Un nouveau variant du SARS-CoV-2 s’attaquant spécifiquement aux enfants est-il apparu ? C’est l’une des hypothèses sur la table après la découverte d’un bébé portant une charge virale 51.418 fois supérieure à la normale des enfants de son âge au Children’s National Hospital à Washington.
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Selon les nombreuses études menées sur le sujet, les enfants en bas âge présentent généralement peu de symptômes de la Covid-19 et sont moins susceptibles de transmettre le virus. Selon une étude britannique, seuls 0,06 % des nouveau-nés de moins d'un mois sont touchés par la maladie. Des médecins du Children's National Hospital viennent pourtant de décrire le cas d'un nourrisson présentant de sévères symptômes et une charge virale effarante, 51.418 fois supérieure à la normale des enfants de son âge. En séquençant le génome du virus, les chercheurs ont constaté qu'il était porteur d'une mutation qu'ils n'avaient encore jamais vue auparavant, située sur la protéine de pointe et nommée N679S. (La mutation avait en réalité déjà été observée sur huit autres cas aux États-Unis).
Une mutation qui augmente la charge virale ?
Cette découverte fait penser aux chercheurs que cette mutation pourrait être liée à la charge virale exceptionnelle observée chez le bébé. « Cela pourrait être une coïncidence totale, mais l'association est assez forte. Quand vous voyez un patient qui a exponentiellement plus de virus et qu'il s'agit d'une variante complètement différente, c'est que vous avez probablement un lien », analyse dans le Washington Post Roberta DeBiasi, chef des maladies infectieuses de l'établissement. Une autre possibilité soulevée par le virologue Jeremy Luban est que la charge virale anormalement élevée soit liée au système immunitairesystème immunitaire immature du nourrisson, qui permet au virus de se multiplier « de façon incontrôlable ». Mais comme la mutation affecte la protéine de pointe, qui influe sur la capacité du virus à infecter la cellule, « il est probable qu'elle ait quelque chose à voir avec la charge virale », confirme William Hanage, épidémiologiste à la Harvard School of Public Health.
Jusqu'à présent, aucun variant n'a pu être prouvé plus contagieuxcontagieux ou plus dangereux pour les enfants. Mais plusieurs indices sont préoccupants. Selon une étude du BMJ, le variant anglais pourrait avoir une faculté plus élevée à pénétrer dans les cellules, ce qui modifie les chances d'être affecté chez les enfants (ces derniers présentant des récepteurs ACE2 - auxquels se lie le virus - différents de ceux des adultes). En Israël et en Italie, on a également observé récemment une montée en flèche des infections chez les enfants. Le nombre de bébés infectés, âgés de moins de deux ans, a ainsi quadruplé en Israël au mois de janvier par rapport à décembre.
Le saviez-vous ?
Si les cas graves de Covid-19 sont rares chez les enfants, le virus peut entraîner chez eux un syndrome inflammatoire multisystémique, avec des caractéristiques typiques de la maladie de Kawasaki (fièvre prolongée, dysfonctionnement cardiaque, symptômes gastro-intestinaux, neurologiques et/ou rénaux).
Entre le 1er mars 2020 et le 21 février 2021, 396 cas de ce syndrome avaient été enregistrés en France, dont les 3/4 testés positifs à la Covid, selon Santé publique France.
Les enfants, précurseurs de nouvelles mutations ?
Dans un article prépublié sur le site MedXriv analysant le cas du bébé du Children's National Hospital, les chercheurs ont constaté que la mutation N679S était associée à une autre mutation, la D614G, augmentant la capacité infectieuse du virus. Et, selon les auteurs, l'association de ces deux mutations pourrait « contribuer à la persistance de la variante N679S ». Ce qui, si sa gravitégravité chez les enfants se confirme, pourrait changer le profil épidémique de la maladie.
« L'identification de cette variante chez un très jeune patient, son emplacement critique et les preuves qu'elle a été détectée chez d'autres patients soulignent la nécessité d'un séquençageséquençage viral accru pour surveiller la prévalenceprévalence et l'émergenceémergence des variantes chez les enfants », insistent les auteurs de l'étude. D'autant plus que ces derniers ne sont pas admis à la vaccinationvaccination pour l'instant, ce qui pourrait faciliter l’émergence de mutations chez ce public.