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La grippe A(H7N9) pourrait devenir pandémique. Si les souches virales deviennent résistantes aux seuls traitements disponibles, que faire ? © C. Goldsmith, CDC
La grippe A(H7N9) ne fait plus la une de l'actualité, mais elle suscite toujours autant d'inquiétudes. Si effectivement le nombre de nouveaux cas a fortement chuté ces derniers mois (seulement deux personnes ont été diagnostiquées avec cette grippe depuis le 8 mai, ce qui fait grimper les chiffres totaux à 133 malades et 43 décès), la crainte d'une réapparition du virus à l'automneautomne est réelle.
Pour l'heure, les politiques de préventionprévention ont semble-t-il montré leur efficacité. En effet, le recul de l'épidémie coïncide avec la fermeture des marchés aux volailles, par lesquelles le virus était transmis à l'Homme. En revanche, les traitements proposés ne se montrent pas toujours d'une grande efficacité.
Les médicaments de première ligne, l'oseltamiviroseltamivir (Tamiflu) ou le zanamivirzanamivir (Relenza), sont censés inhiber l'activité de la neuraminidase, une enzymeenzyme retrouvée à la surface du virus et indispensable à sa dispersion. Mais une étude publiée dans The Lancet à la fin du mois de mai dernier montrait pour la première fois des signes de résistance aux seuls antigrippaux disponibles. Une mutation, nommée R292K, changeait la protéine virale et lui permettait d'esquiver l'action des médicaments.
Des souches résistantes insensibles aux tests classiques
Une nouvelle étude, parue dans mBio, vient non seulement confirmer ce travail, mais pointe du doigt que ces souches résistantes ne peuvent pas forcément être mises en évidence par les tests classiquement utilisés. Cela sous-entend donc qu'il devient nécessaire de rester vigilant face à chaque cas et de s'assurer par des méthodes génétiques de la présence ou de l'absence du variant insensible, pour éviter de généraliser ces souches.
Avec le Relenza, le Tamiflu est l'un des seuls traitements à utiliser contre la grippe A(H7N9). Problème : certaines souches virales sont résistantes, et les tests classiques pour déterminer la sensibilité aux médicaments semblent inefficaces dans ce cas-là... © Moriori, Wikipédia, DP
Robert Webster et ses collègues, du Saint Jude Children's Research Hospital de Memphis, ont récupéré des échantillons du virus retrouvés chez le premier patient connu. Leur analyse a permis de distinguer deux souches distinctes. L'une, qui représentait 35 % de la population virale totale, était porteuse de la mutation R292K et donc résistante aux inhibiteurs de la neuraminidase. Les 65 % restants, quant à eux, ne supportaient pas les traitements.
Pourtant, les auteurs ont noté un problème. Pour tester la tolérance à l'oseltamivir ou au zanamivir, les scientifiques vérifient l'activité de l'enzyme virale en présence des médicaments. Si elle continue à exercer son action, c'est que la souche est résistante. Or, à en croire les résultats obtenus, les virus retrouvés chez ce patient étaient sensibles aux traitements. Mais dans les faits, ce n'est pas le cas.
Que faire en cas de pandémie de grippe A(H7N9) ?
Par cette recherche, les auteurs démontrent l'intérêt de réaliser des séquençages génétiques pour déterminer la ou les souches infectieuses, dans le but de contrôler la résistancerésistance. Car celle-ci émerge surtout lorsque les pathogènespathogènes sont soumis à une forte pressionpression de sélection. Si un variant résistant infecte un patient en même temps qu'une souche sensible aux médicaments, les soins vont éliminer tous les virus potentiellement accessibles par les thérapiesthérapies classiques et épargner ceux contre lesquels on ne peut rien. Leur population risque ainsi de grossir, ce qui limite le champ d'action des médecins.
En contrepartie, cette mutation aurait un coût pour le virus : elle pourrait limiter son potentiel de contagion. Avec un peu de chance, si la grippe Agrippe A(H7N9) devenait pandémique, elle pourrait se limiter majoritairement à des variants sensibles au Tamiflu ou au Relenza.
Néanmoins, si le monde devait faire face à un regain de cette grippe, Robert Webster pense que la solution la plus adaptée serait la vaccination de massemasse. Les autres antivirauxantiviraux potentiellement efficaces ne sont actuellement qu'en phase de tests cliniques et ils ne seront pas prêts à temps. Quant au vaccin spécifique, aucun laboratoire n'a annoncé l'avoir développé. À l'arrivée de la brise automnale, nous risquons peut-être de nous trouver fort dépourvus...