Alors qu’on pensait le chromosome Y, caractéristique des mâles chez les mammifères, indispensable pour la reproduction, des chercheurs ont montré qu’avec seulement deux de ses gènes (et un petit coup de pouce), ils pouvaient donner naissance à des souris en pleine santé. Une découverte qui en augure d’autres dans le traitement de la stérilité masculine.

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    Le chromosome Y, paraissant tout petit à côté du X, est propre aux mâles. Seuls 2 de ses 104 gènes suffisent pour permettre à des souris mâles de produire des gamètes immatures qui, une fois injectées selon une technique particulière, peuvent devenir fécondants. © HF Willard, Nature

    Le chromosome Y, paraissant tout petit à côté du X, est propre aux mâles. Seuls 2 de ses 104 gènes suffisent pour permettre à des souris mâles de produire des gamètes immatures qui, une fois injectées selon une technique particulière, peuvent devenir fécondants. © HF Willard, Nature

    Quelle rôle accorder au chromosome Y ? Comme il est propre aux mâles, on lui attribue un rôle prépondérant dans la reproduction. Il favoriserait l'apparition des caractères masculins, et aiderait à la maturation des spermatozoïdes. Sa position est particulière car il est le seul chromosome à ne jamais avoir d'homologue identique, puisque toujours associé à un chromosome X (sauf situation anormale comme une trisomie).

    Ce critère a longtemps inquiété les scientifiques, qui l'ont cru vulnérable et même en cours d'éradication par les processus évolutifs, car en cas de mutation, il ne peut compter sur la seconde version pour compenser. Récemment, une étude a montré qu'il n'y avait pas de quoi paniquer. Il doit en effet disposer d'autres moyens de réparation car il n'aurait que très peu varié durant les 100 derniers millions d'années. De quoi être rassuré donc.

    Mais à quels niveaux intervient-il vraiment ? On sait depuis quelques décennies qu'il porteporte le gène Sry, indispensable à la différenciation sexuelle, en permettant le développement des organes génitaux mâles. Ainsi, des souris génétiquement modifiées sans chromosome Y mais disposant de Sry inséré à un autre niveau du génome présentent les caractéristiques morphologiques des mâles. Mais demeurent infertiles car elles ne produisent pas de spermatozoïdes.

    Le gène <em>Sry</em> se retrouve sur en position Yp11.31, c'est-à-dire sur le bras court du chromosome Y. © Mysid, Wikipédia, DP

    Le gène Sry se retrouve sur en position Yp11.31, c'est-à-dire sur le bras court du chromosome Y. © Mysid, Wikipédia, DP

    Sry et Eif2s3y, la clé de la fertilité masculine

    Récemment, les scientifiques ont testé les différents gènes du chromosome Y pour déterminer leur effet. Ils ont compris que Sry, combiné à un autre gène appelé Eif2s3y, suffisaient à produire des gamètesgamètes immatures, appelées spermatidesspermatides rondes (ou spermatides I). Dotées d'un seul jeu de chromosomes, comme le spermatozoïde, elles sont bien des gamètes mais, dépourvues de flagelleflagelle, elles ne peuvent remonter les voies naturelles jusqu'à l'ovule.

    Pourtant, pour Monika Ward, biologiste affiliée à l'université d’Hawaï (Honolulu, États-Unis), cet obstacle n'est pas insurmontable. Grâce à une technique de reproduction assistée, elle et ses collègues ont montré dans Science que ces deux gènes pouvaient suffire à féconder des ovulesovules et à donner naissance à une nouvelle génération de rongeursrongeurs qui se portent bien, et dont les femelles sont fertiles.

    Vers des progrès dans le traitement de la stérilité masculine

    Les chercheurs ont eu recours à une méthode dite d'injection des spermatides rondes, grâce à laquelle ils insèrent le gamète immature directement dans un ovule. Et ça marche ! Certes, le taux de réussite n'est que de 9 %, ce qui est bien en dessous des 26 % obtenus par la même technique pratiquée chez des souris contrôle. Mais 12 des 132 souris ont survécu, et certaines ont même pu avoir une portée.

    Les auteurs le précisent : leur intention n'est nullement de démontrer l'inintérêt du chromosome Y. Ils cherchent seulement à déterminer le rôle de chacun des gènes pour comprendre les processus clés indispensables à la reproduction. Si de tels résultats s'extrapolent à l'Homme, alors ils pourraient permettre de mieux traiter l'azoospermieazoospermie, la situation où un homme ne produit quasiment aucun spermatozoïde, ce qui évidemment le rend stérile.