La première cartographie mondiale de la distribution des vers nématodes parasites Anisakis s’avère des plus utiles pour suivre les populations de certains cétacés. En outre, elle permet également d’estimer des risques d’infection pour de nombreux pays. Ces parasites seraient-ils à la fois des boîtes noires et des boules de cristal ?

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    Cycle de développement des vers nématodes du genre Anisakis. À l'âge adulte, ces vers peuvent mesurer 15 cm de long et avoir un diamètre compris entre 2 et 4 mm. © USGOV-CDC, DP

    Cycle de développement des vers nématodes du genre Anisakis. À l'âge adulte, ces vers peuvent mesurer 15 cm de long et avoir un diamètre compris entre 2 et 4 mm. © USGOV-CDC, DP

    L'anisakidose est une maladie causée par des vers nématodesnématodes appartenant au genre Anisakis. Près de 20.000 personnes en souffriraient dans le monde. Elle provoque des douleurs abdominales, des nausées, des vomissements et de la fièvre. Dans les cas les plus graves, de fortes réactions allergiques peuvent survenir.

    Le cycle de reproduction de cet animal est complexe. Les œufs, rejetés dans les déjections des hôtes, éclosent en mer. Les larveslarves sont mangées par des crustacéscrustacés, eux-mêmes être ingérés par des poissonspoissons ou des céphalopodescéphalopodes. À ce stade, les larves s'enkystent à l'intérieur de la paroi intestinale. La fin du cycle correspond à l'ingestion d'un hôte intermédiaire par un mammifère marin ou un oiseauoiseau. C'est à ce moment que la larve devient un ver adulte.

    Des parasitologues dirigés par Sven Klimpel du centre de recherche sur la BiodiversitéBiodiversité et le climatclimat de Francfort (BiK-F) ont modélisé la première carte de distribution mondiale des différents parasitesparasites du genre Anakis. Ce travail est présenté dans la revue Plos One.

    La carte a été dressée grâce à des études moléculaires (séquençages d'une partie de l'ADN ribosomique) réalisées sur 371 larves récoltées en 21 points du globe. À cela s'ajoutent des données fournies par 53 articles scientifiques présentant des recherches faites à plus petite échelle.

    Il apparaît que chaque espèceespèce de ver possède une répartition bien précise en fonction de conditions climatiques et géographiques. La présence d'une espèce reflète également celle de son hôte préféré. Ce modèle permet aussi d'étudier la distribution et divers comportements de mammifères marins. De plus, il fournit une aide pour évaluer les risques d'infection dans les pays émergentsémergents.

    Ces deux cartes montrent la distribution d'<em>Aniksakis simplex </em>(en haut) et <em>Anisakis typica </em>(en bas). La première espèce s'observe uniquement dans l'hémisphère nord tandis que la seconde a une répartition tropicale. <em>© BiK-F</em>

    Ces deux cartes montrent la distribution d'Aniksakis simplex (en haut) et Anisakis typica (en bas). La première espèce s'observe uniquement dans l'hémisphère nord tandis que la seconde a une répartition tropicale. © BiK-F

    La géolocalisation par… parasites

    Les larves du parasite constitueraient une composante importante et constante de la chaîne alimentairechaîne alimentaire océanique. Leur répartition dépend fortement des habitudes alimentaires des hôtes intermédiaires et terminaux.

    La distribution et les migrations des cétacés pourraient être déterminées à partir de la répartition des parasites qu'ils abritent. Schématiquement, observer la présence d'un ver dans une région du monde revient à repérer une baleine.

    La résolutionrésolution du modèle (1° x 1° pour l'intégralité de la surface du Globe) permettrait de tirer des conclusions sur la présence d'espèces de cétacés dans des zones très spécifiques et d'estimer la taille des populations. 

    À l'heure actuelle, 35 espèces de mammifèresmammifères marins pourraient être des hôtes potentiels. Par ailleurs, les chercheurs ont identifié 75 espèces de poissons osseux et cartilagineux pouvant servir d'hôte intermédiaire.

    Un outil épidémiologique pour les pays émergents

    L'Homme peut être infecté lorsqu'il consomme du poisson cru ou peu cuit. Les régions où ce type de cuisine est traditionnel sont particulièrement concernées. En 2006, plus de 2.500 cas ont été répertoriés au Japon. L'Espagne, la Norvège, les Pays-Bas et le Royaume-Uni seraient les pays les plus touchés en Europe.

    Le modèle confirme l'existence de ces hotspotshotspots d'infection. Mais il en montre d'autres. Les pays émergents seraient particulièrement visés par le phénomène. Le poisson et les crustacés représentent en effet d'importantes sources de protéines pour ces régions. Ils sont consommés en grande quantité. Les risques d'infection à l'anisakidose y seraient donc plus élevés qu'ailleurs.

    Malheureusement, peu de chiffres sont disponibles. Selon les concepteurs du modèle, leur outil permettrait d'estimer le risque d'infection par des vers Anisakis dans les différents pays concernés.