Des chercheurs affirment avoir découvert le talon d’Achille des bactéries, du moins de nombreuses d’entre elles : la fabrication de leur membrane protectrice. Selon eux, il est possible d’en empêcher la formation, ce qui condamne le micro-organisme. Mieux, l’espoir est que les bactéries ne puissent développer de résistance contre cette arme d’un genre nouveau.

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    Certaines bactéries, dites à Gram négatif, possèdent une membrane supplémentaire, extérieure et imperméable. « C'est leur talon d'Achille » expliquent des chercheurs, britanniques et chinois, qui viennent de publier les résultats de leurs travaux dans la revue Nature. La manière dont les bactéries fabriquent cette membrane n'est toujours pas complètement élucidée mais l'équipe a découvert comment sont transportés les éléments nécessaires à sa constructionconstruction, en l'occurrence des lipopolysaccharideslipopolysaccharides. « Nous avons identifié le chemin utilisé par la bactérie pour transporter les éléments qui vont constituer la barrière. Nous avons également démontré que si la voie d'accès était bloquée, la bactérie mourait » résume Changjiang Dong, l'un des chercheurs qui a coordonné les travaux.

    Pour son collègue Haohao Dong, la découverte pourrait permettre de mettre au point « de nouveaux médicaments visant spécifiquement la membrane protégeant la bactérie et non la bactérie elle-même ». En d'autres termes, le médicament ne détruirait pas la bactérie mais son bouclier protecteur. Elle serait alors à la merci du système immunitaire de l'organisme infecté. Les bactéries à Gram négatif, justement, résistent bien aux antibiotiques et aux attaques du système immunitaire grâce à cette armure lipidique.

    Certaines maladies deviennent de plus en plus difficiles à traiter car les bactéries développent des résistances à un nombre grandissant d'antibiotiques. L'OMS vient de lancer un cri d'alarme. © AFP Photo, Sajjad Hussain

    Certaines maladies deviennent de plus en plus difficiles à traiter car les bactéries développent des résistances à un nombre grandissant d'antibiotiques. L'OMS vient de lancer un cri d'alarme. © AFP Photo, Sajjad Hussain

    Une piste prometteuse contre les bactéries résistantes aux antibiotiques

    « Comme ces nouveaux médicaments n'auront pas besoin de pénétrer dans la bactérie, nous espérons qu'elle ne pourra pas développer de résistancerésistance » ajoute-t-il. La nouvelle est donc d'imortance car l'extension de la résistance aux antibiotiques chez les bactéries pathogènes devient un sérieux motif d'inquiétude. Dans un rapport publié en avril dernier, l'OMS (Organisation mondiale de la santéOrganisation mondiale de la santé) avait averti que des infections considérées aujourd'hui comme mineures risquaient à nouveau de tuer à l'avenir si rien n'était fait. Le rapport avait mis l'accent sur la résistance aux antibiotiques de sept bactéries responsables de maladies graves courantes telles que les infections hématologiques (septicémiesepticémie), les diarrhéesdiarrhées, les pneumoniespneumonies, les infections des voies urinaires et la gonorrhéegonorrhée (infection sexuellement transmissibleinfection sexuellement transmissible).

    Parmi les germesgermes à Gram négatif résistants les plus répandus, et donc potentiellement cibles pour de nouveaux traitements inspirés de cette étude, figurent notamment la bactérie intestinale Escherichia coliEscherichia coli et Klebsiella pneumoniaeKlebsiella pneumoniae, à l'origine d'infections des voies respiratoires et bonne pourvoyeuse de maladies nosocomiales.

    La découverte a de quoi susciter un réel espoir mais, on le voit, les bactéries à Gram positifbactéries à Gram positif, dépourvues de cette double membrane, ne seront jamais concernées. Quoi qu'il en soit, il ne s'agit pas ici d'un nouveau traitement mais d'une piste, comme il en existe d'autres, à l'instar de celle des Crispr, que Futura-Sciences a déjà évoquée. Il reste maintenant à en tester les applicationsapplications sur des bactéries pathogènes en pleine action, c'est-à-dire lors de l'infection d'un organisme.