C'est une surprise révélée par une expérience réalisée au sommet du mont Everest : chez un sujet sain, le taux d’oxygène sanguin peut descendre au tiers de sa valeur moyenne sans séquelle notable. Or, avec une telle valeur, un patient serait expédié aux urgences et intubé...


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    Une expérience médicale unique vient d'être tentée sur les pentes de l'Everest ainsi qu'à son sommet par une équipe de médecins britanniques conduite par le docteur Michael Grocott, ainsi que neuf confrères et scientifiques du Caudwell Xtreme Everest Team, qui publient leurs conclusions dans le New England Journal of Medicine.

    Egalement alpinistes, ces chercheurs ont escaladé le mont Everestmont Everest tout en effectuant des prélèvements sanguins sur eux-mêmes pour mesurer l'évolution avec l'altitude de la pressionpression partielle d'oxygène dissous dans le sang artériel (PaO2), de dioxyde de carbonedioxyde de carbone (PaCO2), de la saturation en oxygène (SaO2), ainsi que de la concentration en hémoglobine, lactatelactate et bicarbonatebicarbonate.

    Les résultats indiquent que PaO2 diminuait au cours de la progression en altitude des grimpeursgrimpeurs, tandis que PaCO2 restait stable. Durant ce temps, la concentration en hémoglobine augmentait, de sorte que la teneur en oxygène du sang artériel se maintenait à un niveau comparable de celui observé au niveau de la mer jusqu'à ce que les dix volontaires aient atteint une altitude de 7.100 mètres.

    La tente, installée à 8.400 mètres, pour le prélèvement de sang le plus haut du monde. © <em>Caudwell Xtreme Everest Research Group</em>

    La tente, installée à 8.400 mètres, pour le prélèvement de sang le plus haut du monde. © Caudwell Xtreme Everest Research Group

    Arrivés à 8.400 mètres, les chercheurs ont volontairement enlevé leurs masques à oxygène et respiré l'airair raréfié ambiant durant 20 minutes, d'une température de -25°C. A cette altitude, la pression atmosphériquepression atmosphérique n'est plus que de 253 mm de mercuremercure (mm Hg), au lieu de 760 mm au niveau de la mer. De nouveaux prélèvements de sang artériel ont été effectués sur quatre grimpeurs, et ramenés deux heures plus tard au camp de base, à 6.400 mètres.

    L'analyse indique un niveau d'oxygène dissous (PaO2) moyen de 24,6 mm Hg (3,28 kPa) et un niveau de dioxyde de carbone (PaCO2) moyen de 13,3 mm Hg (1,77 kPa).

    Comparativement à l'altitude de 7.100 mètres, la concentration en oxygène s'était réduite de 26% (145,8 ml/litre contre 197,1 ml/litre), tandis que la différence entre les niveaux d'oxygène dissous alvéolaire et artériel était évaluée à 5,4 mm Hg en moyenne.

    Un taux d'oxygène incroyablement bas

    Cette expérience a permis de mesurer les plus faibles niveaux d'oxygène jamais observés chez un individu sain. « Avec des chiffres pareils constatés sur un malade, les réanimateurs et les urgentistes prennent immédiatement la décision d'intuber et de ventiler le sujet en air très enrichi en oxygène », explique au Figaro le docteur Emmanuel Cauchy (Ifremont, hôpital de Chamonix). Or, les volontaires se portaient parfaitement bien à 8.400 mètres alors que leur faible oxygénation aurait dû leur faire ressentir de graves troubles de santé. Voilà qui suggère une adaptation surprenante de leur organisme.

    « L'observation de sujets en bonne santé à des altitudes élevées où la teneur en oxygène est faible peut nous donner de précieuses indications sur les changements physiologiques qui se produisent et améliorer ainsi les soins intensifs chez des patients hospitalisés », conclut le docteur Michael Grocott.