Des jumeaux viennent de voir le jour grâce à une méthode de procréation médicalement assistée impliquant la congélation d’ovocytes. En France pourtant, les lois de bioéthique interdisent cette pratique dans la majorité des cas.

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    Une fécondation in vitro à partir d'ovocytes congelés a récemment mené à la naissance de jumeaux, les premiers bébés issus de cette technique en France. © DR

    Une fécondation in vitro à partir d'ovocytes congelés a récemment mené à la naissance de jumeaux, les premiers bébés issus de cette technique en France. © DR

    Ils s'appellent Jérémie et Keren et sont en bonne santé, de même que leur maman. Ces jumeaux nés à l'hôpital Antoine Béclère de Clamart (Hauts-de-Seine) sont les premiers bébés français issus d'une amélioration de la technique de fécondation in vitro qui consiste en une congélation préalable des ovocytes. Cette méthode, pourtant utilisée à l'étranger, reste généralement interdite en France par les lois de bioéthique

    Selon le gynécologuegynécologue-obstétricien René Frydman (déjà à l'origine de la naissance du premier bébé-éprouvette français, Amandine), « la loi autorise, dans des conditions de risque de perte de fertilité pas bien définies, à préserver des ovocytes par congélation, mais pas avec la méthode la plus performante (la vitrification, ou congélation ultra rapide) sous prétexte que toute innovation est assimilée à de la recherche sur l'embryon ». Elle peut par exemple permettre aux femmes atteintes de cancers de prélever et conserver leurs ovocytes avant les phases de traitements anticancéreuxanticancéreux qui peuvent endommager leur fertilité.

    Congélation lente des ovocytes

    René Frydman a donc utilisé la méthode de congélation lente, développée il y a près de 40 ans. Elle consiste en une exposition de l'ovocyte, après son prélèvement de l'ovaireovaire, à des agents cryoprotecteurs qui pénètrent à l'intérieur de la cellule (du DMSO et de l'éthylèneéthylène glycol) et d'autres qui ne pénètrent pas (saccharosesaccharose, glucoseglucose, fructosefructose). Les ovocytes sont ensuite refroidis entre -5 et -7°C pendant quelques minutes, puis refroidis lentement à raison de 0,3 voire 0,5°C par minute, jusqu'à atteindre -30 ou -65°C. Les échantillons sont ensuite plongés dans l'azoteazote liquideliquide (-195°C) pour être définitivement stockés. Ce refroidissement très lent permet d'éviter une cristallisation de l'eau à l'intérieur de la cellule, mais le résultat n'est pas sans failles.

    La vitrification est une technique de cryoconservation plus efficace. Elle utilise les mêmes outils que la congélation lente, mais en améliore l'efficacité en augmentant considérablement la vitessevitesse de refroidissement (jusqu'à 23.000°C par minute). Ceci est possible en modifiant la viscositéviscosité et le volumevolume du milieu dans lequel les ovocytes sont congelés.


    La congélation lente d'ovocytes a été utilisée par René Frydman pour aboutir à la naissance des jumeaux. © Kosmogonia, YouTube

    La viscosité du milieu est assurée par des concentrations très élevées d'agents cryoprotecteurs. Le transfert de température est facilité par un faible volume du milieu et par l'utilisation d'azote liquide proche de son point de fusionfusion (-210°C). Le refroidissement est si rapide que l'eau contenue à l'intérieur de la cellule ne peut pas se transformer en cristaux de glace qui endommageraient la cellule, mais en un solidesolide non cristallin.

    Efficacité de la vitrification des ovocytes

    Pour éviter les effets toxiques des cryoprotecteurs, les ovocytes sont soumis à ces hautes concentrations uniquement une minute avant la congélation et sont immédiatement plongés dans un milieu moins concentré après congélation. Cette technique est très efficace puisque près de 80 % des ovocytes sont toujours viables après la décongélation, sont capables d'être fertilisés par les spermatozoïdesspermatozoïdes et peuvent générer des embryons et des enfants sains.

    Les nouvelles lois de bioéthiquebioéthique seront débattues en 2011. Développées par le dernier lauréat du prix Nobel de médecine et de physiologie Robert Edwards, les fécondations in vitro en France bénéficieront peut-être des dernières évolutions.