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Il est arrivé que certains chimpanzés se noient dans le bassin qui entoure leur enclos. Au zoo d'Arnhem (Pays-Bas) par exemple, un chimpanzé mâle paniqué et redoutant d'être agressé par le dominant s'est jeté à l'eau et en est mort. Cette fois, l'histoire se termine bien, et Kijani et Mambala viennent de démontrer qu'un chimpanzé aussi, ça peut nager. © Raul Pons Lopez, fotolibre.org, cc by sa 2.5
- 1er avril : ce sujet a été écrit dans l'optique poissonpoisson d'avril, découvrez les dessous de l'actu décortiquée.
Ce fut un peu la panique dans le zoo de Maribor (Slovénie) ce samedi 31 mars. Vers 15 h, deux chimpanzés, nommés Kijani et Mambala, ont effrayé les visiteurs en se baladant quelques minutes durant dans les allées de leur parc, avant que le personnel ne les récupère et ne les ramène bien sagement dans leur enclos. Comment sont-ils parvenus à s'échapper ? En nageant, tout simplement...
Il faut dire que la performance n'est pas courante. À part quelques cas de chimpanzéschimpanzés apprivoisés, ces grands singes rebutent souvent d'aller dans l'eau. Comme la plupart des primatesprimates, à quelques exceptions près, dont l'Homme bien sûr, mais aussi le macaque du Japon (Macaca fuscataMacaca fuscata) qui, vivant au milieu de la neige durant l'hiverhiver, aime à se prélasser dans les sources d'eau chaude.
Du fait de leur crainte naturelle pour le liquideliquide nourricier, les parcs zoologiques délimitent parfois leurs enclos simplement par une rivière, suffisamment profonde de manière à ce que les singes ne soient pas tentés d'explorer les contrées au-delà. Comme c'est le cas à Maribor.
Après la nage petit-chien, la nage petit-chimpanzé
Mais la troupe de 12 chimpanzés compte dans ses rangs deux jeunes aventuriers. Kijani, le mâle de 5 ans, a toujours grandi avec Mambala, né seulement quelques jours avant lui. Ce samedi, le soleilsoleil chauffait fort pour la saisonsaison. Les singes semblaient avoir décidé de batifoler dans quelques centimètres d'eau, histoire de se rafraîchir un peu.
« Là, des spectateurs ont raconté avoir vu l'un des chimpanzés prendre son élanélan et se lancer dans la rivière » commente l'un des soigneurs du parc, Nemanja Meltelj, dans Delo, le principal journal slovène. Le second a suivi le mouvementmouvement, et dans des gestes pas très académiques, ils ont l'un et l'autre réussi à franchir à la nage les quelques mètres qui les séparaient de l'autre rive. Les autres chimpanzés du groupe ont spontanément arrêté leurs activités et ont suivi la scène, avec semble-t-il beaucoup de crainte.
En tant que nos plus proches cousins, les chimpanzés ont parfois des attitudes bien humaines. Lorsqu'on leur apprend un langage, ils communiquent facilement avec nous et peuvent détenir un vocabulaire de plusieurs centaines de mots. Alors pourquoi sommes-nous surpris de les voir se mettre à nager ? © Convex creative, Flickr, cc by 2.0
Une fois sur la terre ferme, les deux compères ont facilement enjambé la main-courante et se sont retrouvés au milieu d'une foule perplexe et inquiète, qui a commencé à s'écarter dans un mouvement de panique générale. Les deux primates non-humains quant à eux sont restés très calmes, et ont sillonné les allées du parc, poussés par la curiosité. C'est finalement devant l'enclos des ours que leur escapade a pris fin. Les soigneurs se sont facilement approchés et les explorateurs ont terminé leur aventure dans les bras du personnel du zoo.
Vers une culture de la natation ?
« À notre connaissance, cela ne s'est jamais produit dans un parc, reprend Nemanja Mertelj. Nous avions remarqué le plaisir assez particulier que Mambala et Kijani prenaient à jouer dans l'eau, mais nous ne les avions jamais vus s'essayer à la nage. »
Chez cette espèceespèce, comme pour beaucoup d'autres d'ailleurs, la transmission du savoir se fait par imitation, de la mère et des congénères. Mais aucun des autres chimpanzés du clan n'ayant été repéré s'essayant aux plaisirs de la natation, il est difficile de comprendre ce qui a pu pousser les jeunes intrépides à s'y risquer.
Dans le milieu naturel, les chercheurs ont remarqué que les différents groupes sociaux de ces grands singes présentaient des us et coutumes variables et savaient utiliser quelques outils. Certains par exemple ont élaboré une technique de chasse aux termites et aux fourmisfourmis en insérant une fine tige de boisbois dans les repaires des insectesinsectes. D'autres en revanche savent se servir de plantes (notamment Trichilia rubescens) à leur avantage en pliant et mâchonnant des feuilles afin de se débarrasser de parasites. Dans ces différents cas de figure, il a toujours fallu un pionnier, un individu qui montre l'exemple avant d'être copié par les autres. Exactement comme chez l'Homme.
Ainsi, le zoo n'est pas à l'abri de récidives. Non seulement des deux jeunes mâles, mais peut-être également de tout le groupe qui pourrait tenter l'expérience. « Nous allons mettre temporairement un enclos de plexiglas pour éviter que la mésaventure ne se reproduise. Avant de réfléchir à une solution plus adaptée pour tout le monde » conclut le soigneur.
Une chose est désormais presque sûre. Par cette prouesse, Kijani et Mambala ont décroché leur place au sein de la délégation chimpanzé de natation aux Jeux olympiques de Londres en juillet prochain...