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Un troupeau de monbéliardes, une race originaire de Franche-Comté, au pâturage. Le bleu de Bresse et le morbier lui doivent tout. © UPRA - Tous droits réservés
L'espèceespèce Bos taurusBos taurus aura résisté longtemps. Alors que le poulet et le chienchien ont déjà laissé les biologistes admirer leurs génomes, ce mammifèremammifère bovidé plus connu sous les noms de vache et de taureau a donné du travail. Pour venir à bout de son ADN et, surtout, des génomes des multiples variantes génétiques que près de dix millénaires d'élevage ont façonné dans le monde, trois cents scientifiques, issus de vingt-cinq pays, se sont regroupés dans un consortium, sous la direction du Centre de séquençage du Baylor College of Medicine, à Houston (Etats-Unis). En France, l'Inra (Institut national de la recherche agronomique) et l'association France Limousin Sélection font partie du projet.
Six ans et 500.000 dollars plus tard, la Bovine Haplotype Map (ou Bovine Hapmap) est désormais terminée. Elle est en fait disponible 2006 sur le Web pour tous les chercheurs du monde, qui peuvent maintenant étudier en détail plus de 22.000 gènesgènes. Les résultats viennent d'être publiés dans la revue Science et seront présentés au mois de mai à New York (au Cold Spring harbor Laboratory).
Parmi ces 22.000 gènes, 14.345 ont un équivalent chez sept autres espèces de mammifères et 1.217 sont absents chez les marsupiaux (comme les kangourouskangourous) et les monotrèmesmonotrèmes (comme l'ornithorynqueornithorynque), ce qui intéressera beaucoup les biologistes qui veulent construire l'arbre phylogénétiquearbre phylogénétique (indiquant les parentés) des mammifères.
Les vaches, championnes de l'immunité
La première surprise est la ressemblance avec le génome humain. Nos propres gènes sont en effet plus proches de ceux de la vache que de ceux des rongeursrongeurs (souris et rats notamment). Or, dans la lignée qui a conduit à l'être humain, le dernier ancêtre communancêtre commun (DACDAC) avec les rongeurs est plus récent que le DAC avec les ongulés (dont font partie les vaches), et que l'on situe vers 95 millions d'années dans le passé. L'explication viendrait de la duréedurée de vie plus courte d'un rongeur et donc de la succession plus rapide des générations, favorisant la modification du génome au fil du temps. Les souris et les rats évoluent plus vite que les primatesprimates et les ruminants...
Manifestement, l'homme apprécie la vache depuis longtemps. © millevaches
La ressemblance s'étend même à l'échelle des chromosomeschromosomes, dont de grands morceaux, voire des chromosomes entiers, sont semblables. En revanche, certaines familles de gènes ont notablement divergé, notamment ceux touchant à la digestiondigestion (les ruminants ont un système digestif très élaboré, véritable réacteur biologique à bactériesbactéries) et, plus curieusement, à la fonction immunitaire. Il est possible que le mécanisme de la digestion soit également la clé de cette caractéristique. Hébergeant de nombreux micro-organismesmicro-organismes, les ruminants sont plus exposés que les autres mammifères à des infections dues aux microbes.
L'élevage de ces animaux, que l'homme pratique depuis 8 à 10.000 ans, a lui aussi laissé des traces dans le génome. Le consortium a analysé l'ADN de 497 animaux, représentant 19 races (sur 800 connues dans le monde) et géographiquement distinctes (des espèces Bos taurus et Bos indicus).
Les vaches sont équipées d'un système immunitaire puissant, qui les protège sans doute des microbes avalés et mis au travail dans le système digestif. © UPRA - Tous droits réservés
La première conclusion est que l'évolution des ruminants s'est réalisée durant ces millénaires de domesticationdomestication d'une manière particulière, montrant la formation de petites populations isolées et sélectionnées à partir de populations naturelles bien plus grandes.
Pour les éleveurs actuels, la connaissance du génome facilitera ce que l'on appelle la sélection génomiquegénomique, qui consiste à choisir les croisements au vu de la présence ou de l'absence de gènes connus. Les éleveurs utilisent alors des puces à ADN, qui comportent 50 à 60.000 marqueurs, correspondant aux gènes recherchés.
Au final, ce travail international apparaît donc comme une riche source d'enseignements pour les scientifiques et un bon outil pour les éleveurs...