homme de 42 ans, est séropositif depuis dix ans, sous traitement antirétroviral (qui freine la multiplication du virus du Sida, le VIH) et n'a jamais développé la maladie. Atteint d'une leucémie, il a été soigné par une greffegreffe de moelle osseusemoelle osseuse à l'hôpital berlinois. Mais une telle opération impose de suspendre le traitement aux antirétroviraux car il provoquerait un rejet du greffongreffon.
L'équipe du docteur Eckhard Thiel a alors constaté que, parmi les donneurs, figurait une personne naturellement résistante au virus du Sida. Le cas est connu et s'explique par une mutation affectant un récepteur appelé CCR5 et installé à la surface des cellules. Baptisée DeltaDelta 32, cette mutation, qui supprime complètement ou partiellement ces récepteurs, est présente dans la population avec un taux de l'ordre de quelques pourcents mais différant beaucoup selon les régions. Elle est le plus fréquente dans les pays du nord de l'Europe et de l'Amérique.
Bonne pioche
Or, ce récepteur est utilisé par au moins une famille de VIH pour se fixer sur la cellule et y pénétrer. On sait qu'il existe un autre récepteur, CXCR4. Certains VIH, qualifiés de R5, préfèrent CCR5 (ce sont les plus fréquents chez les malades) tandis que d'autres, les virus X4, se fixent sur CXCR4. Pour l'instant, les phénomènes en jeu à ce niveau sont loin d'être élucidés mais des moléculesmolécules sont déjà testées, qui viennent détruire les récepteurs CCR5. D'autres gènesgènes sont également dans le collimateur des scientifiques, comme Apobec3 ou TRIMM22.
Devant l'opportunité qui s'offrait à eux, les médecins berlinois ont choisi la moelle osseuse provenant de cette personne bénéficiant de la mutation Delta 32, sans savoir ce qui allait se passer. La suite des événements a été pour l'instant heureuse. Plus de vingt mois après l'intervention et donc l'arrêt du traitement antirétroviral, le VIH reste indétectable.
Personne ne sait ce qui explique cette absence ni si elle est définitive. Gero Hütter insiste pour expliquer que ce résultat ne doit pas susciter de faux espoirs ni faire croire qu'une greffe de moelle osseuse pourrait guérir ou même soigner le Sida. Cette intervention chirurgicale (lourde) a été menée pour traiter la leucémie du patient et il n'est pas imaginable d'en étendre la prescription aux victimes du Sida. Toutefois, cette réussite désigne clairement le récepteur CCR5 comme une bonne cible potentielle pour enrayer le développement de la maladie. De quoi conforter les explorateurs de la piste génétiquegénétique...