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Chet Moritz (à gauche) et Eberhard Fetz (à droite). © Clare McLean/U. de Washington
Pour rendre sa mobilité à un membre paralysé à la suite de la section d'une liaison nerveuse (par exemple après un choc touchant la colonne vertébrale), on peut imaginer établir une nouvelle connexion entre la zone motrice du cerveau (reliée à la moelle épinière) et les muscles, un peu comme un électricien installerait un nouveau fil. On est encore très loin d'une telle prouesse car s'il est possible de stimuler un muscle avec un courant électriquecourant électrique, obtenir un mouvementmouvement précis d'un membre est une toute autre affaire, exigeant un signal extrêmement complexe. Cette voie a cependant commencé à être explorée. Il est notamment possible de recueillir le signal parcourant une liaison nerveuse ou même provenant de l'activité des neurones du cerveau. Des expériences ont déjà été réalisées pour contrôler par la pensée des prothèses ou des ordinateursordinateurs.
Sur ce chemin difficile, une équipe américaine vient de réaliser une belle progression. Au Washington National PrimatePrimate Center (université de Washington), Eberhard Fetz, Chet Moritz et Steve Perlmutter ont en effet mis au point un dispositif connectant, par l'intermédiaire d'un ordinateur, le cortex moteurcortex moteur du cerveau aux muscles du poignet. Réalisée sur deux macaques aux bras temporairement paralysés (par une anesthésieanesthésie locale), l'expérience leur permis, après un bref apprentissage, de commander les muscles de leur poignet. La réussite tient pour beaucoup à la souplesse du cerveau car les chercheurs ont branché leurs électrodesélectrodes sur des neurones isolés et qui n'avaient préalablement pas la fonction de commander ces muscles !
On ne comprend pas bien pourquoi, mais ça marche
Dans un premier temps, pour vérifier le bon fonctionnement des électrodes introduites dans le cortex des macaques, les chercheurs ont relié le système à un écran. Les signaux recueillis par les électrodes étaient détectés par l'ordinateur et servaient à déplacer un curseur sur un écran. Selon les neurones activés, le curseur bougeait dans l'une des quatre directions possibles. Le jeu consistait à l'amener jusque dans un carré, la réussite étant récompensée par une friandise. Les macaques ont ainsi appris à diriger le curseur par la pensée. Dans une seconde phase, les macaques ont reçu l'injection d'anesthésiqueanesthésique dans le bras et, cette fois, l'ordinateur ne contrôlait pas un curseur mais envoyait des stimulationsstimulations électriques sur les muscles du poignet.
Le système permettait à un neurone unique de commander deux mouvements musculaires selon le niveau d'activation : élevé, il déclenchait une flexionflexion ; faible, il commandait une extension. Les mouvements de la main étaient détectés et servaient à déplacer le curseur sur l'écran, pour le même jeu que dans la première phase. Les macaques ont compris en moins d'une heure et dirigeaient efficacement le curseur dans le carré dessiné à l'écran.
L'un des intérêts de l'expérience vient du fait qu'un seul neurone suffit pour commander un - petit - mouvement. On peut espérer obtenir ainsi un signal plus simple à analyser. La grande surprise est que ce neurone peut être choisi pratiquement au hasard. Pour peu qu'il soit moteur, il sera utilisable même si, précédemment, il n'était pas du tout employé pour commander ce muscle-là. C'est le cerveau qui s'adapte et qui finit par trouver le neurone à activer pour obtenir un certain résultat.
Même si les mécanismes à l'origine de cette souplesse du cerveau sont mal compris, ils donnent beaucoup d'espoir. On peut penser que cette faculté cérébrale facilitera la tâche dans les recherches sur le traitement des paralysies.