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Respecter les droits de la personne en fin de vie, mais sans transgressiontransgression du tabou de l'assistance au suicide. Le Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE), interrogé par le président de la République, propose quelques évolutions sur ce sujet, notamment concernant la rédaction par les malades de directives anticipées. Il se montre toutefois divisé sur la question de l'assistance au suicide, tout en y étant majoritairement opposé.
L'un des engagements du candidat François Hollande portait sur la promotion d'une meilleure gestion de la fin de vie. Le nouveau chef de l'État avait donc logiquement saisi le CCNE de trois questions :
- Comment et dans quelles conditions recueillir et appliquer des directives anticipées émises par une personne en pleine santé ou à l'annonce d'une maladie grave, concernant la fin de sa vie ?
- Comment rendre plus dignes les derniers moments d'un patient dont les traitements ont été interrompus à la suite d'une décision prise à la demande de la personne, de sa famille ou par les soignants ?
- Selon quelles modalités et conditions strictes permettre à un malade conscient et autonome, atteint d'une maladie grave et incurable, d'être accompagné et assisté dans sa volonté de mettre lui-même un terme à sa vie ?
Que faire lorsque la mort est proche ? Faut-il aller à sa rencontre ou continuer à la fuir le plus longtemps possible ? © Thomas Claveirole, Flickr, cc by sa 2.0
Les soins palliatifs pour tous
Dans son avis n° 121, Fin de vie, autonomieautonomie de la personne, volonté de mourir, le CCNE émet ainsi plusieurs recommandations adoptées à l'unanimité de ses membres :
- la nécessité de faire cesser toutes les situations d'indignité qui entourent encore trop souvent la fin de vie ;
- la nécessité de rendre accessible à tous le droit aux soins palliatifs -- un droit reconnu par le législateur depuis 14 ans ;
- la nécessité de développer l'accès aux soins palliatifs à domicile ;
- la nécessité d'associer pleinement le malade et ses proches à tous les processus de décision concernant sa fin de vie ;
- le respect des directives anticipées émises par ce dernier. À l'heure actuelle, et malgré leur nom de directives, celles-ci ne sont considérées aux yeuxyeux de la loi que comme l'expression de souhaits. Dans les faits, toutes les décisions sont prises par les médecins. Le comité demande que lorsqu'elles ont été rédigées en présence d'un médecin traitant, et dans des circonstances où une maladie grave a été annoncée, les directives anticipées soient contraignantes pour les soignants, sauf exception dûment justifiée par écrit ;
- le respect du droit de la personne en fin de vie à une sédation profonde jusqu'à son décès si elle en fait la demande, lorsque les traitements, voire l'alimentation et l'hydratationhydratation, ont déjà été interrompus à sa demande ;
- la nécessité de développer la formation des soignants, leur capacité d'écoute et de dialogue ;
- la nécessité de faire cesser toutes les situations d'isolement social et de dénuement des personnes malades, des personnes handicapées et des personnes âgées qui précèdent trop souvent la fin de leur vie, et de leur donner accès à l'accompagnement qui leur est indispensable.
Pas d’assistance au suicide, pas d’euthanasie
En revanche, concernant le droit d'une personne en fin de vie à avoir accès, à sa demande, à un acte médical visant à accélérer son décès ou le droit à une assistance au suicide, le débat a semble-t-il été houleux. Le comité « n'a pas abouti à une réflexion ni à des propositions unanimement partagées ». En effet, la majorité de ses membres recommande de « ne pas légaliser l'assistance au suicide ou l'euthanasie ». La majorité des membres du CCNE préconisent ainsi de ne pas modifier la loi actuelle, estimant qu'elle opère une distinction « essentielle et utile » entre « laisser mourir » et « faire mourir ».
Le CCNE considère enfin « que la réflexion sur le sujet de la fin de la vie n'est pas close et qu'elle doit se poursuivre sous la forme d'un débat public ».
De son côté, la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) estime que l'avis du comité « va dans le bon sens ». Un avis partagé par le député UMP des Alpes-Maritimes, Jean Leonetti, rapporteur de la loi de 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie. Selon lui, « le CCNE approuve les améliorations possibles de [celle-ci] et va dans le même sens que la proposition de loi (n° 754) déposée en mars 2013 qui vise à renforcer les droits des patients en fin de vie. En particulier en ce qui concerne la sédation en phase terminale et l'amélioration des directives anticipées. » Il se félicite par ailleurs que le Comité « condamne sans ambiguïté l'euthanasie devant les dérives possibles constatées dans les pays où la dépénalisation de cette pratique a été mise en place ».