Les anti-inflammatoires non stéroïdiens, en tête desquels l’aspirine, diminueraient d’environ 15 % les risques de contracter des cancers de la peau. Une étude de plus qui vient confirmer l’intérêt des antidouleurs dans la prévention des tumeurs. Les mécanismes restent cependant encore mal maîtrisés.
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Doit-on tous prendre de l’aspirine ? La question se pose une nouvelle fois : des scientifiques de l'Aarhus University (Danemark) montrent les bénéfices que procurent l'acideacide acétylsalicique et toute une panoplie d'anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS, comme l'ibuprofène, le naproxène ou le diclofénac) dans la prévention des cancers de la peau. Cette idée avait déjà été montrée, pour d'autres tumeurs également (notamment au niveau colorectalcolorectal) mais ce travail publié dans la revue Cancer a été réalisé sur un échantillon très large, de près de 200.000 Danois.
Disposant d'une base de donnéesbase de données bien fournie, les chercheurs ont épluché les dossiers médicaux de leurs patients entre 1991 et 2009. Ils disposaient de 13.316 sujets ayant déclaré un carcinome basocellulaire (le cancer de la peaucancer de la peau le plus fréquent, dû aux rayons agressifs du soleil), 1.974 atteints d'un carcinome spinocellulaire (cancer de l'épidermeépiderme là aussi causé le plus souvent par le soleilsoleil) et 3.242 personnes touchées par un mélanome malin (les mélanocytesmélanocytes, les cellules pigmentairespigmentaires sont touchées ; le plus dangereux). Pour permettre une comparaison, 178.655 individus servaient de témoin.
Plus d’AINS, moins de cancers de la peau
Le constat est simple : les personnes ayant reçu au moins deux prescriptions d'AINS avaient 13 % et 15 % de risques en moins de contracter respectivement un mélanome malin ou un carcinome spinocellulaire. Une consommation sur une longue duréedurée ou à doses importantes limite davantage les risques. La protection semble proportionnelle à la quantité ingérée.
D'un point de vue global, la prise d'AINS n'a pas d'effet sur les carcinomes basocellulaires. Pour les consommateurs réguliers, en revanche, la probabilité de déclarer ce cancer sur certaines régions du corps (les moins exposées au soleil) diminue de 15 à 21 %.
Des effets sur Cox-2, mais pas seulement
Les mécanismes cellulaires restent cependant incompris, même si l'on suppose que les AINS bloquent la croissance de cellules précancéreuses dans des lésions de la peau.
Une théorie émerge malgré tout. Parmi ces antidouleurs, un certain nombre sont des inhibiteurs de deux enzymesenzymes, Cox-1 et Cox-2, contribuant à la synthèse des prostaglandinesprostaglandines. Ces moléculesmolécules jouent divers rôles dans l'organisme et participent à la médiation de la douleurdouleur, contribuent à la fièvre et promeuvent la réaction inflammatoire, ce qui explique le mode d'action des médicaments.
L'inflammationinflammation contribuant au développement de cancers en abîmant les cellules, la réduire limiterait leur occurrence. Mais bloquer l'activité de ces deux enzymes aurait d'autres effets. D'une part, cela diminuerait la formation de nouveaux vaisseaux sanguins, indispensables à une tumeur pour croître. D'autre part, l'inhibitioninhibition de Cox-1 et Cox-2 favoriserait le suicide cellulaire (apoptoseapoptose), que les cellules tumorales esquivent.
L'hypothèse est intéressante mais très probablement incomplète. En effet, l'acétaminophèneacétaminophène, un AINS qui n'interfère pas avec l'activité des enzymes, protège également des cancers. Reste maintenant à trouver le pourquoi.