Une étude chez la souris suggère que de l’ADN provenant de bactéries de l’organisme pourrait passer d’une génération à une autre. Des caractéristiques liées à l’immunité ou l’inflammation pourraient ainsi être transmises de la mère à ses petits.

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    En étudiant les souris, Herbert Virgin (à gauche) et Thad Stappenbeck ont montré que les mères peuvent transmettre un caractère à leur portée grâce à l’ADN de bactéries. © Robert Boston, Washington University

    En étudiant les souris, Herbert Virgin (à gauche) et Thad Stappenbeck ont montré que les mères peuvent transmettre un caractère à leur portée grâce à l’ADN de bactéries. © Robert Boston, Washington University

    Les bactéries qui vivent dans notre organisme, comme celles de la flore intestinale, ne causent généralement pas de maladies et confèrent même souvent des bénéfices. Ces bactéries commensales peuvent cependant influencer des caractères de l'individu, comme son poids ou son comportement. On considère généralement que ces bactéries s'acquièrent au cours de la vie.

    Si nous héritons bon nombre de nos caractères de l'ADN transmis par nos parents, il n'est pas le seul en cause... Et pour preuve : les scientifiques rencontrent parfois des problèmes de variations phénotypiques difficiles à contrôler chez les souris transgéniquestransgéniques, avec de nouvelles caractéristiques qui apparaissent de manière inexpliquée. Ces nouveaux caractères se transmettent d'un habitat à un autre (suggérant une infection microbienne), mais aussi de la mère à sa descendance (suggérant une cause génétiquegénétique).

    Dans une étude parue dans Nature, des chercheurs de la Washington University School of Medicine à Saint-Louis, qui avaient été confrontés à ce type de problème lors de leurs recherches, apportent une explication à ce phénomène. Lors d'études sur des maladies inflammatoires de l'intestin, certains des auteurs ont constaté qu'environ la moitié de leurs souris avaient de bas niveaux d'anticorpsanticorps IgA dans l'intestin. Un caractère qui pourrait être lié à des bactéries.

    Les parents transmettent des caractères à leurs enfants, mais l’ADN des bactéries de l’organisme aussi. © Muhammad Mahdi Karim, Zoohouse, cc by sa 3.0, <em>Wikimedia Commons</em>

    Les parents transmettent des caractères à leurs enfants, mais l’ADN des bactéries de l’organisme aussi. © Muhammad Mahdi Karim, Zoohouse, cc by sa 3.0, Wikimedia Commons

    L’ADN de bactéries commensales transmet des caractères

    Lorsque les scientifiques ont placé des souris avec de bas niveaux d'IgA avec des sujets qui avaient des niveaux élevés d'IgA, tous finissaient par avoir de bas niveaux d'IgA en quelques semaines. Et lorsqu'ils élevaient des souris, les descendants de femelles qui avaient de bas niveaux d'anticorps conservaient cette caractéristique. Or des bactéries, comme la Sutterella, pourraient être responsables de la transmission de ce caractère. Les souris qui ont vécu ensemble peuvent acquérir ce caractère "bas niveaux d'IgA" par la transmission de la bactérie, et les femelles pourraient passer des bactéries à leur descendance.

    Chez la souris, les bactéries commensales ont un impact sur la susceptibilité des animaux aux lésions de l'intestin : des souris qui possèdent certaines bactéries sont plus susceptibles d'avoir des lésions causées par une exposition à un produit chimique. Lorsque les chercheurs ont nourri les souris avec un produit chimique utilisé pour caractériser la réponse de l'intestin à des lésions, le composé causait plus de dommages chez les souris qui avaient de bas niveaux d'IgA. De plus, les souris femelles passeraient des bactéries à leur descendance ce qui les rendrait vulnérables aux lésions.

    Par conséquent, lors d'études sur les souris, les chercheurs doivent tenir compte de l'influence que pourraient avoir des bactéries sur les caractères étudiés. Un moyen pour éviter cela est de ne pas séparer les souris témoins et les souris tests, pour s'assurer que les bactéries soient présentes dans les deux groupes. Cette découverte signifie aussi que les scientifiques doivent maintenant considérer que l'ADN microbien passant de la mère à sa progéniture peut influencer la santé, car les mères transmettraient des caractères via l'ADN bactérien.