Les conséquences de la pollution liée aux incendies sont largement sous-estimées selon les auteurs d'une nouvelle étude. Le nuage de cendres contient une multitude de polluants cancérigènes et l'impact sur la santé et la mortalité peut être important, même à des centaines de kilomètres de distance du brasier.


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    La fumée issue des feux de forêt est un danger sous-estimé sur la santé de la population, c'est ce qu'explique une étude parue le 1er juin dans Science of the Total Environment. Les auteurs font un constat accablant sur l'impact des incendies sur la santé humaine, même lorsque la population se situe à bonne distance du brasier. La fumée provoque entre 4 000 et 9 000 décès prématurés chaque année aux États-Unis. Les répercussions économiques que cela entraîne sont comprises entre 36 et 82 milliards de dollars par an. L'auteur principal de l'étude, Oliver Gao, regrette que la pollution issue des véhicules et des industries soit largement médiatisée et connue du grand public, mais pas celle issue des incendies. Le changement climatiquechangement climatique ne tue pas seulement lorsqu'un ouraganouragan dévaste une ville, mais aussi par le biais des particules de cendres néfastes qui sont parfois propulsées à des centaines de kilomètres d'un incendie. Le meilleur exemple récent du phénomène est celui de la ville de New York, qui a été plongée dans un brouillard de fumée rouge, provoqué par les incendies au Québec. Bien que située à plus de 800 kilomètres des incendies canadiens, New York a eu la pire qualité de l'airair du monde pendant deux jours, avec des niveaux de pollution 14 fois supérieurs aux seuils recommandés.

    Quelques semaines après, Montréal a connu le même sort le dimanche 25 juin, même si cette pollution qualifiée de « dangereuse » pour la santé par les autorités étonne moins, étant donné que la ville se situe plus près des incendies que New York.

    Des particules cancérigènes qui pénètrent dans les poumons et le sang

    La particule la plus néfaste pour la santé est la PM2.5 : elle regroupe un mélange d'aérosolsaérosols et de métauxmétaux et sa dimension, très petite (de 2.5 micronsmicrons ou moins) lui permet de pénétrer très facilement dans les poumons et ensuite d'entrer dans le sang. Voilà pourquoi elle est capable de provoquer une multitude de problèmes de santé, et pas seulement au niveau pulmonaire. Elle est connue pour être à l'origine de cancers, et notamment des tumeurs au cerveau, mais aussi de crises cardiaques et d'AVCAVC. La fumée contient également du monoxyde de carbonemonoxyde de carbone, un gazgaz très toxique lorsque les concentrations sont fortes. Il provoque de forts maux de tête, des nausées et des états de confusion. Une exposition trop forte est mortelle, lorsque les habitants habitent à proximité des incendies et refusent d'évacuer, par exemple. On trouve également des composés organiques volatilscomposés organiques volatils, un ensemble de matièresmatières chimiques, comme le benzènebenzène et le méthanol, qui sont cancérigènes. Les analyse ont aussi montré que la fumée contenait des hydrocarbures aromatiqueshydrocarbures aromatiques polycycliques et de l'oxyde d'azoteoxyde d'azote, également cancérigènes. Quand ces deux derniers types de polluants se retrouvent sous les rayons du soleilsoleil, cela forme de l'ozoneozone, connue pour provoquer ou aggraver des problèmes respiratoires chez les personnes âgées et les jeunes enfants.

    Le nuage de cendres est dangereux même à une distance de 1 000 kilomètres

    Les auteurs de l'étude ont estimé que le nuagenuage de fumée qui a recouvert New York l'espace de quelques jours provoquera en moyenne 86 décès prématurés dans la ville, alors même que celle-ci ne se trouve pas directement à proximité du brasier.

    Le constat est quasiment le même pour Chicago, avec environ 40 décès prématurés envisagés malgré les 1 000 kilomètres de distance par rapport aux incendies. En ce qui concerne la France, également concernée par le nuage de cendres issu du Québec en cette fin juin, les particules sont davantage diluées après 5 000 kilomètres de voyage au-dessus de l'océan, et présentes à haute altitude dans l'atmosphèreatmosphère. A priori, la pollution du Québec reste faible dans notre pays, même si elle peut être visible dans le ciel. Les quantités de monoxyde de carbone sont considérées comme « faibles à modérées » d'après la simulation de l'organisme Copernicus. Mais précisons tout de même que l'évolution et l'intensité des nuages de fumée sont encore mal cernées par les outils actuels. Les personnes sensibles à la pollution, comme celles qui souffrent de problèmes respiratoires, doivent donc rester prudentes en cas de nuage de fumée sur notre pays.

