Une étude pilote menée à l'Inserm et au Centre Hospitalier universitaire vaudois à Lausanne a fourni des résultats prometteurs pour l'amélioration des capacités cognitives des personnes atteintes du syndrome de Down. Comment cette thérapie prometteuse fonctionne-t-elle ?
au sommaire
Le syndrome de Downsyndrome de Down, ou trisomie 21, est une anomalie chromosomiqueanomalie chromosomique qui concerne environ un bébé sur 800 en France. Les chromosomes humains sont organisés en 23 paires, mais les personnes atteintes de la trisomie 21 portent trois copies du chromosome 21, le plus petit de tous. Cela se traduit par un large éventail de symptômes, parmi lesquels un déclin des fonctions cognitives avec l'âge, mais aussi une diminution de l'olfactionolfaction.
Une équipe du laboratoire Lille neuroscience et cognition, rattachée à l'Inserm, et le Centre hospitalier universitaire vaudois de Lausanne en Suisse ont collaboré pour tester l'efficacité d'une thérapie à base de GnRH (Gonadotropin-Releasing HormoneGonadotropin-Releasing Hormone ou hormone de libération des gonadotrophines hypophysaires) visant à améliorer les fonctions cognitives d'un petit groupe de patients atteints de la trisomie 21. Les résultats sont parus dans Science.
Des résultats positifs chez la souris…
La GnRH est synthétisée par des neuronesneurones et régule les fonctions de la reproduction via l'hypothalamushypothalamus, mais pas seulement. Des découvertes récentes suggèrent que l'hormone agirait dans d'autres régions du cerveaucerveau impliquées dans des tâches cognitives notamment. Avec ce constat en tête, le groupe de recherche de Vincent Prévot, directeur de recherche Inserm au laboratoire Lille neuroscience et cognition a mené des expériences sur des souris modèles pour la trisomie 21. Chez le rongeurrongeur, le chromosome 16 porteporte exactement les mêmes gènesgènes que le chromosome 21 humain, c'est donc ce dernier qui est présent en trois copies.
Les scientifiques ont ainsi démontré que des micro-ARNARN, dont le rôle était d'activer ou inactiver la synthèse de GnRH, ne remplissaient plus leur rôle. En effet, ils sont localisés sur le chromosome 16 des souris (et le chromosome 21 chez l'humain), et la présence d'une troisième copie provoque des anomalies dans les neurones sécrétant la GnRH, ce qui dérégule la production de l'hormone. Les déficiences olfactives et cognitives observées chez les souris ont pu être corrigées grâce à l'injection de GnRH, à des niveaux comparables à ceux observés chez les souris sauvages.
…et chez des patients atteints de la trisomie 21
Ces résultats ont été discutés avec Nelly Pitteloud, professeure à la Faculté de biologie et médecine de l'Université de Lausanne et cheffe du Service d'endocrinologie, diabétologie et métabolismemétabolisme du CHUV. Son équipe est spécialiste dans le diagnosticdiagnostic d'un déficit congénital rare de GnRH, privant les personnes concernées de pubertépuberté spontanée. Pour induire la puberté, ces dernières reçoivent des injections pulsatiles sous-cutanées de GnRH pour reproduire le comportement naturel de l'hormone.
L'efficacité de ce traitement a été testé sur des patients atteints de la trisomie 21 -- 7 en tout, des hommes âgés de 20 à 50 ans qui ont reçu une dose phyiologique de GnRH toutes les deux heures pendant six mois. Une étude pilote qui a fourni des résultats prometteurs : à l'issue du traitement, les performances cognitives des patients se sont améliorées ; celles-ci étaient accompagnées d'un changement dans la connectivité fonctionnelle observée par IRMIRM.
En revanche, aucun bénéfice n'a été observé sur l'olfaction. « Le maintien du système GnRH semble jouer un rôle clé dans la maturation du cerveau et les fonctions cognitives », explique Vincent Prévot. « Dans la trisomie 21, la thérapie GnRH pulsatile est prometteuse, d'autant qu'il s'agit d'un traitement existant et sans effet secondaire notable », ajoute Nelly Pitteloud.
Les prémices d'une étude plus vaste
La collaboration entre les deux équipes se poursuit cet automneautomne avec le lancement d'une étude plus vaste, incluant idéalement 60 personnes porteuses de la trisomie 21 dont des femmes et un groupe contrôle qui permettra de savoir si les bénéfices observés ne sont pas dûs à l'effet placeboplacebo. Si les résultats sont enthousiasmants, ils ne sont pas suffisants pour justifier une prescription de GnRH aux patients trisomiques, a confié Nelly Pitteloud lors d'une conférence de presse.