    Des précautions encore plus grandes doivent être prises si les incendies se situent à proximité, comme c'est le cas tous les étés dans le sud de la France : l'étude américaine montre qu'en cas de conditions météométéo favorables, l'impact sur la santé est important même à plusieurs centaines de kilomètres des feux.


    Les incendies de forêt augmentent le risque de cancer

    Article de Karine DurandKarine Durand, publié le 16 mai 2022

    Les habitants des zones fréquemment sujettes aux incendies sont davantage touchés par les cancers du poumoncancers du poumon et les tumeurs au cerveau.

    L'étude de l'Université McGill, publiée dans The Lancet Planetary Health, est la première à mettre en évidence le lien entre une exposition aux feux de forêt et le risque de cancer. Les chercheurs ont étudié 2 millions de Canadiens sur une période de 20 ans, avec un panel de personnes âgées entre 25 et 90 ans. Partant du constat que les feux de forêt se produisent dans les mêmes zones chaque année, les auteurs de l'étude ont décidé d'analyser les effets sur le long terme de ces incendies sur la santé humaine.

    Plus de risques de cancer jusqu'à 50 km autour des incendies

    Les résultats de l'étude ont montré que les personnes vivant dans un rayon de 50 kilomètres autour des incendies pendant une période de 10 ans ont 10 % plus de risques d'avoir une tumeur du cerveau et 4,9 % plus de risques d'avoir un cancer du poumon, comparé aux personnes plus éloignées des incendies. Le risque d'être atteint par d'autres types de cancer est également apparu dans les résultats : la leucémieleucémie, le lymphomelymphome non hodgkinien et le myélome multiplemyélome multiple. La plupart des polluants émis par les feux de forêt sont des particules cancérigènes dont les effets néfastes sur la santé humaine sont connus : hydrocarbures, benzène, métaux lourds, phénol, formaldéhydeformaldéhyde. Les habitants des zones fréquemment touchées par les feux de forêt sont donc exposés à une pollution cancérigène de manière régulière.

    Une pollution piégée dans les logements pendant des années

    En plus de la pollution de l'air extérieur, les particules néfastes s'infiltrent également dans les intérieurs (habitations, voituresvoitures, commerces, entreprises...) et restent piégées dans ces milieux fermés. Il s'agit d'un phénomène trop souvent négligé par les personnes résidant à proximité des incendies. Les métaux lourds et les hydrocarbures, connus pour déclencher des troubles du système nerveux et du système digestif, s'infiltrent facilement dans les logements et peuvent y rester jusqu'à deux ans après l'incendie ! C'est ce que montrent des analyses effectuées après le gigantesque incendie survenu en 2016 à Fort McMurray au Canada.

    Des traces de pollution, issues de l'incendie de Fort McMurray en 2016 au Canada, ont été retrouvées dans les logements à proximité deux ans après. © DarrenRD, Wikipedia
    Des traces de pollution, issues de l'incendie de Fort McMurray en 2016 au Canada, ont été retrouvées dans les logements à proximité deux ans après. © DarrenRD, Wikipedia

    Des observations à prendre en compte

    Les incendies génèrent aussi d'autres types de pollution que celle de l'atmosphère : ils polluent également le milieu aquatique et le sol, avec des conséquences sur les produits alimentaires et l'eau potable. Des concentrations nocives de benzène et d'autres polluants, issus de la fontefonte de pompes à eaupompes à eau en plastiqueplastique, ont été retrouvées dans l'eau potable après les incendies en Californie ces dernières années.

    Le changement climatique démultiplie le risque d'incendies, et conduit à une saisonsaison des incendies plus précoce et plus étalée au cours de l'année. L'ONU prévoit d'ailleurs une augmentation mondiale des incendies extrêmes de 14 % à l'horizon de 2030, 30 % d'ici 2050 et 50 % d'ici la fin du siècle. Les résultats de l'étude de l'Université McGill montrent la nécessité d'informer la population vivant dans des zones fréquemment brûlées : la plupart des habitants des zones touchées par les incendies à chaque année n'ont pas conscience de la pollution qui les entoure, y compris dans leur logement, et du risque pour leur santé. Les incendies sont la deuxième plus importante source de pollution atmosphérique, après l'ozone, dommageable pour la santé.